Help ! Je suis devenue populaire [Edité]

.2.

Dans la salle de cours, tout le monde me toise bizarrement depuis qu'on a fait l'appel. Je ne sais plus où me mettre, je m'inquiète même du fait que je suis peut-être trop voyante dans cette tenue.

Louisa a peut-être un peu abusé, non ?

La pause de dix heures arrive enfin. Le prof principal nous laisse sortir. Alors, je me lève sans trop savoir vers qui me tourner.

D'un côté, il y a les intellos dont je fais logiquement partie, de l'autre, les populaires, et il y a aussi les cas soc... Où est ma place maintenant ?

Je sors dans le couloir et j'attends. J'ai beau avoir changé d'apparence, je reste la même. Je ne sais pas trop me positionner par rapport aux autres. C'est finalement l'une de mes copines de l'an dernier qui vient me parler.

— Waouh, Lilou... Je t'ai à peine reconnue.

Gênée, je déclare :

— J'avais envie de changement.

Elle m'assure :

— C'est réussi.

Comme elle fait le premier pas, les autres suivent. Je me retrouve entourée de plein de nanas qui m'adressaient tout juste la parole l'an dernier. Je fais bonne figure, je ne me vante pas trop, mais je ne me rabaisse pas pour autant. J'essaie d'être constante. C'est là que Gabin débarque avec son groupe de copains. Il me parle sans prendre de gants :

— On se connaît ?

Étant donné qu'on était ensemble en seconde, je réponds :

— C'est Lilou, tu ne me reconnais pas ?

Il fait semblant de chercher parce qu'il n'a jamais fait attention à moi puis il s'écrie :

— Ah, ouais ! Lilou, tu as bien changé durant l'été...

Il me dévisage de la tête aux pieds puis il me fait la bise comme si on était amis depuis toujours. Je prends feu quand il se plante devant moi et qu'il me dit :

— Je kiffe ton look, ça te va super bien.

Je bredouille :

— Merci.

Un court silence s'installe parce que je ne sais pas comment rebondir. Il me souffle :

— Tu me redonnes ton pseudo TchatApp ? J'ai changé de compte durant l'été et j'ai perdu certains contacts.

Médusée, je le lui dicte aussitôt :

— Lilou000.

Il m'ajoute. Je reçois l'invitation en direct avec un message pour inaugurer la conversation :

[10 h 13 — J'aime vraiment trop ton style !]

Je manque de m'évanouir tellement le plan de Louisa marche à fond. Je réponds en essayant de garder mes neurones connectés :

[10 h 14 — Merci.]

Ma réponse est peut-être trop sage. Il me fait un clin d'œil avant de s'éloigner avec ses potes. Les filles autour de moi commencent à bavarder de ce qu'il vient de se passer.

— Tu as vu ça ?

— Gabin, en personne ! Tu as trop de la chance...

Je les écoute à moitié parce que je le suis du regard en étant ahurie qu'il soit venu m'adresser la parole et m'inviter sur TchatApp.

Waouh ! Merci, Louisa !

Nora, celle qui a fait le premier pas, me chuchote :

— Tu as marqué des points là.

Comme je n'en reviens toujours pas, je déclare :

— Pince-moi, je rêve.

Elle n'hésite pas à le faire. Je sursaute.

— Aïe !

Elle hausse les épaules.

— Tu vois, tu ne rêves pas !

Elle m'indique dans la foulée :

— Je crois qu'il faut que tu m'expliques ce qu'il t'est arrivé.

Je fronce les sourcils.

— Comment ça ?

Elle me désigne ma tenue.

— C'est quoi tout ça ? Tu ne portes plus tes lunettes ?

Comme elle fait partie des intellos, comme moi, je réponds :

— Ma demi-sœur s'est amusée avec moi.

Surprise puisque je n'ai contacté personne durant l'été, elle me demande :

— Tu as une demi-sœur depuis quand ?

Je lui apprends :

— Ma mère s'est remariée en juillet.

Nora déduit :

— Du coup, ça a fait un sacré changement dans ta vie.

Je lui assure :

— Tu es loin du compte...

Comme on a toujours un bon contact, je me dis que je ne vais pas changer de fréquentations parce que je m'habille différemment. Je me confie donc à elle :

— Mon beau-père est blindé. Tu verrais la villa qu'il loue, c'est un truc de dingue.

On se met à discuter de ça et cela me permet de me détendre un peu parce que je trouve une place qui n'est pas totalement inconfortable. Au fil de la conversation, d'autres filles viennent écouter. Alors, j'essaie de ne pas trop en dévoiler pour ne pas attirer la jalousie. Je me montre modeste parce que je n'oublie pas qu'il y a quelques mois, ces filles-là ne me calculaient pas.

C'est étrange. J'ai l'impression d'être sur une autre planète. Toute l'attention est sur moi. Pourtant, je fusionnais avec le mur en juin dernier. Les gens sont-ils si superficiels ?

Quand la sonnerie retentit, je reçois un nouveau message de Gabin :

[10 h 20 — On se parle plus tard ?]

Tout en regagnant ma place, je réponds en essayant de garder une pointe de mystère :

[10 h 21 — Pourquoi pas ?]

Je m'assieds à mon bureau. Nora prend ses affaires et me rejoint en commentant :

— Tu fais sensation, hein ?

Je fais semblant de ne pas l'avoir remarqué :

— Tu trouves ?

Elle lève les yeux au ciel.

— Comme si tu ne le savais pas ! Tu as troqué tes neurones contre du gloss ?

Sa franchise me fait glousser :

— Tellement pas !

Comme je pense avoir déniché la personne avec qui je vais pouvoir passer l'année, je me lâche un peu plus.

Bon ! J'ai le nouveau TchatApp de Gabin, il me trouve belle et il veut qu'on discute ensemble ! Je crois que ça a marché du tonnerre. Ouais, je crois que j'ai toutes mes chances cette fois !