chapitre un

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Elle s'appelait Assia. Elle était sublime. De magnifiques et longs cheveux noirs, accompagnés de deux yeux sombres dans lesquels on pouvait voir briller toute cette haine et tout ce chagrin qu'elle avait longtemps caché. Elle était forte, courageuse, et brillante, comme son père. Membre de l'armée, il était mort au combat alors qu'Assia n'avait malheureusement qu'un an. Elle avait grandi aux côtés de sa mère, Mary Deakin. Une femme qu'elle avait toujours décrit comme l'être le plus courageux et le plus respectueux du monde entier. Celle-ci s'était donnée pour que sa fille puisse vivre correctement malgré leur difficulté financière. Et, même si Assia le lui en avait toujours voulu, aujourd'hui, elle comprenait. Malgré la discrétion que pensait avoir sa génitrice, elle les avait toujours entendu, ces halètements, lorsqu'elle passait devant la chambre de celle qui l'avait conçu, pourtant fermée à clé. Lorsqu'elle n'était qu'une petite fille innocente, sa mère lui parlait de dossier important à faire signer dans la chambre. Dossier qui lui permettrait de manger. Assia y croyait, alors elle attendait silencieusement, enfermée dans sa chambre que le dossier soit enfin « signé ». Mais dès son adolescence, elle avait su comprendre ce qu'étaient ces bruits. Elle s'était endormie en les écoutant, tenant fermement son oreiller du bout de ses doigts frêles en se retenant de crier et d'éclater en sanglot. Elle voulait les tuer, tuer tout ceux qui souillaient sa mère. Au fil du temps, elle avait vécu dans le silence. Assia s'était habituée aux halètements et aux gémissements, même parfois aux cries qui s'échappaient de la chambre de celle qui l'avait éduqué. La nuit tombée, lorsqu'un client arrivait, la jolie brune se plaçait sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, écoutant de la musique pour fixer toutes ces rues. Puis, elle attendait. Quelques fois une heure, d'autres fois deux. Une fois qu'elle pouvait voir la voiture de ce foutu enfoiré quitter le parking de l'immeuble, Assia retournait dans son lit et tentait de s'endormir durant la courte pause qu'avait sa mère avant l'arrivée de son prochain client.

Lui, il s'appelait Zayn. C'était un métis au regard de feu qui habitait dans un minuscule appartement face à celui de la jeune Deakin. Il travaillait dans ce petit bar pour pouvoir payer le loyer à la fin du mois et quelques fois quand l'argent manquait, il dealait dans les rues d'Indianapolis. Dans l'immeuble, ils voyaient tous ce brun ténébreux comme un adolescent turbulent et dangereux qui devait sûrement passer ses soirées à boire et à fumer, non pas que des cigarettes. Pourtant, ils ne pouvaient pas comprendre ce qu'il avait vécu. Tout ce qu'il avait pu subir. Maltraitance, connaissiez-vous ? Un mot si loin, si vague et pourtant si proche à la fois. Cent cinquante-cinq milles enfants en mouraient par ans. Quarante millions souffraient, pleuraient, subissaient silencieusement les mots ou enduraient les coups de ceux qu'ils appelaient papa et maman. Quarante millions, dont Zayn. Vingt-trois pour cent le déclaraient, d'autres se renfermaient sur eux-mêmes avec les souvenirs et les marques recouvrant leurs corps. Honte, peur, colère ? Zayn n'avait jamais mérité ce qu'il subissait. Il avait grandi, renfermé dans un silence maudit dont la cause restait inconnue. Ils étaient tous contre lui. Son adolescence avait été mouvementée. Il cachait sa douleur derrière les nombreuses bouteilles de vodka qu'il réussissait à voler. Boire, ça permettait au métis d'oublier, rien que pour quelques minutes. Oublier les bleus présents sur son corps ou le regard noir qu'il devrait affronter en passant de nouveau la porte de chez lui. Alors, il buvait celle-ci sans soif, avec une cigarette entre les doigts, respirant la fumée qui le tuait peu à peu. Il buvait pour oublier. Il fumait pour mourir. Zayn combattait le mal par le mal, cette attirance excessive pour la mort qui allait sûrement l'emporter. Dès sa majorité, il avait pris le peu d'argent qu'il avait pour fuir. Il avait grandi, il était plein de force, plein d'énergie et plein de rage surtout.

Assia et Zayn s'étaient rencontrés un vendredi soir. Il fumait tranquillement sur le toit de l'immeuble, les jambes se balançant dans le vide, appréciant ce silence et l'ambiance de la rue. Jusqu'à ce que cette musique qui s'échappait de la fenêtre de l'avant-dernier étage le sorte de ses pensées. Il put remarquer par la suite cette paire de jambe fine. C'était sa voisine, la « fille de la pute » comme on la surnommait. Sans réfléchir, il prit un caillou pour le laisser tomber sur la jambe de la fille à seulement quelques mètres au dessous de lui. Il n'aurait pas su expliquer son action, peut-être parce qu'il s'ennuyait. C'était tentant.

criminal lovers // zmOù les histoires vivent. Découvrez maintenant