J'ouvre les yeux, suffocante, mes mains compressant ma gorge. Où est-il ?! Comment a-t-il pu me retrouver ici ?! Tout est flou autours de moi, je n'arrive à distinguer que des vastes formes. Mon corps est horriblement pâteux à tel point que je suis incapable de me redresser. Il m'aurait droguée ? Je suis sûre qu'il m'a droguée ! Ca recommence.. Ca recommence encore..! Je dois m'enfuir ! Je tente de me relever mais mes muscles refusent catégoriquement. L'entente de mon prénom attire mon attention. Tant bien que mal, je redresse la tête et la voix s'éclaircit :
"Anastasia.."
L'espace d'un instant il me semble reconnaître la voix de ma mère. Ce n'est pas possible je dois forcément délirer ! Je secoue la tête et bafouille :
"Ce.. ce.."
Les mots restent coincés au fond de ma gorge. Ce n'est pas elle, ce n'est pas possible, ils étaient juste là ! Je sens le matelas se déformer sous le poids d'une personne. Un faible hurlement sort de ma bouche, comme une supplique. Ca ne peut être elle mais je le souhaite tellement. Je veux juste que tout ça s'arrête. Tremblante, je lève la main gauche et tente de toucher la personne. Ayant alors desserré l'emprise sur ma gorge, j'arrive à prendre une grande bouffée d'air. Soudainement je sens une douce chaleur envelopper ma main tandis que je crois à nouveau reconnaître la voix de ma mère. Elle ne cesse de me parler calmement.
Quand je réalise qu'enfin tout est fini, mes nerfs se relâchent et je fonds en larmes. Elle me prend dans ces bras et me caresse les cheveux tendrement. La chaleur ressentie il n'y a de là quelques instants se répand alors dans tout mon corps. Petit à petit ma vue s'éclaircit.
"Je suis venue dès qu'ils m'ont appelée.. murmure-t-elle tandis qu'elle resserre son étreinte"
Ma respiration revient doucement à la normale et j'arrive à passer mes bras dans son dos, sanglotant durant de bonnes minutes.
Après mettre calmée, je m'écarte d'elle."-Ils m'ont retrouvée, je la questionne la gorge toujours nouée.
-Mais non.. Ils ne peuvent pas venir ici c'est impossible, dit-elle calmement, aucun des deux ne pourra plus jamais revenir. Ils ne t'approcheront plus jamais, ils pourrissent au fond d'une cellule tu le sais bien..
-Mais l'ai vu dans le couloir ! Il était là, crié-je en me recroquevillant sur moi. J'étais avec lui quand soudain il a disparu et... et..."
Je me coupe et essuie du revers de la main les larmes qui recommencent à perler sur mes joues. Simultanément mon corps se met à trembler et mon cœur devient douloureux. Elle ne me coupe pas et attend patiemment que je veuille continuer. Je tousse à plusieurs reprises avant de reprendre :
"-J'étais seule.. seule là.. et lui est arrivé.., marmonné-je d'une voix sombre. Devant moi.. je l'ai frappé de toutes mes forces. Puis.. J'ai été encerclée, je ne pouvais pas m'enfuir.. Et plus rien.. tout est devenu noir.
-Lui, eux, ils ne sont plus là. Même s'ils paraissaient réels, tu ne crains rien ce n'étaient pas eux."
Elle s'interrompt pour réfléchir.
"-Avant de le voir tu étais avec qui ?
-Le mec de l'autre jour.. enfin dont je t'ai parlé tu sais..
-Tu as pu le rencontrer ?
-Hum..., dis-je en hochant la tête.-Il est beau, m'interroge-t-elle avec un sourire en coin."
Elle continue à me poser des questions à son sujet et je finis par me détendre. Elle a réussit à distraire mon intention et donc mes angoisses. L'air qui était si étouffant est de nouveau respirable tandis que ma vision est revenue à la normale.
Nous avons ainsi discuté tout l'après-midi sans évoquer de nouveau ce qu'il venait de se passer.
Pendant ce court laps de temps je me suis sentie adolescente. Une adolescente ordinaire en train de discuter normalement avec sa mère d'un garçon qu'elle vient de rencontrer. Elle me donne quelques conseils pour paraître moins fermée, plus ouverte. Je souris sincèrement, cela faisait bien longtemps que je n'avais plus eu un centre d'intérêt. De ne pas avoir ce poids à porter. Juste, oublier. Mais comme chaque moment, celui-ci a une fin, une fin prématurée puisqu'elle se doit d'aller travailler. Pourquoi doit-elle y aller ce soir..? Elle ne peut pas avoir des horaires comme tout le monde ? C'est alors que, comme si elle lisait dans mes pensées, elle me dit :
"- J'apprécie vraiment ces horaires, si je n'étais pas nounou, que j'avais un emploi normal, je n'aurais pas pu pas accourir immédiatement pour être avec toi."
Elle a raison mais cela n'empêche, je ne veux pas qu'elle parte, que la pièce retrouve son calme et que je redevienne cette patiente parmi les autres. Je m'allonge et regarde le plafond.
"-Mais je reviendrai demain, c'est promis, m'annonce-t-elle en se levant de mon lit"
Sans dire un mot, je me lève et l'enlace par derrière. A chaque fois je rends les choses encore plus difficiles mais je ne sais faire autrement. Après un instant, je la libère et elle finit par partir, ne pouvant se permettre d'être en retard. Je me poste à la fenêtre afin de la regarder partir et de lui dire un dernier au revoir.
Les larmes montent aussitôt, mes jambes tremblent et je retourne donc m'asseoir au bord de mon lit.
"-Je suis désolé.."
A l'entente de cette voix, je sursaute et me retourne paniquée. Je tombe nez à nez avec cet homme. Affolée, je tombe à la renverse de mon lit. Je ferme les yeux attendant la chute. Cependant après quelques secondes il n'y a aucun choc, je les rouvre et le voit me tenir par les flancs.
"-Lâche-moi, lui hurlé-je aussitôt.
-Très bien, sourit-il avant de s'exécuter."
Il desserre son emprise sur moi et je tombe au sol dans un bruit sourd. Sonnée, je vais m'assoir contre le mur en me frottant l'arrière de la tête. Comment a-t-il osé me laisser tomber comme ça !?
"-Quel s... Je sermonne tout en lui lançant un regard noir."
Il est là, à quatre pattes sur mon lit pouffant de rire.
"-Tu devrais voir ta tête..! Elle est hilarante !
-Mais.. !"
Je me mords la lèvre pour ne pas l'injurier. Je finis par lui demander:
"-Comment as-tu pu rentrer dans ma chambre ?!
-Il s'est passé quoi hier, demande-t-il sans prendre en compte ma question.
-Je refuse de répondre la première, rétorqué-je froidement en fronçant les sourcils.
-Je me donne les moyens de faire ce que j'ai envie, lâche-t-il en s'asseyant en tailleur sur mon lit, j'ai envie de comprendre."
Il n'a pas besoin de savoir, qu'est-ce que ça peut bien lui faire de toute manière. Je remonte mes genoux et les serre entre mes bras. Je veux qu'il parte, mais au lieu de ça, il me fixe. L'ambiance est tendue, enfin selon moi. J'ai plutôt l'impression que lui, il s'amuse.
"-Je te fais pitié c'est ça, lui lancé-je.
-Non loin de moi cette pensée, s'exclame-t'il en agitant les mains devant lui. Je veux comprendre c'est tout.
-Comprendre, répété-je en arquant un sourcil. Personne ne peut comprendre, murmuré-je.
-Normal vu que tu ne veux pas parler."
Il marque un point. Mais qu'a-t'il à y gagner de savoir sincèrement ?
-Tu m'as rappelé ce que j'essaye de fuir, je lui souffle.
-Je te fais vraiment autant d'effet ?"
Je déteste son ton désinvolte, comme si la situation était normale, que rien n'était grave ! Je tente de lui expliquer mais il s'en moque. Pourquoi vient-il me voir alors !? Ce n'est pas comme si j'étais la seule à être bizarre ici. Je ne suis pas la seule à me comporter de manière surprenante ! Nous sommes regroupés entre gens anormaux ! Puis surtout comment se fait-il qu'il est là, qu'il ait pu rentrer.
Subitement et sans dire un mot, il se lève et sort de la chambre nonchalamment.
En fin de compte, je le déteste. Il part comme ça ? Mais c'est qui ce mec sans déconner ?! Je ne connais même pas son prénom. Et dire qu'il a été au centre d'une de mes seules discussion ! Je serre les poings de rage et sent ma gorge me piqueter. Je retourne m'assoir sur mon lit et essaye de penser à autre chose afin de ne pas m'énerver d'avantage. Cependant cela se révèle être mission impossible dans cette pièce vide. Mon regard se pose sur l'horloge murale; il est 18h47. Ils ne vont pas tarder à revenir. Je soupire de lassitude et mes épaules s'affaissent.
Après ça, les jours se sont succédés tous plus ennuyants les uns que les autres. La solitude étant vraiment en train de me tuer.
Avec ma psychiatre rien n'avance, nos séances ne mènent à rien. J'ai juste l'impression qu'elle ne me comprend pas. Il est vrai que je ne lui dis pas tout, même pas grand chose en soit. Mais je ne veux plus en parler, je veux juste oublier, elle ne veut pas l'intégrer ça ?!
En ce qui concerne cet homme, il n'est jamais revenu depuis. Tant mieux puisque cela veut dire que je n'ai pas eu à le supporter d'avantage.Alors que la journée s'écoule comme toutes les autres, de la musique provenant de la chambre voisine résonne dans toute la pièce. Encore cette fille de The rings ?! Elle va bien finir par la couper sa musique me dis-je pour me rassure. J'attends plusieurs minutes dans l'espoir qu'elle se décide, au moins, à baisser le volume. Petit à petit, je sens l'énervement monter en moi. Quand celui-ci atteint son paroxysme, je me lève, fébrile mais férocement, afin d'aller cogner contre le mur. Je ne fais que m'esquinter les mains et m'irriter la gorge; la musique est toujours là. C'est alors qu'en m'appuyant contre le mur, le corps toujours trop vaseux pour réussir à me déplacer seule, je sors de la pièce. Droit ou non je dois faire un sorte que cette musique cesse. Je frappe à plusieurs reprises à sa porte. Avant même que la porte soit entièrement ouverte, je lui dit agacée :
"-Coupe ton enceinte."
Sans même chercher à discuter elle me claque à nouveau la porte au nez. Seulement je mets mon pied au travers pour l'empêcher de se fermer. Je rentre en trombe dans la pièce. Je marche si vite que, surprises par ma rapidité, elle se recule et je me rattrape à son lit. La musique est de plus en plus forte je crie alors :
"-Elle est où ton enceinte de merde hein ?!
-Mais y'a pas de musique sale folle, me crie-t-elle"
Je commence à mettre sa chambre sans dessus dessous. Je jette sa couette par terre ainsi que ses coussins, rien. Je soulève le matelas, toujours rien ! Je deviens folle bordel. La musique change, mes pupilles se rétractent et mon pouls s'accélère. Pourquoi est-ce cette musique ?! Dans la hâte je fouille tous ses tiroirs. C'est alors que, sans que je ne m'y attende, elle m'attrape le bras. Je la regarde et, l'espace d'un instant, je revois l'un des hommes qui a gâché ma vie. Je panique et repousse cette personne de toutes mes forces. Suite à ça, je lui assène un puissant coup de pied dans les cuisses. Elle se met à hurler de douleur et tombe au sol déséquilibrée. Je sors d'ici en courant comme si ma vie en dépendant et retourne dans ma chambre en claquant brutalement la porte. Je tombe en avant et me mets à suffoquer. A peine quelques secondes après, la porte s'entrouvre encore. Cependant mon poids la bloque; je m'époumone horrifiée "Dégage de là ! DEGAGE !". C'est alors que je reconnais mon infirmière :
"Anastasia...!!"
Je m'avance immédiatement à quatre pattes complétement déroutée. Elle se précipite dans la pièce et dès lors des cris et des pleurs sont font audibles. Elle s'empresse :"Nous n'avons pas le temps il faut que tu me suives et vite ! Tu changes de chambre !"
Elle semble totalement paniquée, je ne l'avais encore jamais vu comme ça. Elle m'attrape la main et me tire hors de la pièce. En me relevant si subitement je manque de retomber mais elle me retient.
"Ils m'ont retr...."
Elle me coupe la parole :
"-Un car de quarante élèves est tombé dans un ravin, vingt-deux enfants sont grièvement blessés et on manque de place. Je te transfère dans une chambre plus petite."
Elle presse le pas et dans la précipitation je la suis sans poser d'avantage de question. Je ne veux surtout pas être seule livrée à lui, à eux. Ils m'ont retrouvée..! Je le savais qu'ils étaient là.
Ma soignante et moi sommes presque en train de courir au milieu de tout ce chahut, de ces ambulanciers et infirmiers qui courent dans les couloirs poussant des brancards, de ces parents suivant désespérément leurs enfants. Plus je regarde autours de moi, et plus des cris de douleurs retentissent. Je me bouche les oreilles comme je le peux avec mon unique main ne voulant pas entendre tout ça. Ma vision commence à se troubler mais je ne peux pas perdre connaissance ici. Je ne peux pas, ils vont me rattraper sinon ! Je dois continuer à m'éloigner. Je n'entends et ne vois quasiment plus rien. Je me laisse juste traîner par moi aide-soignante à travers l'hôpital. Je ne saurais dire quel chemin elle emprunte et encore moins pendant combien de temps je l'ai suivi.
Arrivées, elle s'empresse de me laisser dans cette nouvelle chambre bien plus petite. Elle se hâte de me dire qu'elle en aura pour quelques heures et qu'elle repassera dès qu'elle le pourrait. Je me retrouve alors seule dans cette minuscule pièce, les larmes dévalant mon visage à fixer la porte close. Je me mets à lui hurler de ne pas me laisser seule, qu'ils m'ont retrouvée. Je martèle la porte de nombreux coups de poings jusqu'à m'en faire saigner d'avantage les phalanges.
VOUS LISEZ
Le pire est-il vraiment derrière nous ?
AventuraInternée depuis plusieurs mois, elle ne rêve que d'une chose : s'enfuir. C'est aux côtés d'un illustre inconnu que ce rêve surréaliste va se réaliser. Qui est-il et pourquoi l'aide-t-il ne sont pas ses premières préoccupations. Pour le moment tout c...