Prologue

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« Je vais vous lire un texte que j'avais écrit en fin de Terminale. J'espère qu'il vous éclairera sur l'humanité de Pierre..., euh, de M. Monnerville. J'en ai coupé quelques parties...personnelles.

« C'est le dernier cours. Je ne mettrais plus jamais les pieds dans cette salle en tant qu'élève, je n'occuperai plus jamais cette place que je chérie tant – celle du fond près du radiateur et de la fenêtre. Mon regard ne fixera plus la Tour Eiffel et ne se perdra plus jamais dans l'immensité du ciel bleu. Je ne rêverai plus à chaque instant des cours de mathématiques de quitter la salle. J'ai mon baccalauréat sans l'avoir passé. Merci cher Coronavirus.

Plus jamais de lycée, plus jamais de cours d'histoire-géographie. Pourtant un sentiment terrible d'inachèvement. D'avoir perdu mon seul ancrage, la seule chose qui rendait les lundis, mardi, mercredi et vendredi plus légers. Les cours d'histoire. Les cours de Pierre Monnerville.

C'est la fin d'une ère, sûrement le début d'une nouvelle. Pourtant, alors même que son dernier cours n'a pas encore commencé, mes pensées sont attristées par un sentiment d'inachevé. Comment ne pas regretter le temps fabuleux de ces cours ?

« Les Français ont la mémoire courte », disait-il bien souvent. Pourtant, je ne pourrais jamais oublier son rire, ces facéties, ces révélations, son ton grave quand il révèle une affaire d'état mais aussi ses confidences et nos conversations où nous refaisions le monde. Et s'il ne voulait plus de moi après ?

Pierre est de ces professeurs qui bouleversent votre existence. En sa présence, vous vous pensez intelligents, vous riez, vous apprenez, vous vivez mais vous êtes aussi écoutés. Il n'est pas seulement un professeur, mais tellement plus : un ami, un confident, une oreille bienveillante. Je l'aime.

Il m'a permis de tenir. Que vais-je faire sans lui ?

Stupide, je pleure. Il rentre en classe, j'entends déjà son rire.

Merci Journal. Merci les mots. Il aime les mots. Parler permettrait pour lui de régler tous les maux. S'exprimer, voilà ce qu'il m'a appris. La force, le courage de la parole. Il trouve toujours 'les mots pour le dire'. »

« Voilà, c'est ce que je pensais de lui alors. Depuis il m'a montré qu'il était encore plus que tout cela. Que les mots étaient trop peu nombreux pour décrire l'humain qu'il était. Le « pessimiste joyeux », l'amoureux de la vie malgré les désastres. Sa grande sagesse était d'aimer la vie malgré les grands drames. C'était aussi sa plus grande folie. Merci, Pierre. »

Quelque part dans l'inachevéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant