Chapitre 2 - Des débuts difficiles

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Le réveil sonne. C'est l'heure. Je t'ai une nouvelle fois vue dans mes rêves, on partait se balader et d'un coup tout devenais noir autour de moi et tu tombais dans un fossé infini, et j'avais beau tirer le plus fort possible pour te sortir de là mais en vain. Je me sentais totalement impuissant face à ce spectacle. Tes grands yeux verts me fixaient et se remplissaient de larmes puis tu finissais par sourire et lâcher ma main. Ce foutu réveil m'a encore une fois éloigné de toi. Je me lève avec difficulté, mes yeux ne s'habituent pas à l'obscurité. Heureusement que j'avais rangé ma chambre, je risque pas de me blesser ni faire de bruit en avançant à tâtons dans le noir. J'atteins enfin ma porte. J'appuie sur l'interrupteur et je me dirige vers ma pile de vêtements que j'avais préparé sur mon bureau. J'attrape mon sac et j'ouvre ma porte, silence. Ni mes parents (qui font chambre séparée), ni ma sœur ne sont réveillés. Je descends les escaliers en silence même si ces derniers font un bruit monstrueux dès que je pose mon pied sur une marche. Je me dirige dans la cuisine, allume les lumières, bois d'une traite un verre de jus d'orange et je prend à manger pour la route. Pas grand-chose mais ça fera l'affaire.

En route vers le bus maintenant. Pas ma partie préférée, comme beaucoup de monde à l'arrêt à ce que je vois. Il y a pas mal de jeunes et c'est bruyant malgré l'heure précoce. Il fait encore sombre et la rue n'est éclairée que par les lampadaires. La route est longue jusqu'à mon arrêt de bus donc je dois partir tôt. Vivre à la campagne ça n'a pas que des avantages. L'attente et longue mais il ne fait pas froid c'est déjà ça. Le jour commence enfin à se lever quand j'aperçois le bus. Je monte dedans, m'installe et mets mes écouteurs. Rien de mieux que du bon vieux rock pour se réveiller ! Par chance aujourd'hui personne ne se met à côté de moi et j'arrive au lycée sans être dérangé.

Je me dirige dans l'immense hall d'accueil où se présente devant moi quatre immenses panneaux. J'éteins ma musique pour entendre ce qu'il se passe autour de moi même si je n'enlève pas mes écouteurs. Sur les panneaux de gauche je peux voir les noms des différents professeurs et de l'équipe pédagogique du lycée mais ce n'est pas ce qui m'intéresse. Tout à droite j'aperçois écrit en gros « TERMINALES », je me dirige vers cette feuille et commence à chercher mon nom. Quand je l'ai enfin trouvé, je réalise que je ne reconnais presque aucun nom de mes anciennes classes, ça changera un peu. Je suis en terminale scientifique. Bon c'est pas trop mal au niveau des professeurs et à ce que je vois il y a quelques nouveaux comme chaque année, l'emploi du temps à l'air cool, pas trop chargé. On est lundi et il n'est que huit heures du matin. La journée risque d'être longue avec tout le bla bla des professeurs pour nous redire encore et toujours les mêmes choses que les années précédentes. Sauf que cette année tu ne sera pas avec moi. Je n'y avais pas pensé et c'est pour ça que je viens de me rendre compte que tout le monde me dévisage, certains chuchotent, d'autres cherchent dans leur téléphone de vieilles photos. On ne cachait pas notre relation fusionnelle au yeux des autres. Même s'il n'y avait rien de romantique entre nous. Les professeurs vont faire leur discours habituel lorsqu'un élève déménage ou est à l'hôpital ou que sais-je encore. Sauf que là ce n'est pas juste un séjour à l'hôpital, c'est un aller simple au cimetière. Je rallume ma musique et me dirige vers ma classe la tête baissée. Je n'ai pas envie que l'on me demande si je vais bien parce que la réponse sera non. Même si je dirai oui pour ne pas qu'on vienne m'embêter à longueur de journée, la vérité c'est que non je ne vais pas bien. Parce que tu n'es plus là et que ce lieu est chargé de souvenirs avec toi.

On dirait même que tu es avec moi aujourd'hui, d'ailleurs cette fille là-bas près de notre scolarité te ressemble, un peu trop d'ailleurs ... Mais pas le temps d'aller vérifier je dois aller en classe.

Mince plus de place seul. Il reste une place à côté d'un gars qui à l'air encore plus étrange que moi, ça promet. Bref je m'installe, il me regarde d'un air dédaigneux comme si je le dérangeait. Le prof entre dans la pièce avec son sac marron usé et son teint gris. Pourtant il a l'air assez jeune mais on dirait qu'il a déjà bien vécu. Il a les cheveux assez long et des lunettes assez classes pour un professeur de je ne sais trop quelle matière encore. Il nous regarde comme pour évaluer le déroulement de l'année. Il installe ses affaires sur son bureau sans un mot et enfin il commence à se présenter en gardant la tête légèrement baissée et le regard vide :

- Bonjour, je m'appelle Mr. Berrick, je serai votre professeur principal cette année donc si vous avez des problèmes en ce qui concerne le lycée c'est à moi qu'il faut s'adresser. Pour cette nouvelle année nous avons aussi décidé de mettre en place un psychologue qui sera disponible sur rendez-vous. Avant de vous énoncer les modalités d'enseignements de cette année, avez-vous des questions ?, il finit sa phrase en relevant enfin la tête vers nous.

- Est-ce que le psychologue a un rapport avec la fille qu'est morte cet été ?, annonce froidement sans aucun tremblement dans la voix le gars populaire de cette année.

Cette phrase me glace le sang. Je sens mon cœur s'arrêter et une rage immense s'emparer de moi. Pour ne pas aller l'encastrer dans le mur je serre mon poing tellement fort que je sens mes ongles rentrer dans ma main. Je baisse la tête malgré le fait que je sens le regard de mon voisin de table sur moi.

- Bien... nous avons décidé de cela pour le bien être des étudiants et notamment afin d'éviter les bagarres et le harcèlement, afin que tout le monde puisse parler à une personne neutre si les professeurs ne peuvent pas accomplir cette tâche.

- Oui mais quand même quoi 'fin j'veux dire elle est quand même morte, dit-il en pouffant de rire.

- Taisez-vous ! Cet accident est regrettable et nous sommes tous désolés qu'elle soit décédée aussi jeune et dans de telles conditions. Malheureusement nous ne pouvons qu'avancer face à cet incident tout en n'oubliant pas cette jeune femme.

Ils rigolent dans leur coin. Le populaire et sa bande, quels bouffons.

Elle s'appelait Lydie, pensais-je presque en marmonnant. Elle n'était pas n'importe qui. Elle avait un nom, une famille, des amis. Des gens qui l'aiment et qui ne veulent pas qu'elle sombre dans l'oubli comme ceux qui ont déménagés.

Je décide de me lever de ma chaise et de quitter la classe, je savais que cette journée allait être difficile mais je ne pensais pas avoir autant de mal. Ils n'ont aucun respect pour toi ! J'ai vraiment envie de tout quitter pour venir te rejoindre mais je sais que ce n'est pas ce que toi tu voulais. Je ne retournerai pas en classe ce matin.

Je repense à cette fille que j'avais vue dans le couloir en allant à ma classe mais je ne l'ai pas revue de la journée. On est tellement nombreux ça serait difficile de retrouver quelqu'un dans ce labyrinthe. D'ailleurs je ne connais même pas encore les autres coins du bâtiment. Je vais partir explorer et qui sait, je retomberait peut-être sur cette fille. 

A mes côtésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant