Souvenir

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Jimin : J'ai écrit un truc, je peux te l'envoyer ?

Yoongi : Vas-y.

Jimin : Je te préviens j'étais inspiré.

« Je suis fatigué. Je suis seul. Je n'ai vu personne depuis plus de quatre mois en dehors de ma famille, aucune des personnes qui comptent pour moi. Et j'ai tellement hâte de les revoir, mais je commence à me demander si je vais vraiment pouvoir les voir dans les prochains mois ou si je vais encore devoir attendre une année ou deux. Pour l'instant je respecte les consignes, je n'ai invité personne chez moi et je ne retire pas mon masque au maximum, même avec certains que je connais. Mais je vais peut-être finir par craquer. Á un moment je vais en avoir marre d'attendre, de respecter toutes ces consignes sans être récompensé. Parce que d'autres ne les respectent pas.

Je veux juste revoir mes amis, voir la personne que je commence à aimer, sortir quand je veux sans risquer de payer une amende et ne plus passer des semaines voire des mois enfermé chez moi, sans mettre une seule fois le pied dehors. Je suis fatigué, lassé d'attendre quelque chose qui n'arrive pas. Et je voudrais bien essayer de me contenter de ce que j'ai, mais je suis quelqu'un qui aime les contacts, qui rêve de (re)faire des câlins à certaines personnes. Je veux retrouver le contact, le face-à-face qui me mettait parfois mal-à-l'aise avant, l'entourage physique et agréable que j'avais par moment. Je veux retrouver les invitations improvisées chez tel ou tel ami, les après-midis à discuter et rire enfermés dans l'une de nos chambres.

Je connais la solution pour ne plus être lassé, il faudrait que j'arrête d'attendre, que je profite de ce que cette période particulière peut m'apporter. Mais j'ai assez profité, au début je n'étais pas du tout dans l'attente et j'ai largement eu le temps de profiter. Et puis maintenant que cette période a tant duré, elle n'est plus particulière. Ces conditions exceptionnelles sont devenues banales. Et je n'en peux plus de cette banalité, je veux revenir à celle qu'on avait avant.

Ç'a beau être épuisant d'espérer sans résultat, je ne peux pas m'empêcher de continuer. Cette nuit encore, j'ai rêvé qu'enfin je voyais la personne pour qui de plus en plus mon cœur bat. Et il n'y avait ni masque, ni distanciation sociale, ni gel hydroalcoolique. Rien de tout ça. Juste un bon concentré de douceur et de calme. C'était agréable. Et quand je me suis réveillé j'ai eu l'impression de plonger à nouveau dans un cauchemar. C'est un peu comme ça que je vois ce qui se passe en ce moment : un cauchemar dont on n'arrive pas à se réveiller, qui alourdit son poids sur nos cœurs au fil du temps. Ce n'est pas un gros cauchemar, je n'ai pas peur, mais simplement je n'arrive pas à me réveiller. Et c'est bon, j'ai assez dormi là.

Avec ces consignes contraignantes je m'empêche de faire plein de choses, même si elles sont autorisées par le gouvernement. Je sors le moins possible, je ne vois absolument personne, et quand j'ai eu l'occasion de passer une journée dans une grande ville pas loin de chez moi, j'ai refusé uniquement parce que je ne voulais pas porter le masque toute la journée.

Autre chose : en plus de ne pas voir mes amis, on ne s'échange pas de messages non plus, on ne s'appelle pas. Parce que je ne le fais pas, et qu'ils ne le font pas non plus. Et parfois je pense à eux, je me dis qu'il faudrait que je leur envoie un message, que ça fait longtemps... et je ne le fais pas. Mais hier j'ai envoyé un message à un ami. On ne s'était pas parlés ni vus depuis huit mois. C'est beaucoup huit mois. Et on a rien échangé pendant tout ce temps. Pas un message, pas un appel, rien. Il n'est pas sur les réseaux sociaux alors on a vraiment eu aucune forme d'interaction pendant huit mois. Mais hier je lui ai envoyé un message, il m'a répondu, on a parlé un peu et c'était cool. Ça m'a fait du bien. Mais je le sais, là c'est reparti pour plusieurs mois sans nouvelles. Parce qu'on est pareil sur un point tous les deux : on pense à quelqu'un oui, mais on ne pense pas à lui envoyer un message. Je sais qu'avec lui rien ne change même si on ne se parle pas pendant longtemps. C'est l'une des deux seules personnes avec qui je suis sûr de ça.

Au moins le confinement et l'isolement m'ont permis de me développer un peu. Avec tout ça je n'avais plus d'autre choix que de m'exprimer avec des mots, puisque j'étais privé de gestes. Je me suis mis à m'exprimer un peu plus, à oser être honnête, et ça ne m'a apporté que du bon jusqu'à maintenant. J'ai encore des doutes, des angoisses, des peurs, mais je les maîtrise mieux et je suis capable de me dire « ok, ça c'est irrationnel ». Et même si ces doutes, ces angoisses et ces peurs prennent le dessus sur ce que je leur dis, au moins j'arrive à leur dire. J'en étais incapable avant, je me laissais juste engloutir par ces voix dans ma tête qui me répétaient que je me faisais des idées, que j'étais incapable de réussir quoi que ce soit socialement parlant, que personne ne me portait de réel intérêt. Maintenant je peux les contrer, et même si je ne fais pas encore disparaître ces pensées je ne suis plus complètement désarmé face à elles. Et je suis fier de moi bordel. »

Yoongi : Wow, effectivement t'étais inspiré. En plus c'est pas forcément évident d'écrire sur un truc qui s'est passé il y a longtemps comme si tu le vivais encore.

Jimin : J'avais pris des notes, je me suis juste replongé dans mes souvenirs et c'était parti.

Yoongi : Ce bordel s'est fini il y a 2 ans, t'as géré. Au fait tu viens chez moi cette aprèm ?

Jimin : Go. Je serais là dans 20min.

Yoongi : Cool, à tout à l'heure. Il y aura aussi Kook, Seokjin, Namjoon, Hobi et Tae.

Jimin : Ok, à toute. Hâte de vous retrouver :)

Yoongi : Grave.

OS BTSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant