Chapitre 4

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Pierre Monnerville ne savait que faire devant la détresse de son étudiant. Il n'en connaissait pas vraiment la cause même s'il soupçonnait qu'elle était liée au récent décès de son ami Jacques Doiron. Il se leva finalement pour fermer la porte de son bureau se doutant que son élève n'aimerait pas être vu dans cet état.

- Je suis désolé, murmura finalement son élève alors que des larmes coulaient encore sur son visage triste.

- Pas de soucis, votre tristesse doit s'exprimer, c'est normal, Léon, le rassura -t-il.

- Merci...

- Mes deux parents étaient psychologue alors tout devait être extériorisé... déclara son professeur amusé, tentant de faire rire son élève.

Le professeur retourna derrière son bureau, proposant un mouchoir à son élève. Celui-ci le prit avec un regard reconnaissant et essuya ses larmes qui avaient cessé de couler. Le jeune homme parut fragile aux yeux de son professeur. Ce dernier aurait voulu lui transmettre toute son ardeur de vivre. Il percevait la douleur de son élève qui transparaissait malgré ses efforts de dissimulation. Son visage aux traits fins, son regard vert et déchiré, ses cheveux noirs en bataille lui rappelait des photographies de populations ayant connues de grands drames. Quel était le grand drame de Léon Foucault ? L'être humain et l'historien qu'il était n'aspirait qu'à le découvrir. Il voulait l'aider. N'était-ce pas aussi le rôle d'un professeur d'aider un jeune adulte égaré ?

- Veux-tu me dire ce qu'il s'est passé ? demanda alors le professeur. Je peux t'aider et rester discret s'il le faut. Je suis la taupe rouge après tout, se moqua -t- il, faisant référence à un surnom qu'on lui avait donné.

Léon hésita un instant. Finalement, il lui raconta tout ce qu'il s'était passé après les cours, factuellement, sans jamais évoquer ces ressentis, ce que le professeur releva mentalement. Il demanda à M. Monnerville de ne pas prendre son parti auprès du coach.

- Pourquoi ? Vous avez défendu la mémoire de votre ami, n'est-ce pas honorable ?

- Je n'ai pas envie que cela s'ébruite. Je... C'est compliqué, finit par dire Léon ne trouvant pas ses mots.

- D'accord, mais je ne souhaite pas que vous soyez punis. Je m'arrangerai. Vous ne méritez pas cela, Léon. Vous avez défendu des personnes souvent moquées et votre ami. Je ne sais pas si j'aurais eu votre courage.

- Vous l'aurez certainement eu, Monsieur, répondit le plus jeune avec certitude. Il allait continuer son éloge mais se retint finalement.

- C'est gentil, mais je ne suis qu'un être humain – aussi bourré de défauts. L'homme n'est pas infaillible, Léon.

- Mon père pense que l'homme intelligent et fort ne fait pas d'erreur, souffla Léon.

- Ah oui ? l'invita à continuer M. Monnerville.

- Bref, je vais peut-être y aller et ne pas vous déranger plus longtemps, dit Léon remarquant qu'il commençait à se faire tard.

- Vous ne me dérangez pas Léon. Si vous avez besoin de quelqu'un pour discuter de quoi que ce soit, n'hésitez pas, finit par dire le professeur principal, voyant que son élève n'était pas prêt à s'ouvrir davantage.

- Vous rentrez en métro ?

- Oui, faisons un bout de chemin ensemble, proposa alors le professeur.

Ils sortirent du lycée peu après vingt-heures, et discutèrent de sujets plus légers sur le chemin. Ils rirent en évoquant la dernière personnalité politique qui s'était ridiculisée par son incompétence. Léon observait son professeur avec toute l'attention qu'il avait encore, souhaitant capturer l'allégresse qui en émanait. M. Monnerville portait un pantalon bleu marine et un polo rose sous un pull assorti au pantalon. Léon pensa alors que cela lui correspondait bien. Dans le désespoir bleu marine du désordre planétaire, l'humour ravageur de son professeur était d'un rose éclatant. C'était cliché, mais le garçon aimait bien cette idée. Son professeur le disait souvent en classe, après un discours sur le cynisme en politique : « Je suis un pessimiste joyeux ». Ils se séparèrent finalement, chacun rentrant chez lui.

Quelque part dans l'inachevéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant