Chapitre 2 •17 Août, 09h27 - Lycée
PDV LenaLa vibration si rare de mon téléphone me perturbe alors que j'essaye de comprendre ce que tente vainement de nous expliquer mon prof de bio. Qui est l'idiot qui me texte alors que je suis en cours ? Je meurs d'envie de regarder qui c'est mais je veux pas me faire prendre, déjà que j'ai eu des remarques parce que je séchais les cours. Pendant que je gribouille distraitement dans mon cahier, je remarque que tout le monde, - je dis bien tout le monde - me regarde en coin, un sourire plaqué sur leur visage. Stop. Pas tout le monde. La seule qui se concentre sur le cours, en fille parfaite qu'elle est, c'est Alison Macbeth. Elle me voit la regarder et m'adresse un regard méprisant tout en mâchant son chewing-gum. Ses jambes tellement fines sont croisées et ses sourcils parfaitement épilés. Elle me fait un clin d'œil avec un sourire satisfait et se retourne. Depuis la rentrée, elle et moi jouons ce petit jeu, auquel j'y avais été forcé. Je ne comprends vraiment plus rien. Je dois tellement me retenir de sortir de la salle. Ça me tue de voir ces gens autour de moi, ces filles tellement sublimes qui me font tous les jours remarquer que je ne serai jamais aussi belle qu'elles. Une deuxième vibration me sort de mes idées noires. C'est une blague ou quoi ? Je n'ai pratiquement aucun contact. Une troisième et puis une quatrième vibration : il vibre toutes les deux secondes ! Je lève ma main, maudissant Alison. Je suis sûre que c'est encore elle :
- Oui Elena ?
- Je ... je peux aller ... aux toilettes s'il vous plaît madame ? Demandais-je hésitante.
Les fois où je prenais la parole volontairement en classe étaient si rares, que les mots avaient du mal à sortir de leur plein gré.
- Oui, bien sûr, vas-y.
Je hais qu'on prononce mon prénom complet. D'ailleurs, je hais ce lycée. Je hais ces filles parfaites. Mais par-dessus tout, je me hais moi-même.
En sortant de la salle de classe, je remarque ce petit sourire si familier, arrogant, de la fille la plus détestable et parfaite du monde : Alison. Ses cheveux bruns lui arrivent à la nuque. Elle les balaye d'un revers de main vers la gauche. Elle a des traits fins, et une bouche subliment dessiné qui lui donne un sérieux avantage. Je l'enviais tellement.
17 Août ,09h30 - Lycée
PDV LukeJ'ai comme un mauvais pressentiment. Depuis que Ash et Mike ont pris mon téléphone tout à l'heure, ils affichent un petit sourire fier. Un mouvement sur ma droite attire mon attention : Lena se trémousse l'air mal à l'aise sur sa chaise. Je fronce les sourcils. Elle avait vachement maigri depuis la rentrée en seconde. J'la trouvais déjà mince mais là... ses mains étaient toutes fines et son gros pull bordeaux flotte sur son maigre corps. Elle lève la tête vers Alison. Toutes les deux avaient l'air de se détester. Le prof lève les yeux vers moi comme s'il allait m'interroger. Et merde. J'ai rien suivi de ce qu'il a dit. Et puis d'un coup il pose son regard à ma droite. Lena. Ça doit être la première fois que j'entends sa voix depuis que je l'ai vue.
- Oui Elena ? Un problème ?
Elle s'appelle Elena alors ?
- Je... je peux aller ... aux toilettes s'il vous plaît ?
C'est pour ça qu'elle se trémoussait sur sa chaise ? Uniquement à cause d'une envie pressante ?
- Oui bien sûr vas-y.
Elle se lève, sans faire de bruit et se dirige vers la porte, la main plaquée sur sa poche de jean. Elle jette un dernier regard haineux à Alison qui le lui rend avec un sourire narquois et Lena referme la porte.
17 Août, 9h37 - Toilettes du lycée
PDV LenaEn entrant dans les toilettes, je m'arrête brusquement. En voyant sur le miroir, écrit au rouge à lèvres sans doute, l'écriture d'Alison, je comprends tout de suite pourquoi je reçois autant de messages.
"Prostituée à domicile : 0734921800"
Cette garce a mis mon numéro de téléphone dans les toilettes des filles ?! Mais ça n'a juste aucun sens ! Surtout avec cette inscription affreuse... Prise de dégoût, je vomis dans les toilettes les plus proches. Mon front est perlé de sueur, le manque de nourriture recommence à se faire sentir... Tremblante, je m'assois par terre, sans tenir compte de la saleté et je commence à vérifier mes messages :
De Inconnu, à 9h27 :
Hey alors c'est quoi ton nom ma jolie ? Ça te dirait 50€ pour samedi ?De Inconnu 2, à 9h28 :
Vas-y wesh donne-moi ton prix ******Tous les messages se succédaient comme ça... Mais il pouvait pas y avoir autant de filles qui avaient vu ça, et qui pouvaient envoyer ce genre de choses, si ? Prise de panique, je fonce dans les toilettes des mecs et, horreur : le même message, écrit sur chaque porte de cabines. Je m'effondre par terre en retenant mes hauts-le-cœur... Sans que je m'en rende compte, les larmes coulent sur mes joues...
17 Août, 9h50 - Lycée
PDV LukeÇa fait un moment que Lena est partie. Le prof doit se dire la même chose puisqu'il déclare :
- Heum, Luke tu veux bien aller voir où est passé Elena ? J'espère qu'elle ne sèche pas encore les cours !
Les joies d'être représentant d'élèves ! Dès qu'un élève est un peu solitaire et qu'il faut prendre de ses nouvelles, c'est moi qui m'en charge... Je hoche tout de même la tête en soupirant et je sors en faisant comme si je n'avais pas remarqué le clin d'œil d'Alison. C'est fou ce qu'elle me saoule depuis l'année dernière elle est persuadée que je suis son « âme sœur ». Ce sont ses propres mots. Je frappe aux toilettes des filles, en attendant une réponse... Rien. Pffff, il pouvait pas envoyer une fille ?
- Heu... Lena, je... rentre.
Personne, dans aucune cabine. Au moment où je sors, j'entends des pleurs un peu plus loin. Non elle n'est pas allée dans les toilettes... des mecs, quand même ?! J'ouvre la porte doucement et je la découvre, tremblante, dans un coin. Elle m'a vu. Elle ouvre grand ses jolis yeux verts et se lève précipitamment en rangeant son téléphone.
- Heu... le... le prof te cherche, il m'a envoyé te... chercher. Est-ce que ça va ?
- Oui, parvient-elle à dire.
- T'es sûre ?
Elle force le passage sans répondre et part en courant.
- Lena ! Attends moi !
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Young, Wild and Free.
JugendliteraturVoulez-vous la recette pour gâcher une vie ? C'est simple, rendez une adolescente complexée par ses formes et faites-en son mal-être le plus profond. Vous verrez, vous ne serez pas déçu.