Histoire d'un enfer 2 : le prix du sang
Chapitre 1 : Cauchemar
Un soir de l'année 1710, assise au bord d'une falaise, je contemplais la pleine lune. Elle éclairait la nuit de sa douce lumière. Mes yeux étaient rouges, je ne me transformai que rarement en humaine, juste quand cela était nécessaire, c'est-à-dire entourée de vermines
mortelles. J'aimais jouer avec mes yeux et les rendre plus ou moins voyants et étincelants.
Depuis que Cristal et Thomas étaient morts, je me sentais plus légère. Quelques fois, les premiers mois, il m'arrivait d'avoir des regrets, pour elle. Jamais je n'aurais dû la laisser vivre aussi longtemps, j'aurai dû la tuer dès sa naissance, cela m'aurait évité bien des désagréments, heureusement plus le temps passait moins je pensais à elle mais je ne cessais de me dire que si je l'avais exterminé comme on écrase un cafard sous sa semelle, Balla serait encore en vie. Vous devez vous demander comment un simple cheval pouvait-il vivre aussi longtemps ? Etait-il lui aussi un vampire ? Un cheval-vampire ? Non bien sûr que non, Balla avait l'âme trop pure pour être comme moi, et il n'existait pas d'animal vampire. En tout cas je l'espérais. Mais lorsqu'un vampire a de l'affection pour un mortel ou juste qu'il veut le voir vivre, il lui suffit, comment dire... de le programmer en lui. Un vampire peut rendre un mortel immortel juste par sa présence. J'aimais Balla, je n'avais jamais voulu qu'il parte, c'est pour cela que je l'ai rendu immortel mais malheureusement ce don empêchait seulement le temps d'avoir des effets sur lui, je n'avais pas pensé qu'une garce pouvait lui donner du poison. Chaque nuit, chaque jour, je pensais à lui. A Zénith. A Dayaxa.
Pour mon cheval, il n'y avait plus rien à faire et cela depuis bien longtemps mais Zénith et Dayaxa, où étaient-ils ? Je n'en avais aucune idée. Je ne sais même pas s'ils avaient survécu à Masarra. Et s'ils avaient survécu à la bête, où étaient-ils partis ? Dans quelle direction ? Je ne savais pas, la seule chose que je savais c'était que Zénith, à cette heure, devait être une magnifique jeune fille et Dayaxa un grand loup puissant. Je repensais à elle, à son visage, au jour où elle me dit que la mort de sa mère n'était rien de grave. Je souris à cette pensée. Je devais la retrouver. A tout prix. Des bruits se firent entendre derrière moi et me sortirent de ma nostalgie.
Je me levais et me dirigeai vers cette agitation. Je pouvais voir des choses bouger. Je me cachai derrière un arbre. Des loups couraient après un cerf qui était déjà mal en point. Sa cuisse n'avait plus de peau, je pouvais voir ses muscles à chaque pas qu'il faisait. Son dos était couvert de lacérations et ses yeux trahissaient sa peur. Je sentais son sang et son angoisse si caractéristique des proies qui savent qu'elles ne vont pas tarder à mourir. Il s'arrêta, boitant, plus personne ne le suivait, les loups avaient comme disparu. Le cerf tourna la tête, regardant derrière, un loup tapis dans l'ombre face à lui en profita et se jeta dans sa direction. La tête encore retournée, il ne vit pas le prédateur fondre sur son corps, le choc fût tel qu'il y eu un craquement effroyable. La proie tomba immédiatement. Lors de l'impact le loup lui avait brisé la nuque. Une fois échoué sur le sol, tous les prédateurs sortirent et se précipitèrent sur leur casse-croûte. Certains se jetèrent sur le seul endroit qui ne possédait plus de peau, la cuisse et laissèrent leurs crocs arracher les muscles et la chaire. D'autres s'en prenaient au ventre, ils ouvrirent à coup de dents la peau de l'animal, avalèrent sa chaire. Tous les organes s'échouèrent eux aussi au sol, glissant sur la peau déchiquetée. Il me semblait que le foie était en train de glisser lorsqu'un loup l'attrapa et le mastiqua laissant couler sur ses babines des filaments rouges et visqueux. Je regardai cette scène sans dégoût, après tout j'avais fait pire et ce n'était pas pour me nourrir, lorsque j'entendis un grognement derrière moi, je me retournai doucement, un d'entre eux se trouvait là. Il grognait, mais ses compagnons l'ignoraient. Lorsque l'estomac se remplit les oreilles se ferment. Mes yeux scintillaient de rouge et je souris légèrement laissant apparaître mes longues canines sur lesquelles se reflétait la lumière de l'astre blanc. Il baissa la tête et les oreilles mais comme pour se prouver à lui-même qu'il n'avait peur de rien retroussa ses babines. Je m'approchai de lui à la vitesse de l'éclair le saisis par la peau du cou et le balança en l'air. Il atterrit près de ses compagnons, rebondit lourdement sur le sol et fut stoppé par la carcasse. D'abord surpris, les loups se retournèrent dans ma direction, crocs ensanglantés en avant, le poil hérissé. Je m'approchai d'eux les yeux toujours étincelants. Ils essayèrent de m'intimider mais je n'allais sûrement pas avoir peur d'une bande de chiens sauvages. Ils finirent par reculer derrière leur butin, prêts à s'enfuir. Heureusement pour eux, je n'avais pas envie de tuer ce soir ou en tout cas pas eux, je reculai et m'en allai, les laissant reprendre le cours de leur repas. Vous devez sûrement ne plus rien y comprendre, ah, ah, pauvre chose. Ce ne serait d'ailleurs pas la première fois que vous seriez à la traîne. Je vais quand même tâcher d'éclaircir cette situation. Alors les loups sont-ils mes amis ou mes ennemis? Je vous dirais les deux. Les loups plus à l'ouest où je naquis, étaient mes amis mais ceux d'ici ne sont que des bêtes sans cervelle qui pourrait se tuer entre eux pour un lambeau de chair putréfiée. Les animaux d'ici ne vivaient que par leur instinct et ne prenait pas la peine de réfléchir une seconde. Comme les humains à vrai dire. Il est plus facile d'agir bêtement et de faire face aux conséquences plus tard plutôt que de réfléchir dès maintenant à la suite des événements. Je ne perdis pas de temps avec ces bestioles qui dévoraient leur proie.