Je te veux

Une rencontre inattendue

Et me voilà, encore dans le même bar, toujours à la même place, avec le même café à la main, noir et sans sucre. Et toujours aussi seule...

L'éclairage est tamisé, les murs sont envahit de tableau, mais un en particulier me fais toujours le même effet. Une femme à la crinière brune, la peau hâlée et aux yeux bleu océan, habillée d'un simple manteau de soie blanc se tient assise au milieu d'une forêt de pins, le regard plongé dans le vide.

Je ne sais pas pourquoi, mais cette peinture me fait vibrer de l'intérieur chaque fois que mes yeux gris se posent dessus; comme si mon âme et mon corps étaient transportés dans l'oeuvre à ses côtés.

Je finis de boire mon café tiède, remballe les quelques curriculum vitae posés négligemment sur la petite table de fer, et récupère mon ordinateur portable. Je me précipite hors du bar pour retourner au bureau.

Je suis en retard mais cela ne m'inquiète pas trop. Après tout, je suis la PDG d'une grande entreprise de maroquinerie, donc pas de panique. En entrant dans l'immense hall aux murs blancs et au sol fait de marbre gris, mes talons claquent et quelques regards se dirigent dans ma direction.

-Mademoiselle De Lacroix! S'exclama une voix féminine derrière moi.

En me retournant, je reconnais Susy, mon assistante.

- Bonjour Susy, qu'y a-t-il? Demande-je.

- Votre rendez vous est arrivé depuis près d'une demie heure.

- Merci, j'y vais de suite. J'espère que vous lui avez proposé quelque chose à boire pour le faire patienter? Dis-je d'un ton un peu sévère, plus que je ne l'aurais voulu.

- Oui mademoiselle, bien sûre répliqua-t-elle aussitôt, la voix douce comme du velour, comme pour essayer de m'apaiser.

J'aime bien Susy, elle est une excellente assistante, mais ça en reste là.

Je me rend donc dans mon bureau et j'y rejoind le directeur d'un grand magasin de sac à main de luxe.

Deux longue heures plus tard, le voilà qui quitte enfin les lieux et je me retrouve une fois de plus, seule.

Je repense au tableau qui me fait tant d'effet.

Cette femme prostrée au beau milieu des bois, seule, tout comme moi. J'ai beau être une femme d'affaires bien placée et richissime, je suis seule. Pas d'amis avec qui m'amuser, à qui me confier, pas de petit copain avec qui partir en vacances, qui pourrait me faire l'amour et me réconforter, rien. Juste moi, mon travail et ce tableau qui m'obsède.

Je décide donc de manger à l'extérieur pour prendre l'air, me vider l'esprit me fera le plus grand bien.

Deux patés de maisons plus loin, je me retrouve devant un petit restaurant espagnol qui a ouvert récemment. La devanture donne tellement envie comme le tableau que j'y rentre sans perdre de temps.

À peine installée à table, tout au fond de la salle, une serveuse arrive et me tend la carte.

Je la remercie et elle se presse vers une autre table où se tiens un homme, seul lui aussi. Je regarde le menu et me décide finalement à prendre une salade verte et quelques tapas accompagnés d'un vin rouge espagnol. En faisant signe à la serveuse pressée que j'ai fini de choisir, je ne peux m'empêcher de regarder cet homme seul. Je ne l'ai pas remarqué au premier regard, mais il est vraiment très séduisant.

Mes yeux se figent un instant sur lui, je le vois qui griffonne je ne sais quoi sur ce qui me semble être du papier à dessin. Tandis que je le fixe toujours, la serveuse arrive avec ma commande très rapide le service ici puis s'efface. Sans que je ne m'en rende compte, l'homme a cessé son activité et me regarde à son tour. Honteuse de moi, je me détourne aussitôt et commence mon repas timidement sans lever les yeux de mon assiette. Concentrée pour ne pas le fixer de nouveau, je sent soudain une présence à mes côtés. En levant la tête, je le vois, devant moi, me regardant à son tour. Sans m'y attendre, il s'installe à ma table. Malgré mon fort caractère, et il en faut pour être arrivé où j'en suis à seulement vingt-cinq ans, je ne dis pas un mot, ébahis par sa beauté. Il m'adresse alors la parole.