Chapitre 2 - The weight of the world

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Nuit noire, aucune étoile dans le ciel. Mes doigts gelés arrachent fébrilement l’herbe sur laquelle je suis allongée. Mes yeux pleurent de froid, mes lèvres tremblent. J’ai payé les factures, j’ai fait en sorte d’avoir de l’eau chaude, de l’électricité. J’ai cuisiné, et j’ai essayé de soigner ma mère. J’ai fait de mon mieux, vraiment, sincèrement ; elle a anéanti tous mes efforts en refusant d’avaler ce que je lui donnais. Ça fait cinq jours que Klaus m’a donné les médicaments et la nourriture, cinq jours que les rapports avec ma mère se sont détériorés encore plus.

Alors je suis partie.

Toute seule, en pleine nuit.

J’ai lâché prise.

Je ne suis pas partie très loin, je suis à seulement deux kilomètres de chez moi, au milieu du jardin public. Ecrasée sur le sol comme un météore tombé là. Perdue et incapable de me redresser. Pourtant un jour je réussirai à me relever, j’en reste convaincue. Je partirai loin, je montrerai à ma mère qu’elle n’aura pas réussi à m’entraîner au fond du gouffre avec elle. Si mon père avait encore été en vie, tout ça ne se passerait pas de cette façon. Mais on ne change pas le passé, la vie se fait et on n’a rien à dire. Mon père est mort, et c’est comme ça, il faut accepter et se taire. Mon père est mort. A cause de Klaus.

On en revient toujours à cette conclusion : Klaus est à l’origine du chaos dans lequel j’échoue.

Et paradoxalement, je le sais être le seul en mesure de me sauver. 

Doucement je me lève et quitte le parc, laissant mes pas me guider au bord du fleuve dans lequel se reflètent les lumières de la ville. Avec un sourire amer, je regarde les touristes s’émerveiller de la magie de cette ville, perchés sur le haut de leurs péniches. Oui, cette ville est magnifique, mais dans mes yeux elle n’a plus rien de beau. Elle m’a asphyxiée de sa beauté, étranglée avec les rêves qu’elle inspire ; aujourd’hui je n’arrive plus à y croire.

*

Je me réveille en sursaut, sentant mes poumons manquer cruellement d’oxygène, comme si j’étais depuis longtemps dans une sorte d’apnée. Les images se remettent lentement en place dans ma tête : cette nuit, morte de froid, je suis rentrée chez moi et me suis allongée sur le lit sans prêter attention à ma mère qui jetait les médicaments dans les toilettes. Qu’il soit trois heures de l’après-midi ou trois heures du matin, elle fait toujours des choses bizarres de toute façon.

Mes yeux s’ouvrent un peu plus et l’image devient un peu plus nette face à moi, bien que légèrement floue. Je vois ma mère, assise sur sa chaise, les bras ballants dans le vide, les poignets ouverts, ruisselants de sang. Je vois l’énorme flaque rouge qui se forme sous elle et son visage basculé sur le côté. Mon attention est cependant attirée par une seule et unique chose : le gros bout de coton posé près de mon oreiller et l’odeur immonde qui s’en dégage. Je suis sûre que c’est du chloroforme ou un dérivé du même genre, et que je suis tout aussi sûre qu’elle me l’a appuyé sur le nez pendant que le dormais. Ses paupières frétillent, moi je reste immobile, figée. S’ouvrir les poignets, elle l’a déjà fait plusieurs fois, je l’ai toujours sauvée. Mais utiliser un gaz contre moi, pour m’anesthésier ou du moins s’assurer de mon sommeil, c’est la première fois.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 15, 2015 ⏰

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