Le visage de l'amour

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Nico écoute tranquillement sa musique, assis sur un banc proche de son lycée quand une main se pose rapidement sur son épaule. Il sursaute et envoie valdinguer son poing qui rencontre le visage de son surveillant Grover Underground. Ce dernier grogne mais ne relève pas. Nico s'excuse maladroitement, mal à l'aise. Grover masse sa mâchoire mais lui dit :

-Pas grave, tu m'paieras des Enchiladas.

Nico hausse un sourcil en voyant le malaise pourtant évident de Grover, le meilleur ami de son cousin Percy, surveillant à temps partiel au lycée et accessoirement, étudiant en Stapp pour devenir professeur de sport. Il faut dire que pour courir le jour des Enchiladas à la cantine, il n'y a pas plus rapide que Grover Underwood.

-Qu'est-ce que t'as biquet ?

Grover grimace à ce surnom dont Percy est bien évidemment à l'origine, le pauvre ne comprenait pas pourquoi Grover mordait dans les canettes au point de les déchirer. Il en avait alors conclu que Grover devait être une chèvre ou un bouc dans une autre vie. Logique, n'est-il pas ?

Le jeune homme observe avec inquiétude le jeune garçon qui semble aller de mieux en mieux avec le temps. Le voilà déjà bientôt en Terminale et lui est un adulte, un homme qui s'est donné pour mission de veiller sur les élèves et plus particulièrement sur cette fratrie dysfonctionnelle.

Il observe le garçon et son cœur se serre en pensant à ce qu'il va devoir lui annoncer. Mais il le faut, avant que quelqu'un d'autre le fasse et détruise un peu plus ce que le garçon a tant mis de temps à construire.

-Bon accouche ! Je suis pas en sucre !

-Tu te rappelle de la rumeur qui...

-Qui m'a forcé à faire mon coming out et à surtout l'assumer parce que c'est elle qui a fait mon coming out à ma place ? *L'ironie est palpable dans le ton du garçon et Grover déglutit* Oui jusque là je crois que je me rappelle.

-C'est quelqu'un d'anonyme sur Facebook qui l'a dit.

Nico demeure un moment silencieux, bouillonnant de rage mais il lui suffit de penser à un visage pour se calmer. Il respire profondément et finit par dire à Grover :

-Et ? C'est fait, c'est fait, j'ai bien envie de lui péter la gueule mais on ne saura jamais qui c'est et ça m'avancera à quoi ?

Il ne croit pas lui-même en ces mots mais il n'a pas le choix car il sait qu'il n'obtiendra jamais réparation. On ne lui rendra jamais cet instant si précieux, on ne lui redonnera jamais la possibilité de se dévoiler seul. On ne lui remettra jamais ce choix qui lui revenait de droit.

Il soupire mais la phrase qui suit l'immobilise :

-Il a recommencé.

Aussitôt ses poings se crispent et son souffle s'accélère à mesure que ces mots s'imprègnent en lui. Il n'entend presque pas les autres mots de Grover :

-Mais cette fois j'ai fait un screen du post avant qu'il le supprime. J'ai un super pote qui pourrait trouver son adresse ip. Si tu veux.

Il ne répond rien, perdu dans ses pensées, ressassant la journée horrible qu'il a passé, à se faire dévisager et insulter, dénigrer par tout le monde... Celle où le soir même il s'est disputé avec son père et a fait la connaissance de ses cousins sur ce pont. Il avait eu envie de courir pour aller le plus loin possible, peut-être prendre un bus et ne jamais revenir mais il y avait Hazel alors il a juste courru sans but avant d'arriver sur ce pont.

-Et qu'est-ce qu'il a dit cette fois ?

Grover inspire profondément, hésitant à mentir mais sachant cela inutile, il lui montre simplement le post sur son téléphone.

les enfants des Trois GrandsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant