''Étonné'' était un mot assez faible pour décrire l'état dans lequel se trouvait Gabriel à l'annonce des accusations de la reine envers son père. Il retenait surtout le fait que sa mère avait toujours affirmé qu'il était mort à la Réunion avant sa naissance. Du coup, il n'avait pas encore assimilé que son père était un criminel connu dans ce monde étrange. Le déni était pour le moment préférable.
- Pour savoir si tu es en contact avec ton père ou si tu sais quelque chose que nous ignorons, reprit la reine, nous allons devoir procéder à la vérification de la pureté de ton esprit.
Aussitôt dit, un être bossu s'avança vers Gabriel, et se plaça à quelques centimètres de lui. Perché sur deux pattes, son dos bossu l'empêchait de se déplacer aussi aisément qu'il l'aurait voulu. De près, il était encore plus impressionnant. Ses membres avant n'avaient rien en commun avec les bras humains. Ils étaient musclés et le bout de leurs pattes ressemblaient à celles des chats. Leurs articulations leurs permettaient de marcher sur quatre pattes comme les quadrupèdes. La peau imberbe de l'être était d'un vert turquoise sans imperfection, mais le plus impressionnant restait son visage : ses deux oreilles étaient en réalité deux trous et sa bouche un réel gouffre sans lèvre. Tout son visage était plat, sans aucune bosse venant entacher le parfait ovale que formait sa tête. Aucun signe de nez sur son visage. Seuls ses yeux apportaient un peu de grâce à ce visage difforme. D'un vert turquoise flamboyant, ils évoquaient une intelligence extrême avec une pointe de malice. Ils semblaient refléter entièrement l'âme de l'être.
Vu d'ici, n'importe qui l'aurait pris pour un monstre si celui-ci n'était pas habillé avec une élégance rare. Il semblerait que les toges soient réservées aux humains puisque l'être portait un costume noir assorti de boutons couleur or. A ses pattes postérieures, des chaussures carrées et brillantes ; et sur sa tête un haut-de-forme noir, posé en équilibre entre ses oreilles.
Gabriel n'avait jamais rien vu de tel. Le souffle coupé, il attendait que l'être arrête de le fixer dans les yeux pour oser un mouvement. Soudain son sang se glaça dans ses veines et un sentiment de terreur rempli tout son être. Quelqu'un avait parlé dans sa tête. La voix était claire, et tinta dans son esprit avant de disparaître.
- Bonjour Gabriel. Je suis Tar. C'est moi qui vais procéder à la vérification de ton esprit.
- Qu'est-ce que vous êtes ?demanda Gabriel à vive voix.
- Je suis un lumpus, une espèce vivant seulement dans ce monde-ci et inconnue du tien. Si tu n'as rien à te reprocher, tu seras libre d'ici quelques minutes. Au contraire, si tu es complice de John Dext, alors tu seras pendu pour crime.
A peine avait-t-il apprit le nom de son père qu'il se retrouva incapable de réfléchir. Une présence d'une force phénoménale avait envahit son esprit, l'empêchant de bouger ou même de formuler une idée. Devant ses yeux défilaient le quotidien des derniers mois. Sa vie à la faculté, les soirées étudiantes et l'appartement de sa mère. Une vie banale et sans crime, sans monde extravagant. Quelques instants plus tard, Gabriel sentit la présence du lumpus s'éloigner.
Gabriel reprit conscience du monde qui l'entourait. Tous, le regardaient d'un air tendu. Un moment décisif devait se jouer, et lui, jeune étudiant, en était le centre. Le corps de Tar cachait la reine mais sa présence se faisait tout de même ressentir, comme si son aura se diffusait dans la salle. Dans un grand soupir, le lumpus se leva pour se tourner vers la reine. Après quelques secondes de silence, elle s'adressa à Gabriel d'une voix forte et empreinte d'autorité.
- Tar m'affirme que tu es innocent et j'ai pleinement confiance en ses jugements, annonça-t-elle en s'attardant sur le public. Tu es libre, va !
- Comment ça ? s'exclama Gabriel. Vous devez de me ramener chez moi ! Vous m'avez tout de même kidnappé !
- Ce n'est plus mon problème, disparais, tu ne m'es plus d'aucune utilité à présent, tu ne sais rien sur ton père.
Sa voix cassante retentit dans la salle et le constat fut sans appel. Si Gabriel voulait rentrer chez lui, il allait devoir se débrouiller seul.
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Destination : Tarvia
Fantasi« Gabriel marcha difficilement vers sa fenêtre pour apercevoir la ville. A travers les barreaux, la vision d'une ville s'étendait devant lui. Une ville comme il n'en avait jamais imaginé. C'était une belle ville. Avec des boutiques à chaque rez-de...