CHAPITRE UN

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Deux-cent-cinquante ans plus tard...

La lumière de la taverne était tamisée, presque inexistante. Les recoins donnaient l'air d'abysses, le centre de la pièce vacillait sous les flammes de quelques bougies. Intimiste ou dangereux, les amours interdits se tapissaient dans des baisers langoureux. Les crimes parfaits se révélaient seulement à l'odeur de sang, ou au petit matin quand le soleil filtrait à travers les étroites fenêtres. La crasse et les effluves florales se mêlaient atrocement, dissonaient, à l'image de cette Terre et des vies qu'elle portait.

Les gens brayaient, bras dessus-bras dessous, comme des amis. Des amis qui se poignarderaient bientôt dans le dos. L'alcool emplissaient les verres qui s'entre-choquaient sans cesse. Le sol en parquet collait, ou glissait de boissons sucrées ou amer, de celles qui vous brûlaient la gorge et enflammaient vos poumons.

Une des nombreuses silhouettes encapuchonnées se faufila entre les corps mouvants. Des Faes pour la plupart, quelques elfes. Ces deux espèces cohabitaient à l'amiable même si toutes deux possédaient leurs propres territoires. Des amis de longues dates que les humains ont longtemps confondu. Le temps qu'ils leur avaient été accordés, du moins.

Malgré l'énergie sombre de la taverne, la silhouette se fit dévisager le long de sa traversée jusqu'au bar. Sa longue cape dissimulait son identité bien plus encore que l'obscurité établie dans le bâtiment. On ne pouvait déterminé son sexe, encore moins son espèce ou son statut. Ses pas mesurées et confiants claquaient sur le sol alors que tout indiquait qu'elle n'était pas la bienvenue. Ni dans cette taverne, ni dans ce Royaume.

Elle poussa d'un coup de bras le fae alcoolisé qui squattait la place face au barman. Il avait bien assez bu comme ça, c'était à son tour de boire maintenant. Le trajet pour venir dans ce foutu royaume d'Assyla l'avait épuisé. Ses avants-bras encerclé de métal et de pierres d'obsidiennes frappèrent le bois, captèrent l'attention de l'elfe en service.

-Un verre de votre sang le plus frais. Du sang animal, tonna la silhouette d'une voix suave.

Ensorcelante, diraient certains.

La créature en face d'elle cilla à peine, habitué au traitement du genre bourrin.

-Le sang n'est pas sur la carte. Allez directement le chercher sur les rats qui forniquent au fond de nos caves. Cadeaux de la maison, formula le barman, fastidieux.

Il choppa un torchon sur le comptoir et essuya des verres propres comme si sa nouvelle cliente ne valait pas mieux qu'un insecte. Les quelques hommes autour du bar ricanèrent en se tenant la bedaine. Les faes et les elfes étaient les créatures les plus hypocrites qu'il puisse exister, les plus malingres et les plus malhonnêtes. Ils donnaient des leçons de morale à qui voulait l'entendre sur la manière de traiter les différentes espèces -les humains surtout- mais discriminaient les premiers à être différents d'eux. Du moins le jugeait ainsi la femme accoudée au bar.

Elle ne s'attarda pas longtemps sur les moqueries -il y avait pires humiliations- et agrippa le tissu noir-velours de sa capuche. Elle l'abaissa. Sa peau semblable à de la pierre de lune scintilla, ses cheveux de neige s'échappèrent, son grand nez pointu fendit à travers le peu de lumière, et ses yeux entièrement noyés de noirs étincelèrent. Il n'y avait pas de place pour la pureté et le blanc chaste, tout était couleur charbon. La sclérotique, l'iris ou encore la pupille ne se démarquaient pas.

Le monde se tua. Elle perçu seulement leurs respirations alcoolisées et les griffes des rats contre le sol.

Bihāna Presor. L'Aube de la maison Presor. La Catin d'Ecclésiaste. Le Monstre. Les rumeurs sur sa personne s'éclaboussaient de meurtres sanglants, de tortures délicieusement bruyantes, et de luxures inavouables. Elle avait tué, massacré, enrôlé, volé, ou vendu tous ses ennemis -y compris leurs proches. Et on disait que plus la liste devenait longue, plus les vengeances se faisaient stratèges et horrifiantes.

BRIHM, La Colère Des Dieux Où les histoires vivent. Découvrez maintenant