• On ne se comprendra jamais •

• Chapitre 12 •

Dire qu'il s'en voulait n'était pas vraiment le bon mot. Il ne s'en voulait pas à proprement parler mais il y avait largement l'idée.

Depuis que Hendery lui avait parlé, il n'arrivait pas à se sortir les horreurs qu'il avait pu faire de la tête. Il ne voulait pas le reconnaître, oui c'est vrai, mais il se sentait largement coupable à présent, bien plus qu'il ne l'avait jamais été de toute sa vie.

La fête battait son plein, le rite commençait tout juste alors que les vampires qui allaient y prendre part s'alignaient sur le côté, sous l'œil directif de Sinclair qui voulaient que tout se passe dans les règles.

L'expression peinée qui se peignait sur le visage de sa fille l'interpella. Il ne l'avait pas vu se lever mais elle n'était plus à table avec les autres, Éria s'était écarté et observait la scène. Les éclats de douleur qui transperçaient ses pupilles atteignirent directement l'homme en plein cœur et les phrases que Hendery avaient prononcé la veille lui revinrent directement en tête, comme un peu trop souvent maintenant.

Le vampire avait soigneusement choisi ses mots pour le toucher, il l'avait cerné bien mieux que quiconque n'avait jamais su le faire au cours de sa vie.

Le sorcier décida, sous sa propre pression, de s'approcher d'elle et il ne fit que s'appuyer sur le mur à ses côtés, laissant tout de même un espace entre eux.

Toutefois, en voyant que la jeune fille laissait le silence s'installer, faisant presque semblant qu'il ne s'était jamais déplacé, il se décida à prendre les devants.

- Pourquoi tu fais cette tête ?

Éria tourna des yeux ahuris vers son père, extrêmement surprise qu'il lui demande presque comment elle allait. Elle ne s'y attendait pas le moins du monde et ne voulait pas croire à cette progression. Seulement, la réalité la rattrapa bien plus qu'elle ne l'aurait voulu et elle leva les yeux au ciel, laissant encore quelques minutes passer, la brise caresser sa peau, avant de répondre.

- Lorsque la marque est apposée, elle procure à son porteur, devenu mature par l'âge, des pouvoirs plus puissants et une plus grande résistance à la lumière, souffla la jeune fille.

Severus n'avait effectivement pas lu les livres que lui avait donné Hendery mais l'explication de sa fille lui paraissait logique.

- Seulement, continua-t-elle, une tristesse palpable habillant sa voix. Seulement, elle ne peut être qu'apposé par un des parents du vampire. Il faut bien évidemment que le parent en question soit vampire lui aussi, sinon ça ne peut fonctionner.

La voix d'Éria était tellement faible qu'il avait dû se rapprocher pour entendre la fin de sa phrase. Il n'arrivait pas à comprendre pourquoi sa fille prenait un air aussi triste en parlant de ça alors qu'elle devrait juste être impatiente de ce moment.

- Je ne vois pas pourquoi ta mère refuserait de le faire. Elle sera sûrement très fière de voir son petit vampire chéri recevoir sa marque, ironisa le sorcier.

- Peut-être parce qu'elle n'est plus de ce monde ?

Severus perçut distinctement les mots de la jeune fille mais ils mirent un certain moment avant de créer un sens dans son esprit.

Alors, Aldaria était morte...

Il sentit subitement toute vie le quitter, remplacé par un froid et un vide immense qui peinait à le combler. Il n'arrivait pas à trouver un sens à ce que venait de lui dire sa fille.

Ce n'était pas possible que sa mère soit morte, pas en étant un vampire.

Il avait autant haï qu'aimé cette femme au cours de sa vie. Il avait passé des années merveilleuses à ses côtés, les plus belles qu'il n'avait jamais eu, puis il y avait eu sa fille qui avait été une de ses fiertés les plus grandes et ensuite ça avait été une dégénérescence longue et éreintante. Il avait appris que celle qui était sa femme était un vampire, qu'elle lui avait délibérément menti et que sa fille allait forcément suivre le même chemin.

Après avoir eu cette information, il avait fui. Il s'était échappé de l'enfer qui voulait se refermer autour de lui.

Maintenant il pouvait se l'avouer, il avait eu peur.

Cette peur lui avait fait faire cette chose insensée, l'avait empêché de retourner voir l'être qu'il avait aimé, sa propre fille.

Il s'en était voulu pendant ce qu'il lui semblait être des siècles, il avait eu des remords, bien trop pour un seul homme mais Severus Rogue restant Severus Rogue, tout ce qui le composait en fierté et en rancœur lui avait fait assumer aussi peu qu'il le pouvait sa décision.

Il avait essayé par tous les moyens d'effacer ses souvenirs mais ils restaient ancrés en lui comme le tatouage à son bras.

Bien qu'il détestait la mère d'Éria plus que n'importe qui d'autre sur terre, il aurait aimé que quelqu'un le prévienne de sa mort. Il ne sait pas si cela aurait changé quoi que ce soit à la situation actuelle, il ne sait pas s'il aurait réagi autrement avec sa fille, probablement pas d'ailleurs.

Dumbledore était le seul au courant par ailleurs, et était aussi celui qui lui avait reproché le plus ses actions. Au départ, il avait accepté ces blâmes mais quand il s'était rendu compte de ce que le vieux sorcier avait voulu imposer à Harry, il s'était en quelques sortes vengé et avait rendu mot pour mot ce qu'il lui avait dit.

- Normalement il y a des solutions pour ce genre de problème... Avant leurs morts, les parents d'origine vampire laisse généralement un fragment de leurs pouvoirs pour que le rite puisse tout de même avoir lieu même sans leur présence, expliqua froidement sa fille. Mais maman ne l'a pas fait.

Le regard noir que lui jeta Éria lui glaça le sang jusqu'au plus profond de son âme.

- Enfin, elle n'a pas pu, et c'est en parti de ta faute.

Severus reçu son deuxième choc de la soirée et avant même qu'il n'ait pu analyser ce qu'on venait de lui dire, la jeune fille avait déjà quitté les lieux.