Mes jambes me portaient toutes seules, vers toi. La lame était toujours collée à ton cou. J'arrive. Je touche la frontière maintenant. Mes mains cherchent une ouverture, une fissure. Ca y est. Je vais t'atteindre. J'arrive. D'abord un doigt, puis une main, un bras. Je traverse la paroi. Je suis de l'autre côté maintenant, de ton côté. Tu me vois, restes immobile. Je veux t'empêcher de faire l'irréparable. Alors je m'approche, mes pieds me guidant vers toi. Tu es ma source, je dois venir. Alors je viens. Je suis à deux pas désormais. Je me remémore. Comment en avons nous pu arriver à ces extrêmes ? Comment en sommes nous arrivés à cette situation ? Ne t'inquiètes pas j'arrive. Tu n'es plus l'étrangère, je te connais. Je le sais, et au fond mon cœur l'a toujours su.
Je suis là, je te prends la lame. La chasse de ta vision, de tes pensées à tout jamais. Tes jambes ne tiennent plus. Je te rattrape. A ce contact, nos peaux se redécouvrent. Je vois avec horreur, toutes les cicatrices qui te recouvrent. Je vois les traits, ce que tu as toi-même causés. Et j'en suis tellement désolée. Tellement désolée... Je te prends dans mes bras. Mes propres jambes ne tiennent plus. Je m'effondre à mon tour. Ta tête dans mon cou, je sens des perles salées sillonnaient tes joues. Et bientôt mes larmes s'y mêlent. Je fonds en sanglots. Mon corps est secoué de spasmes incontrôlables, le tien est étendu sur moi. Je sens les forces te quitter. Je veux que tu tiennes. Je ne veux pas t'abandonner. Mais c'est trop tard, je l'ai déjà fait. C'est à cause de moi. J'ai provoqué tout cela. Je t'étreins de toutes mes forces, je te berce et pleure sans retenue. Ton corps se renverse sur le côté et je te dépose avec délicatesse sur le sol. Je ne veux pas te quitter, alors je me penche vers toi. Mes larmes t'inondent. Ta mains se tend et se pose sur ma joue. Je retiens ton bras. Ta main caresse et essuie mes larmes. J'écarte les cheveux de ton visage. Et tes yeux rencontrent les miens. Soudain, tu fais quelque chose qui m'hypnotise. Tu souris. Tu es si belle. Je t'avais oublié. J'avais oublié ta joie. Ce bien-être qui m'envahit quand ta joie me submerge. Tes yeux s'illuminent. Mon cœur flanche, mes larmes redoublent. Et puis tout se calme. J'entends ta respiration, les battements de ton cœur. Je te cherchais, et je te trouve. Tu me regardes intensément, ta main a fait son travail, il n'y a plus de traces des rivières qui ont coulé sur mes joues. Ton sourire s'estompe. Et je sais ce qui va se passer. Je le redoute, le craint. Je te hais de disparaître. Et je me hais encore plus d'avoir engendré cela aveuglément, inconsciemment. Mais surtout, je t'aime. Trois mots que j'aurais dû te dire beaucoup plus tôt. Trois mots qui auraient tout changé. Trois mots dont j'aurais dû te couvrir. Mais voilà que tes yeux se ferment déjà, ton bras retombe. Une dernière larme scintille au coin de ton œil et te quitte. Mais là, c'est toi qui me quitte. Je veux te le dire avant que tu partes. Trois mots qui se coincent au fond de ma gorge. Ton sourire perdure, ton corps se métamorphose, devient cendres. Il n'y a aucune brise. Pourtant petit à petit, tu disparais et tes cendres s'envolent dans un majestueux tourbillon. D'abord tes pieds, puis tes jambes. Je te retiens. Je veux que tu restes. S'il te plaît... Je prends le haut de ton corps dans mes bras. Ton cœur s'arrête. J'ai entendu ton dernier battement d'ailes. Maintenant tu t'envoles. Ta tête contre la mienne, elle s'effrite à son tour. Tu me glisses entre les doigts, je ne t'aurais plus contre moi. Les mots se débloquent, au moment où tu n'es plus. C'est encore trop tard, mais j'espère que tu m'as entendu. Trois mots, que maintenant je prononce. Je t'aime.
Et c'est ainsi, que j'ai laissé échappé petit pantin. C'est ainsi que j'ai compris, tu n'as jamais été.
C'est ainsi que j'ai traversé le miroir...
VOUS LISEZ
L'inconnue
Short StoryDeux personnes, une salle, un regard. Les voilà dans une bulle, chacune, séparées. Elles sont étrangères mais si familières...