Prologue

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Le silence qui régnait dans la pièce quelques heures plus tôt semble lointain.
Il a depuis longtemps laissé sa place à la tension et le stress.
Les lumières froides de la pièce blanche ne rendent pas celle ci plus accueillante.
Mais personne ne peut s'en préoccuper à cet instant.

Concentré sur les cris, les grognements et la fureur de la jeune femme attachée devant eux, les quelques femmes lupus en tenue blanche se précipite de part et d'autres.
Les sangles de cuir ne serviraient pas à grand chose si je n'étais pas là pour d'oser l'anesthésiant.

Censé endormir les Hommes, celui-ci que je dose et surveille petit à petit ne fait que ralentir l'organisme de la jeune Crinos qui se débat.
Si j'avais été formé pour assister ce genre d'épreuves, jamais je n'aurais pensé un jour être appelé pour mettre à l'oeuvre mes maigres connaissances.
La Bêta devant moi reprend son souffle et s'approche entre les jambes couvertes de la Crinos.
La sage femme lupine essaye autant qu'elle peut de se concentrer sur le bébé qui vient au monde petit à petit mais son regard se reporte à plusieurs reprises sur les griffes meurtrières et les crocs bien sortis de la mère.

La douleur de l'accouchement et les émotions vivent de la Crinos provoquent une transformation.
Transformation maintenue partielle uniquement par le produit que j'injecte à plusieurs reprises par intraveineuse.
1 minute et 43 secondes. Le temps qu'il faut pour que le sang de la Crinos ne se débarasse pleinement de l'anesthésiant.

Les crocs sortis, les iris dorés, les grognements sourds et menaçants, ce regard de haine et d'agressivité. Voilà ce qui nous était servis.
La jeune Crinos, maintenu par de simples lanières de cuir, aurait tout détruit autour d'elle à commencer par son enfant si son organisme n'était pas furieusement ralenti.

Elle se débat et perd conscience humaine au fur et à mesure que les choses avance.
Mais la petite part humaine qui se bat pour son enfant reste là, quelque part. Infime et minuscule. Probablement autant assourdi que nous par les grognements qui sortent de son être.
Le Crinos en elle veut taire la douleur et n'obéit qu'à la colère.
Autant dire que les sangles qui la maintiennent n'arrangent pas les choses et ne rendent la louve géante que plus agressive.

Elle veut notre peau.
Mais nous devons resté concentré et calme.

Surveillant la dose qui circule jusqu'à ses veines, je n'entends pas de suite les pleurs dans la pièce.
Le bébé pleure.
Le bébé est sorti.
Ça y est.

Ne diminuant pas de suite la dose, j'observe la Crinos encore en semi-transformation.
La douleur quitte son corps mais les émotions sont encore là.
Pour la détacher nous devant attendre que la colère se taise et que le Crinos en elle reparte dans cette poche spirituel si lointaine.
Mon loup intérieur est soulagé, comme je le suis.

Qu'il est bon d'être lupus...

La dure réalité, je la connais. La pauvre Crinos à ce moment, pas encore.
Le bébé dont l'odeur nous parvient enfin, est humain.
La jeune Crinos avait eu une relation avec un humain. Elle était arrivé ici presque à terme, elle nous parlait de son appartement plus grand, prêt à accueillir son petit.

Mais son petit est humain. Dans quelques minutes, lorsque celui-ci sera lavé et habillé, des envoyés du dôme lupin viendront lui retirer.
Malgré les efforts déployés par Alarik Persan ces quelques années, le monde lupin ne semblait pas encore prêt à ouvrir les yeux sur la condition des enfants d'Hykaïn.
Ostracisés, seuls, scrutés comme les bêtes sauvages qu'ils sont.
Les stéréotypes et les injustices ont de beaux jours devant eux.

Ignorant ce pincement au coeur, je baisse enfin la dose et observe la jeune Crinos reprendre son humanité.
Ses iris reprennent un vert pâle, peu intense et les blessures de sa bouche se soigne, les crocs ayant disparus.
Épuisée autant physiquement que mentalement, elle ne semble pas souligner de suite la présence de l'envoyé du dôme qui se saisit de son fils.

Préparant la seringue de Kétamine, je me positionne derrière elle.
Je sais au fond de moi, que sa colère sera justifiée.
Je sais au fond de moi que son coeur se brisera.
Je sais que je ne suis pas le gentil de l'histoire.

Mais les Crinos sont trop instable.
Je me rassure en imaginant ce petit humain déchiqueté par sa mère qui perd un jour le contrôle d'elle même.
Je me rassure et me dis que nous faisons le bon choix.

Lorsqu'elle voit son fils disparaître dans ce couloir, les portes se refermer devant elle, elle comprend.
Elle comprend qu'encore une fois, les lupus choisissent, les Crinos n'ont pas le choix.
Elle comprend qu'elle est un monstre pour ce monde garou auquel elle est censée appartenir.
Elle comprend que son enfant lui est retiré.
Elle sent son odeur d'humain. Elle sent celle-ci s'éloigner, ne pas revenir.
Son enfant, son petit garçon.

Alors ses iris dorés reviennent, ses grognements sourds aussi.
Ses os craquent, se transforment.
Ses griffes et ses crocs se préparent.
Et la seringue transperce sa peau.

Elle se réveillera chez elle.
Se transformera de chagrin et de douleur peut être.
Et moi je rentrerai dans ma meute.
Je prendrais mes enfants dans mes bras.
J'irai en forêt avec eux peut être. En ne faisant qu'un avec mon loup intérieur.

L'Esprit me l'a permis.
Les enfants d'Hykaïn, eux, continueront d'être les monstres sanguinaires.

Couvrant la jeune femme d'un plaid, j'essuye une larme sur ma joue.

Ce soir j'irai au dôme lupin.
Ce soir je signerai la petition d'Alarik Persan. Ce soir je signerai le dossier Crinos.
Ce soir j'essaierai à ma petite échelle de petit alpha de changer les choses.

Mother Où les histoires vivent. Découvrez maintenant