Pour l'amour du Ciel ~ Partie I

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La femme aux cheveux blonds m'avait dit que c'était normal.

Moi, j'avais plutôt l'impression de me perdre dans les limbes du vide qui envahissait ma propre tête.

Il était étrange de se réveiller un jour sans que rien n'habite son propre esprit, même pas un écho, une miette de souvenir, un fragment d'émotion. C'est comme si on se réveillait nouveau né, avec la particularité de savoir déjà lire, écrire, parler et raisonner. On se sent comme un bambin ayant grandi trop vite, un enfant dans le corps d'un adulte, ou peut-être un adulte un peu trop simplet? Je ne saurai le dire.

Dès que cette femme aux longs cheveux blonds s'était penchée sur moi, son nom avait pourtant presque fusé au fond de mon crâne.

- Tsunade.

Et c'était tout.

J'avais froncé les sourcils et ouvert la bouche pour ajouter quelque chose, mais cette pensée volatile s'échappa d'entre mes doigts, comme si je tentai d'attraper de l'air. 

Je ne me souvenais plus.

J'avais pourtant son nom bien en tête, et son visage m'était familier. Je la connaissais.

Pourtant, je ne savais pas qui elle était. Dès que je tentai d'approfondir ce que j'étais censée savoir sur elle, ça m'échappait. C'est comme si ma propre tête refusait de me laisser ouvrir les tiroirs de ma propre mémoire, me laissant là, avec la seule présence d'un visage et d'un nom, perdue dans la carence manifeste de mon esprit. 

Tout le reste était noir.

Alors, dans un élan de panique, j'avais songé à ma propre existence. Savais-je seulement qui j'étais?

Alors, mon nom et mon visage firent irruption dans mon esprit. Cela m'avait rassurée. Mais lorsque je réfléchissais au reste...

Je ne me souvenais plus.

Bizarrement, je n'avais pas été particulièrement déboussolée. On en entend beaucoup parler, de ces amnésiques qui plongent droit en Enfer parce que tout un pan de leur vie s'est volatilisée, parce qu'ils ne savent plus qui ils sont.

C'était, bien sûr, à condition d'avoir un jour su qui ils ont été, et d'en ressentir le manque évident. Pour ma part, je crois que je n'ai jamais su. C'est peut être pour cela que Tsunade, qui m'avait confirmé son nom avec de grands yeux interloqués, avait paru surprise de ne pas me voir sombrer dans les méandres d'une atroce angoisse. 

Parce que sans trop savoir pourquoi, je me sentais soulagée de voir ma tête aussi vide. Oh oui, si soulagée. Affranchie de quelque chose dont je n'avais plus conscience. Et je me sentais bien.

J'étais comme un nouveau-né. 

Qui découvre le monde, où tout lui est offert. Curieux, mais aussi très peu familier avec les émotions, les sensations. Très malléable, de part son ignorance du monde et des gens, et fasciné après chaque découverte, chaque nouvelle étape franchie. J'avais l'impression qu'on m'avait offert la possibilité de vivre pour la deuxième fois comme si c'était la première, avec les avantages de ne pas avoir à passer par les lourdes étapes de l'enfance et de l'adolescence. Je ne savais pas ce que j'avais perdu, parce que j'en avais pas conscience. Je ne savais pas qui j'étais, mais j'avais la chance de pouvoir me construire comme je l'entendais.

Parce que je ne me souvenais plus. De personne, ni même de moi. Je n'avais pas d'histoire, et les autres non plus. Il ne me restait plus qu'à écrire la vie que je voulais avoir, sans les chaines d'un passé peut être trop douloureux, sans les entraves sociales que j'aurai pu avoir.

𝕃𝕖𝕤 É𝕔𝕙𝕠𝕦é𝕤 | Kakashi x Reader - RecueilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant