Informer la population en temps de guerre était loin d'être une tâche anodine. Le journalisme de guerre prit un essor considérable, les ventes de journaux ont explosé malgré la pénurie de papier. La population avait besoin de combler ce manque d'information, car tout le monde se sentait concerné. Jeune socialistes, réfractaires, pacifistes, on partait avec le sentiment du devoir, en se disant que c'était pour la bonne cause. On nous avais appris les obligation du soldat et ce qui permettait de ne pas avoir d'arrières-pensées. Un apprentissage et des règles que tous citoyens n'acceptaient pas forcément...
Mon frère était d'un pacifisme absolu, il ne supportait pas la violence et l'idée d'une guerre était insupportable pour lui. C'était un flippé de la vie, ce p'tit gars. En frôlant de mes doigts la couverture rugueuse de mon carnet je me souvint qu'il avait justement dessiné la guerre sur l'une des pages. Un gribouillis qui se gravait sur plusieurs pages de mon cahier. Il avait pris sont stylo à deux main pour s'executer, quel abruti il faisait... Avoir écrit sur ce carnet d'études qui m'était si cher... Je ne lui pardonnerai jamais. Il me manquais terriblement lui aussi... Schizophrène, il avait des troubles obsessionnels, ma mère allait souvent l'emmener voir un psychiatre. C'était un vrai cancre, le pire élève qui soit. Moi, je devinais qu'il avait des symptômes de dépression, une vraie maladie, pas comme moi qui était déprimé. Comme quoi, les clowns sont ceux qui se portent le moins bien... J'avais de la peine pour lui, il venait justement de terminer sa scolarité et avait peur de l'avenir. Celui ci était en effet bien pire que ce qu'il aurait imaginé... Le pauvre garçon. À l'époque je travaillais à labourer les champs de mon oncle. L'été était particulièrement chaud et les vendanges, bien que moins physiques me torturaient le dos et faisaient couler sur celui ci toute la flotte de mon corps. Un jour, les cloches on sonnées, je n'y avais pas fait attention tous de suite, mon père me les as fait remarquer en me disant qu'on devait déjà finir le champs. Les mouvements de la faux me donnaient le vertige et les sons de cloches résonnaient dans ma tête comme le son d'un cor de guerre réverbérés dans une vallée. Après les moissons je descendit en ville avec mon frère, louvoyant à travers la foule on s'avançaient sur centre. Là, on voyais des troubadours et des défilés rythmés par le fracas des percussions. Nous pensions que c'était une fête, rien de plus. Mais en regardant autour de nous, certaines femmes sanglotaient, trop pour que ce soit un enfant perdu. Je compris. C'était le 4 août 1914. Quelques jours plus tard, les services officiels avaient quittés la ville, des tours sentinelles avaient été placés à chaque recoins de rue. La nuit, les accès étaient fermés et la journée on ne pouvait pas rentrer non plus. Ce jour précis fut une sorte de déclic pour mon frère, ayant traversé une ruelle pour rejoindre la voix manifestante d'un groupe de personne, un homme, le visage protégé d'un casque et le regard sombre nous barra la route. Un autre homme s'approcha et nous dit d'une voix forte : « déguerpissez on a assez à faire ! ».
Je pris alors mon frère par le bras et fis volte face d'un pas rapide. Dans notre course mon frère s'arrêta net et s'écroula au sol : « C'est la fin, nous sommes fichus... ». Je ne comprenais pas tout de suite, il poursuivis d'une voie fébrile et saccadées : « les hommes qu'on a vu... ils avaient le même uniforme sombre et unis et surtout, i-ils étaient armés... » ce à quoi je rétorquais que c'était en effet des soldats. Je me résigne à te le dire... Je sais que c'est difficile à entendre mais, nous sommes en guerre dis-je sous l'échos métallique des cloches de la ville.
YOU ARE READING
Damnés
Historical FictionUn étudiant avec une arme à feu, des grenades dans les poches et la mort sur la conscience. La guerre est parfois injuste et inhumaine. Embourbé dans un amas de terre, ce soldat de 21 ans revis les scènes de ses derniers jours, constate la réalité...