Chapitre 4

454 53 3
                                    


16 août 1993

Cher Journal,

Aujourd'hui, la douleur semble être moins vive. Seulement, je me demande si ce n'est pas mon esprit qui me joue des tours à cause de cette nouvelle voisine. Elle semble gentille, et c'est bien la première fois que quelqu'un m'offre quelque chose. Les gâteaux de sa mère étaient délicieux, même si je n'ai pas pu en manger beaucoup.

Leur présence ne changera bien sûr absolument rien au fait que je veux que ma fin arrive le plus vite possible. Je pense même à finalement y mettre un terme de moi-même. Il est vrai que l'éducation que maman et papa m'ont inculqué, punissait fortement le suicide, mais maintenant qu'ils ne sont plus là, qu'ils m'ont abandonné, seule dans ce monde, n'ai-je pas le droit d'avoir une fin de vie digne ? Je ne peux qu'être enfermée dans cette maison, supporter ma douleur, et attendre en souffrant. N'est-ce pas un peu trop cruel ?

De toute façon, je ne dois pas me faire d'illusion, cette fille comprendra que je suis un monstre aux yeux de toute personne normale, le jour où elle me verra réellement. Les cicatrices sur mes mains, mon visage, mes crises qui peuvent durer plusieurs semaines, les hallucinations que la douleur peut parfois me créer, feraient peur à n'importe qui. Elle n'est pas différente des autres, elle comprendra pourquoi je ne peux pas, et ne veux pas, me défendre contre toutes les rumeurs courant à mon sujet. Tous ont raison, je ne suis qu'un monstre, bien pathétique face au nom qu'ils emploient parfois. Le « vampire », qu'est-ce que j'aimerais en être un, un vrai, pouvoir être charismatique comme le Comte Dracula, mais je ne suis qu'une moins que rien. Toujours aussi faible, je me hais.


Joohyun soupira en refermant son journal d'un geste brusque, elle n'était qu'encore plus navrante que d'habitude. Certes, quelqu'un lui accordait un peu d'attention, ce qui la troublait fortement, mais elle n'était qu'un monstre. Elle-même, lorsqu'elle se regardait dans un miroir, même à la faible lueur d'une bougie, ne voyait qu'une créature immonde.

Elle se leva mollement de sa chaise, et traîna jusqu'à l'étage où elle se laissa tomber sur son lit. Elle regarda le plafond, où d'énormes étoiles phosphorescentes étaient collées. Leur présence était presque imperceptible, tant la lumière ne les atteignait jamais.

Joohyun avait des soucis avec son sommeil, un des nombreux symptômes de sa lourde maladie. Allongée, elle soupira, épuisée et en même temps complètement éveillée. Elle n'allait pas pouvoir fermer l'œil, elle le savait parfaitement. Son rythme de vie était saccadé, jour ou nuit, il n'y avait plus aucune différence pour elle.

Sa photosensibilité était néanmoins bien trop forte pour qu'elle puisse sortir de plein jour. La moindre exposition lui brûlait violemment la peau qui se couvrait alors de lourdes lésions. Ses cloques mettaient des jours à se résorber, et les marques rouges, ainsi que les cicatrices tâchaient son épiderme, parfois à tout jamais. Certaines s'étaient atténuées avec le temps, mais d'autres l'avaient blessé bien trop profondément.

La jeune femme n'arrivait pas à se sortir de la tête l'adolescente qui était venue pour la seconde fois devant chez elle. Elle avait eu -pour la première fois de sa vie- envie d'ouvrir sa porte. Elle ne savait pas pourquoi, mais sur le coup, sa main avait été prise de lourdes démangeaisons. Pourtant, maintenant qu'elle y pensait, il n'y avait aucune chance qu'elle laisse quiconque entrer dans sa demeure.

Joohyun vivait dans la poussière, en plus de l'obscurité et l'insalubrité. Sa maison mourrait de l'intérieur, tout comme sa propriétaire. La jeune femme était quand même toujours propre sur elle, ses habits lavés propre passaient directement dans son sèche-linge, pour ensuite être rangé dans sa penderie. Il n'empêchait que ses draps propres, étendus au soleil toute la journée, lui manquait énormément depuis la mort de ses parents. Regarder sa mère depuis la fenêtre de sa chambre encore plus.

Sunburn [Seulrene] - Red velvetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant