33 : La force de Davi

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33.
La force de Davi


Brésil, 1985


— Davi ?

Leon avait les yeux ronds comme des billes, mais même à plusieurs mètres de distance, le costaricien pouvait lire le mélange de terreur et de surprise qui brillait à l'intérieur de ses pupilles. Baguette levée, Davi ? lui aussi n'en menait pas large.

En voyant le nundu se jeter sur le français, il n'avait pas réfléchi et avait lancé le premier sort offensif qui lui était venu à l'esprit. Seulement, maintenant qu'il était en mesure de prendre pleinement conscience de la situation, il sentait l'effroi le glacer de l'intérieur.

Ses vieux démons l'encerclaient alors que les yeux jaunâtres de la créature se posaient sur lui. Les souvenirs de son enfance lui explosèrent au visage et il se remémora le jour où il avait croisé ce regard sauvage pour la première fois. La cicatrice qui barrait son torse se mit à picoter, comme pour lui rappeler le danger que le nundu représentait.

Sa main qui tenait la baguette s'était mise à trembler et ses lèvres étaient devenues sèches. Il voulut lancer un sort, mais seul une sorte de croassement rauque franchit la barrière de ses lèvres. Le traumatisme s'était agrippé à lui et son corps refusait désormais de lui obéir.

— Davi ! Maintenant ! Destructum !

Le cri de Leon claqua dans l'air comme un coup de fouet, mais cela parmi à Davi de reprendre contenance. Le sort jeté par le sorcier après qu'il eut récupérer discrètement sa baguette fit exploser à nouveau le sol entre le costaricien et le nundu. Cela n'arrêterait pas la bête, mais elle leur permettrait de gagner quelques minutes.

Davi aida Leon à le rejoindre sur les premières marches et les deux n'hésitèrent qu'une micro-seconde avant de se mettre à monter le restant des marches en courant.

— Tu connais un moyen de se débarrasser de ce monstre ? hurla Leon d'une voix rendue saccadée par la course.

— Tu rigoles ? cria Davi en réponse. Les efforts combinés d'une centaines de sorciers sont nécessaires pour venir à bout d'un nundu !

Le visage de Leon vira au verdâtre après cette information. Un rugissement derrière eux leur indiqua sans qu'ils n'aient besoin de se retourner que le nundu s'était lancé à leur poursuite. Les deux garçons accélèrent autant qu'il était possible d'accélérer. Ils avaient depuis longtemps atteint le maximum de leur force physique, mais l'adrénaline leur donnait des ailes.

— Leon ! hurla Davi. Fais exploser l'entrée de l'école !

— Quoi ? Mais t'es complètement malade ! protesta le français.

— Fais ce que je te dis. Fais-moi confiance c'est le seul moyen de s'en sortir !

Ils s'apprêtaient à gravir les dernières marches. Devant eux se dressait l'immense porte sur laquelle était sculpté un dragon à plume et qui masquait la véritable entrée de Castelobruxo. Mais les deux sorciers n'avaient pas le temps de s'arrêter pour insérer leur disque d'or dans les yeux de la bête et ainsi ouvrir la porte. Davi savait aussi qu'ils n'auraient pas le temps de se soumettre au test de la deuxième porte. S'ils ralentissaient ou s'arrêtaient, le nundu n'hésiterait pas à les déchiqueter.

Destructum ! hurla Leon.

La porte explosa en morceau. Les deux sorciers se couvrirent la tête de leurs bras, mais ne ralentirent pas pour autant. Leur instinct de survie dominait désormais et ils plongèrent tête la première dans la tempête de gravats que l'explosion avait causé.

Le sortilège de destruction de Leon avait atteint la seconde porte et la statue de dragon qui masquait l'entrée de Castelobruxo était en miette, dévoilant l'escalier qui s'enfonçait dans les profondeurs de l'école. Davi remercia mentalement ses ancêtres de ne pas avoir imposé de sorts de protection sur la porte d'entrée. Sans doute avaient-ils jugés que les protections disséminées autour de lui étaient suffisantes.

— On va attirer le nundu à l'intérieur de l'école ! paniqua Leon, les yeux ronds comme des billes.

— Je vais reboucher l'entrée ! lança Davi.

Le costaricien tira le français dans l'escalier au moment où un rugissement retentit. Davi frissonna. Le nundu était proche.

Wingardium leviosa !

À l'aide de sa magie, il fit l'éviter un énorme bloc de pierre qu'il plaça en haut de l'escalier avant de faire de même avec un autre. Seulement, il était trop lent et quelques secondes suffiraient au nundu pour les rejoindre et comprendre où ils s'étaient planqués.

Wingardium leviosa ! hurla à son tour Leon, joignant sa magie à celle de Davi.

Les efforts combinaient des deux sorciers firent des merveilles et ils réussirent à déplacer une partie du toit pour couvrir complètement les escaliers, à la dernière seconde. Le nundu ne put que se casser les crocs sur la pierre alors qu'ils laissaient retomber l'énorme rocher pour masquer l'entrée, dans un choc qui fit trembler les murs.

Leon et Davi s'étalèrent d'un même mouvement dans les escaliers à cause de la secousse. Le costaricien grimaça lorsqu'il se redressa. Il frotta le bas de son dos qui avait violemment heurté les pierres de l'école. À côté de lui, le français pestait à voix basse.

Les deux sorciers échangèrent un regard et ils éclatèrent de rire.

C'était un rire nerveux. Le résultat de l'accumulation de la peur et du stress qui avaient étreint les deux sorciers. Ils relâchaient enfin la tension.

— Merci, lâcha soudain Leon en redevenant brusquement sérieux. Sans toi, j'aurais sûrement servi de repas à cette espèce d'énorme lion.

Davi jeta un regard vers le français, allongé dans le escaliers à côté de lui.

— Ne me remercie pas. Armeline et moi avons transplané dès qu'on a eu ton message, comme elle est déjà majeure. J'ai eu pitié du nundu. Il serait sûrement devenu malade en t'avalant.

Un sourire étira les lèvres du français et Davi réalisa que c'était le premier sourire franc que ce dernier lui adressait depuis son arrivée à Castelobruxo. Il en éprouva soudain du regret et une profonde honte.

— Je crois qu'on a pas commencé de la meilleure des manières tous les deux, désolé, s'excusa le costaricien.

Leon répondit par un haussement d'épaules avant de lui tendre la main, comme s'ils se rencontraient pour la première fois.

— Recommençons alors. Je m'appelle Leon Flores. Insupportable comme tous les français, mais j'ai un petit gramme de sang mexicain. Et j'adore les cacahuètes.

Davi rit lorsqu'il lui serra la main, car cette relation qui avait pris un mauvais départ venait peut-être d'effectuer un virage à cent-quatre-vingts degré pour devenir finalement une belle amitié.

Les fantômes de Castelobruxo ❊ HP FANFICOù les histoires vivent. Découvrez maintenant