La Seconde Potter

Chapitre deux : « Lizzie Alastair »

Dans la sinistre ville de Londres abattue par la pluie, les rues étaient bien vides. Seuls quelques passants, principalement des hommes et des enfants, rentraient chez eux pour un bon repas de midi bien mérité auprès de leur famille. Sur le temps de midi, tout était presque fermé, Londres régnait dans le calme le plus absolu. Le seul bruit que la rue pouvait entendre... était le son que produisaient les enfants de l'orphelinat Wool. Elizabeth Potter, nommée Elizabeth Alastair à présent, restait au bord de sa fenêtre, bien installée dans sa chambre. Cette semaine, elle avait été encore punie, pour diverses raisons, par la directrice actuelle, la vieille Martha. Lizzie, car c'est ainsi qu'on la surnommait, avait l'estomac vide, et des petites crampes dues à la faim, n'arrangeaient absolument rien. La jeune fille s'écarta de la fenêtre, et elle regarda la porte de sa chambre. L'orpheline tourna la poignée, mais elle se rendit bien vite compte qu'elle était enfermée à double tour. Elle grogna légèrement. Elle mourrait de faim ! Si elle avait été punie, c'est parce qu'elle avait encore fugué, pour aller à la bibliothèque du centre ville. Celle de l'orphelinat ne lui suffisait plus, et elle faisait tout pour échapper aux corvées que lui imposaient les mégères de l'établissement. Alors, elle fit une de ces choses, qu'elle considérait comme exceptionnelles, et uniques comme elle. Elle pivota sa main doucement, et elle entendit le verrou de sa porte se déverrouiller.

Lizzie savait faire des petites choses comme cela, et ça lui était bien utile. Elle pouvait faire voler des objets, elle pouvait agrandir ou dédoubler la nourriture, elle savait aussi faire éteindre les lampes, sans se lever. Elle pouvait également entendre les pensées des petits pensionnaires, et avec le temps, elle avait appris à ne plus les entendre. La jeune fille avait des pouvoirs incroyables pour son âge, même s'ils n'étaient pas du tout exploités comme il le fallait.

En dépassant la porte de la chambre numéro vingt-sept, la jeune sorcière se rendit aux cuisines. Elle savait qu'il était midi et demi, et à cette heure là, tous les enfants jouaient dans la cours, sauf cinq petits qui devaient faire les corvées dans la salle à manger. La cuisinière, qui était de piètre qualité, prenait sa pause, en s'asseyant sur son tabouret, lisant des revues sur les mannequins masculins, ayant un faible pour la lingerie, décidément. Elizabeth restait cachée derrière la porte, et en fixant le frigo, il s'ouvrît tout doucement. Elle savait pertinemment que la grosse Martha avait des plats sur mesure. Et le vendredi c'était le jour des pâtes froides. Sans bouger, mais dans une concentration hors norme, elle fit venir le plat jusqu'à elle. La cuisinière n'avait rien vu, jusqu'à ce qu'elle entendit le plat bousculer la porte. Oui, la jeune apprentie ne maîtrisait pas parfaitement son pouvoir. Heureusement pour cette dernière, elle eut le temps de remonter à la salle à manger, afin d'aller chercher une pomme. Évidemment, elle n'avait pas prévu que ce soit ce crétin de Bryce avec sa bande qui allaient faire les corvées sur le temps de midi.

« Oh non... pas lui... » pensa-t'elle. Bryce et sa bande étaient des adolescents de quatorze ans, dont la favorite activité était d'ennuyer, de voler, de frapper, et d'humilier les élèves. Et Elizabeth était, pour son plus grand malheur, leur préférée. Elle s'avança discrètement vers le panier à fruit, mais évidemment un de ces imbéciles se retourna. Il ricana, avec le chef du bourreau qui fit de même.

- Alors la tarée, tu voles les fruits maintenant ?

- Laisse moi, Bryce !

Il prit la jeune fille à l'allure fragile par le bras et la tira nonchalamment.

- On dit : « S'il te plaît, monsieur Bryce », ici !

- Rêve ! C'est pas parce que tu es le lèche-botte de la vieille Martha, que tu dois profiter d'un traitement de faveur !

Un autre garçon commença à s'y mettre également.

- Bryce, vas-y te laisse pas faire ! Cette petite ingrate fait trop sa prétentieuse !