CHAPITRE V

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- Madison ! On y va ! Je cris d'en bas des escaliers.

Elle prend beaucoup trop de temps. Je souffle d'exaspération. Normani nous attend dehors et je n'ai pas envie de la faire patienter encore plus longtemps.

Les marches craquent signe que ma femme descend. Elle arrive avec un grand sourire. Je sens qu'elle est très enthousiaste d'y aller. Elle s'approche de moi et m'embrasse chastement.

- Tu me trouves belle ? Demande-t-elle en tournant sur elle-même.

- Oui. Magnifique, je réponds en l'analysant de haut en bas.

Je pose mes mains sur ses hanches et la colle à moi. Je suis d'humeur taquine ce soir. Je mets ma tête dans son cou et dépose des baisers humides. Elle rigole et prend ma tête entre ses mains et nos lèvres se rencontrent une nouvelle fois. J'ai encore du plaisir pour ma femme même si je l'ai trompé. Je sais que je l'aime mais quelque chose me perturbe.

Je me détache et lui attrape la main. On se dirige à l'extérieur et nous montons dans la voiture de ma meilleure amie. Nous sommes à l'arrière. Je sens une pression sur mon épaule. Madison a posé sa tête contre celui-ci. Elle me regarde une seconde.

- T'es sexy dans cette tenue, m'avoue-t-elle en rougissant.

Je souris malicieusement.

- Ne faites pas des cochonneries dans ma voiture ! Intervient Normani.

Je ris mais Madison semble gênée. Je trouve cela mignon.

Pendant le trajet, un silence reposant s'est mis en place. Je divague dans mes pensées. Mon passé surgit dans ma tête et je repense à toute mon adolescence. Je ne sais pas si je regrette certaines choses. Sûrement que oui. J'ai fait trop de mal à une personne. Ce n'est pas de sa faute. Elle était juste sous mon charme comme pas mal de personnes mais elle a retenu mon attention. J'aurais peut-être aimé ne pas la rencontrer. Ça aurait été plus facile. Les moments passés avec elle étaient simples, apaisants et j'étais comblée. Choisir entre Camila et Madison a été difficile. Mon choix était fait mais je devais me porter responsable de mon futur enfant. Madison était tombée enceinte de moi, à dix huit ans. Ça m'a détruit en quelque sorte. J'étais profondément triste. J'ai brisé une relation et menti. Je n'aimais plus Madison. Je savais que Camila était la femme avec qui je vivrai ma vie mais ça n'a pas été possible. Malheureusement. Mais les années passent et plus j'arrive à oublier les sentiments que j'ai pu ressentir et petit à petit j'ai apprécié ma vie jusqu'à que je commence à boire et à tromper ma femme. C'était le début de la fin. J'ai perdu mon père. C'était la seule personne que j'aimais de ma famille et ça m'a profondément anéanti. C'est peut-être le moment déclencheur de ma dépression même si je sais au fond de moi que j'étais déjà triste il y a déjà bien longtemps. Tout ça est de ma faute, si je n'aurais pas mis enceinte Madison, tout ça ne se serait pas passé. J'aime mon fils mais j'aurais aimé l'avoir plus tard pour profiter de ma jeunesse et du véritable amour.

- On est arrivées ! Crie Normani.

Je sursaute et reviens à la réalité. J'ai perdu ma joie de vivre en repensant à ça.

Nous sortons du véhicule. Je suis déjà venue chez Ally puisque c'est encore notre amie mais que je vois très peu en ce moment. C'est une femme de notre âge qui était au lycée avec nous et qui était cheerleader avec Madison. Elle s'est mariée avec un homme très riche à cause de ses parents qui lui ont forcés la main. Elle est malheureuse. Son mari ne la traite pas très bien, pas au point de la frapper mais de l'intimider moralement. Il la rabaisse pour se sentir supérieur. Il me dégoûte mais nous ne pouvons rien faire. Elle n'a pas le droit de travailler, n'a pas le droit d'avoir de compte en banque, ni de voiture, ni de sortie sans autorisation. Il se croit encore au Moyen-Âge. Les hommes de ce genre me répugnent et me sortent par les yeux. Une femme est libre de ses actes et n'est pas comme une chienne nichée dans sa maison entrain de faire du ménage et d'élever seule ses enfants. Le pire c'est que ce gars a tellement d'argent qu'il est presque impossible de le poursuivre en justice. La seule solution est qu'Ally s'enfuit loin de ce pays. Mais elle ne le fera jamais.

