Une jupe et une tâche

88 3 0
                                    

Je peste contre le train qui est annoncé avec douze minutes de retard. S'il a cinq minutes de plus, je serai définitivement en retard. Et je déteste ça. Depuis que j'ai commencé à travailler dans cette entreprise, cela ne m'est jamais arrivée. Mais il ne faut pas que ça m'arrive aujourd'hui. Surtout pas. Je dois présenter mon projet au patron à la première heure. Il est évident qu'être en retard tâchera mon dossier pour la place que je suis amenée à obtenir très prochainement. Je regarde rapidement l'heure sur mon téléphone alors que l'horloge principale de la gare m'affiche sept heures et dix minutes. Mais sans aucune logique ou avec l'espoir que l'horloge soit en avance, je me sens obligée de vérifier l'heure sur mon portable. Identique. Au moment où je verrouille mon téléphone, en soupirant, le panneau d'affichage transforme les chiffres en rouge. Dix-neuf minutes.

Merde.

Fait chier.

Je suis définitivement en retard ! Je soupire une seconde fois et croise le regard d'un passager qui, comme moi, attend patiemment sur le quai totalement frustré. On s'échange un sourire compatissant et l'homme s'allume une clope. Nous sommes environs une trentaine à peine éveillés pour la plupart. Deux dames à ma droite discutent sur la récurrence des retards des trains. Je sens que l'attente sera longue. Pitié.

(...)

Je franchis le hall principal de l'immeuble à la hâte en espérant atteindre l'ascenseur que je vois ouvert au loin. Un dernier petit sprint me permet d'y accéder tout juste avant que les portes ne se referment. Avec discrétion — j'espère — je reprends mon souffle. Courir n'a jamais été ma tasse de thé et encore moins le matin. J'ai un peu moins de cinq minutes de retard finalement. Peut-être que ça pourra passer me dis-je alors que je replace la jupe que j'ai décidé de porter ce matin pour faire bonne impression — si j'avais su, je ne l'aurai pas mise, car ce n'est absolument pas pratique.

* Surtout qu'elle te serre de trop et qu'elle est au moins de deux tailles en-dessous de tes grosses cuisses. *

Je me rappelle qu'il faut appuyer sur le bouton de l'étage en question où l'on m'attends mais je constate que ce dernier est déjà sélectionné. Le bouton est allumé dans une couleur jaune-orangé. Je jette un coup d'œil autour de moi afin de savoir qui pourrait rejoindre cet étage.

Mon regard croise Raphaël qui, tout aussi essoufflé que moi, tente de faire bonne figure. Tiens, je mettrai ma main à coupée que nous étions dans le même train. Il détourne les yeux et le « ding » de l'ascenseur se fait entendre. Trois personnes sortent et les portes se referment sur nous deux. Le silence est d'or dans cet espace clos et je ne peux que me demander la raison de pourquoi ce garçon me hait.

* Tu dois certainement le dégoûter. *

Perdue dans mes pensées, je ne remarque pas qu'il est en train de me parler. Il m'informe que la réunion est reportée à jeudi car notre patron est finalement absent ce matin — une urgence avec un client à l'étranger. Je souffle à la fois mi-satisfaite mi-frustrée et finalement je me dirige vers mon bureau un nouveau dossier m'attend déjà. En plus de tout le travail accumulé.

(...)

Je m'enferme dans les toilettes en rageant contre Cassandra. Il est midi et j'étais en train de manger lorsque cette dernière nous expliquait l'horrible nuit qu'elle a passé à cause de ses voisins. Avec ses grands gestes et son côté gaffeuse, elle n'a pas vu la tasse de café posé devant moi et l'a renversée sur moi. Me brûlant et me salissant par la même occasion. Alors, en vain, je tente de nettoyer le café sur cette fichue jupe que je ne mettrai plus jamais.

Au bout de cinq minutes d'huile de coude, de serviettes en papier, d'eau froide et d'un savon liquide bon marché, je me rends que je n'ai fais qu'empirer les choses. Notamment parce qu'il est compliqué de nettoyer une jupe portée sur soi. Je décide d'aller au plus simple et de retirer mon vêtement afin de le mettre sous l'eau espérant retirer l'excès du savon. C'est comme ça, en culotte et penchée au-dessus du lavabo, qu'Amaury décide de faire son entrée. C'est sa voix surprise qui le trahi et me fait sursauter laissant tomber ce que j'ai dans les mains.

Entre tentations et confusionsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant