F.U.T.U.R.E

La Caste Des Rouges

-Debout, 4587 ! tonna une voix.

Sarah ne répondit pas : si elle avait appris une chose ici, c’était qu’il valait mieux ne pas répondre.

Comme chaque matin depuis bientôt un mois, elle ouvrit les yeux sur son plafond désespérément blanc. Elle se releva rapidement et enfila son uniforme rouge sang, glissant un rapide regard noir à la caméra. Elle attendit huit heures pile avec une certaine forme d’appréhension. Il fallait l’avouer, les premiers jours avaient été durs. Elle avait du mal à se défaire du regard des autres. Elle avait toujours été une fille solitaire mais néanmoins attentive à ce qu’on pensait d’elle.

Tandis qu’elle chaussait ses grosses bottines noires, les portes s’ouvrirent.

Elle avait à présent une heure cinq de pause. C’était précis, trop précis. Ici, tout était chronométré, si chronométré que c’en était aliénant. Les journées défilaient lentement, trop souvent identiques.

Elle se dirigea vers la cantine, et entendit comme toujours quelques murmures sur son passage. Les autres prisonniers ne lui étaient pas hostiles mais ils évitaient de se retrouver près d’elle. Il faut dire que beaucoup de rumeur couraient sur elle. Elle n’en avait toujours pas compris le fondement. Ici, malgré de nombreuses injustices, ils étaient tous considérés comme des criminels. L’état avait même classifié ces détenus dans des castes, portant le nom de couleur.

La majorité des détenus étaient des jaunes. La plupart n’étaient même pas des délinquants. Pour eux, il avait été question d’une simple différence, qu’elle soit physique, mentale ou sexuelle.

Après il y avait les orange, ils étaient moins nombreux mais restaient tout de même un certain nombre.

Ils avaient commis de petits délits : vol, menace, trahison, … mais cela n’allait jamais au-dessus de deux ou trois meurtres. Quant à elle, elle avait été inculpée pour homicides multiples et prémédités, trahisons envers la nation, vols à main armée, … la liste était longue. Elle comprenait aisément pourquoi ils avaient créé une nouvelle caste.

Elle sortit de ses pensées en sentant ses bracelets s’entrechoquer. Évidemment, elle était la seule détenue entravée. C’était un traitement spécial rouge après tout. L’adolescente mangeait un repas habituellement sans saveur avant de prendre la direction de la cour. Le sport était la seule activité possible dans cette prison. Mais une sonnerie vint interrompre ses plans, la sonnerie de confinement.

-Tous les détenus doivent regagner leurs cellules ! Tous les détenus doivent regagner leurs cellules ! scandèrent les hauts parleurs.

Elle eut un petit sourire en coin.

Enfin ! pensa-t-elle.

Si les bagarres entre prisonniers étaient interdites, elle ne se privait pas de titiller les gardiens. Habituée à se battre, c’en était presque devenu une drogue. Si ça ne l’était pas encore, c’était déjà un exutoire.

Alors elle s’adossa à un mur. Elle n’eut pas à attendre longtemps avant d’entendre des pas résonner dans son dos. Elle se décolla de son appui avec nonchalance et elle avança vers le centre du couloir. Son attitude était presque féline.

-4587…, soupira un des gardiens, maintenant habitué à ses petits jeux.

Elle fit face à ses geôliers. Relevant le menton, elle les défiait du regard.

- Un problème ?

Les quatre soldats poussèrent un soupir avant de lui foncer dessus. L’affrontement fut bref mais brutal. L’adolescente était clairement désavantagée. Elle tituba avant de s’écrouler au sol, convulsant à cause de l’électricité dans son corps. Malgré le goût métallique du sang dans sa bouche, elle perdit connaissance le sourire aux lèvres.

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