On m’attribua une chambre à moi, la 42. Elle avait une porte commune à la chambre 44, occupée par Nephtys, une jeune femme douce, timide et amicale. Ses grands yeux miels brillaient d’un éclat intelligent, et elle avait été accueillante et compréhensive quand j’avais déclaré avoir besoin d’un peu d’intimité après les évènements passés.
- Je reviendrais te voir plus tard, avait-elle déclaré. Je dois t’expliquer notre fonctionnement.
Elle était partie aussi discrètement qu’elle était venue. Plus vite que son ombre.
Je contemplais donc le plafond depuis mon lit, me ressassant chaque étape de mon voyage avec émotion.
Puis j’eus soudain faim. Mon ventre poussait d’affreuses plaintes, entre gargouillis et cris agonisants. Pauvre estomac ; il n’avait pas eu le plaisir d’un repas chaud depuis que j’étais partie. Je m’imaginais une soupe de melon épicé au nectar d’or. Des sushis de poisson libellule accompagnés de sauce au lait de moogliz. Des tartines de confiture de fruit sélénite. Autant de choses si délicieuses…
Que j’avais faim…
Je toquai timidement à la porte de Nephtys. Elle ne répondit pas. Alors je sortis, me mettant en quête d’une quelconque cuisine ou salle à manger.
Après des dizaines de couloirs et de recherches vaines, je finis par m’énerver. Plusieurs mois que je crapahutais dans tout le pays pour rejoindre cette fichue cité, et voilà que je ne trouvais même pas un scarabée irisé à me mettre sous la dent.
- J’ai faim, gémis-je, frustrée.
Des pas se firent entendre. Ils étaient légers, assurés ; une jeune femme d’une rare beauté sortit de l’obscurité et vint à ma rencontre.
Seulement vêtue d’une longue tunique ébène, elle avait des cheveux pourpres et soyeux qui lui tombaient jusqu’au creux des reins. Elle était dotée d’une paire d’iris magnifique, d’un gris très clair. Ses lèvres étaient charnues à souhait. Son corps, légèrement dévoilé sous le vêtement, laissait deviner des courbes parfaites. Grande, superbe, cette fille devait susciter l’admiration de ses compagnons.
- Que fais-tu ici ? me demanda-t-elle d’un ton hautain, suspicieux. Ce couloir est réservé aux chefs de Garde.
J’ouvris la bouche, la refermai. Je ne savais que dire. Soudain, ses yeux se posèrent sur mes habits.
- Mais ce sont… Ce sont mes fringues !
Je baissais le regard. Mon débardeur noir et mon sarouel ne me paraissaient plus aussi passe-partout, tout à coup.
- Euh… je…
- Tu es entrée dans ma chambre c’est ça ? S’écria-t-elle, soudain ivre de fureur. Rend-les-moi !
Puis je compris. Tout à l’heure, je devais être entrée par inadvertance dans sa chambre… La jeune femme en face de moi devait être la fameuse Pia. Et j’avais pris ses habits dans l’armoire.
- Pia ! m’exclamai-je. Je ne l’ai pas fait exprès, je suis désolée. Je vais te les rendre…
Elle ne m’écoutait pas. Elle empoigna mes cheveux pour tenir ainsi ma tête et la souleva jusqu’à son visage. Je ne me débattis pas ; la peur et la fatigue m’en empêchaient.
- Ne m’appelle pas Pia ! Seul Nevra et mes amis sont autorisés à me surnommer ainsi. Mon nom est Senepia. Senepia, tu entends ?
- Senepia. Oui, oui, j’entends.
Elle me balança à terre. Ma tête cogna contre la pierre rugueuse et je sentis une étrange douleur me perforer l’arrière du crâne. Je tins bon.
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Illusoire [En pause]
FantasíaKat est une Femme de la Nuit, une créature nocturne aux pouvoirs très étranges. Elle fuit sa ville natale, Drenya, occupée par les Illusionnistes, un mouvement terroriste, pour rejoindre la cité d'Eel, au nord d'Eldarya. Elle espère y refaire sa vi...