Nous entrons à l'intérieur ou plusieurs personnes sont présentes. Le bruit persistant des gens qui parlent forts m'insupporte. Je grimace. Tout le monde nous regarde surpris et avec un air curieux et désireux. Ils commencent à siffler et nous applaudissent. J'ai l'impression d'être une star. Je garde mon côté sérieux. J'ai presque oublié la possibilité que Camila soit là. Je commence à avoir peur. Même sans la voir, elle me perturbe.

Madison a l'air d'aimer le fait d'être reconnu. J'ai envie de partir. Je me sens oppressée. J'observe autour de moi, essayant de l'apercevoir. Je ne la vois pas. Je suis contrariée. Je lâche la main de Madison et m'en vais vers la terrasse pour souffler un bon coup. Je passe entre les personnes. Je n'écoute pas ce qu'ils disent et sors. Je referme la baie vitrée derrière moi. Je me tourne vers la vue sublimissime. Le soleil n'est pas encore couché et le ciel a une teinte orange. Je respire l'air frais et je sens le vent me caressait le visage. Je m'assois au bord des planches en bois. C'est bon d'être enfin seule. J'attrape une cigarette dans un paquet et l'allume à l'aide d'un briquet. J'aspire la fumée et la recrache. Je peux entendre le son étouffé du brouhaha à l'intérieur et les oiseaux encore debout à cette heure. Je ne peux m'empêcher de verser des larmes silencieuses sur mes joues. Je ne suis pas épanouie. Les gens envient ma vie mais ils ne savent pas à quel point je suis triste. Je montre quelque chose d'autre de moi au public mais l'inverse est tout autre au fond de mon coeur. La seule chose qui me retient de ne pas mettre fin à mes jours est la peine que pourrait ressentir mes proches.

- Lauren ? Appelle une voix que je reconnaîtrais entre mille.

Je reste scotchée. N'osant pas bouger. N'ai-je pas rêvé ? Est ce mon esprit qui me joue des tours ?

Je tourne lentement la tête derrière moi et Camila est là, devant moi. Ce n'est pas une hallucination. Je pense qu'elle a vu mes larmes mais ça n'a pas d'importance. Je la vois enfin. Après tant d'années. Elle n'a pas changé. Tous les traits de son visage n'ont pas bougé. Un sourire apparaît sur ses lèvres. Elle s'approche de moi et se pose à mes côtés. Elle est timide. Elle soutient mon regard persistant sur elle. Mon souffle s'était arrêté mais reprit de plus belle. J'ai l'impression de renaître. Sa présence est trop importante et je remarque à présent que son absence a été vraiment périlleux. C'est comme une partie de mon coeur qui est posée à ma droite. Je me sens tellement soulagée et bien de la voir.

Je n'ose rien dire et c'est peut-être mieux comme ça. Je me tourne un peu plus vers elle. Nos yeux se contemplent mutuellement. Elle entreprend un geste qui est de me prendre dans ses bras. Elle entoure ses bras autour de ma nuque. Elle éclate en sanglots dans mon cou. Je la sers de toutes mes forces contre moi. Elle m'avait tellement manqué. Comment j'ai pu faire pour vivre sans elle ? Je n'aime pas l'entendre pleurer. Ça me déchire de l'intérieur. J'ai envie de ne plus la lâcher.

C'est comme un déclic qui surgit. Je vais changer de vie. Pour la rendre meilleure.

Another LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant