Un soupçon d'Éternité [BxB]

Chapitre 20 : Mélancolie d'automne

Les feuilles de l'automne tourbillonnaient dans l'air froid de Collongerac. L'été avait laissé place à la saison où les arbres revêtaient leurs plus belles couleurs, chassant les après-midi lourds et suffocants du mois d'août.

Habituellement, Octave adorait le mois de septembre. Il le voyait comme un mois plein d'opportunités, de commencement et de nouveaux projets. Pourtant, en regardant le ballet de la nature à travers la fenêtre de la cuisine, il ne ressentait pas le même sentiment d'excitation et de motivation qui l'étreignait chaque année à cette période. La grande saison des mariages touchait presque à sa fin, mais les autres cérémonies auraient dû suffire à occuper tout son emploi du temps.

Et pourtant.

Il n'y parvenait pas. Il réécrivait ses sermons à plusieurs reprises, répétaient les mêmes mots sans s'en rendre compte, raturait, modifiait, se perdait. Rien ne le satisfaisait parce que tout lui semblait étrangement...Creux.
La mélancolie qui avait pointé son nez durant l'été, coïncidant avec l'arrivée de Nox et de Lux, se faisait plus proche, plus persistante. Ses migraines ne le quittaient désormais plus et, s'il préférait le cacher, il était souvent pris de nausées. Il gardait maintenant ses lunettes en permanence pour réduire la fatigue oculaire, mais rien n'y faisait.

Il aurait dû consulter un médecin, il le savait. Pourtant, quelque chose l'en empêchait. Il sentait confusément que son mal ne saurait être guéri à coup de médicament. Sa mère l'aurait sûrement disputé, elle qui, malgré ses croyances, avait également une foi sans faille envers la médecine, même moderne. Mais le pasteur avait bien pris garde de ne pas l'avertir, certain que la petite femme descendrait bien vite à Collongerac pour le forcer à aller se soigner.

Il finit son café qui lui laissa un arrière-goût désagréable sur le palais et se saisit des documents qui attendaient tranquillement sur la table avant de se diriger vers l'Église. Lux devait déjà être là. Ces derniers temps, leurs rapports ne faisaient que s'améliorer. Il avait appris à composer avec le caractère particulier de l'homme qui s'habillait toujours en blanc. Même s'il semblait froid et un peu méprisant, il était d'une gentillesse profonde, surtout à son égard. Octave avait parfois l'impression de discerner un peu plus qu'un simple respect dû à sa fonction. Mais il préférait ne pas s'approfondir là-dessus. Il avait déjà suffisamment à faire avec Nox qui bouleversait son petit cœur fragile. Rajouter Lux à l'équation ne ferait que rendre la situation plus difficile. Et puis, Lux était différent. Contrairement à Nox, il ne dégageait pas ce charisme, cette passion, cette pulsion charnelle qui...

Octave se sentit rougir violemment. En plus de ses malaises dans la journée, il passait des nuits difficiles, peuplées de rêves qu'il s'efforçait d'oublier au réveil. Des rêves qui impliquaient bien plus qu'aller boire un verre ou assister à des concerts au Chat Noir. Bien plus.

Il chassa ces pensées avant de pénétrer dans l'édifice religieux. Lux était assis sur un des bancs face à l'autel et observait d'un air pensif la statuette de Jésus. Octave avait remarqué que, parfois, l'autre homme observait tout le décorum de l'église avec une certaine réserve qu'il ne s'expliquait pas. Lux devait bien être croyant pour occuper son poste n'est ce pas ?

Sans se tourner vers lui, l'homme en question s'exprima d'une voix douce mais suffisamment forte.

-Bonjour Octave. Comment allez-vous ?

Le pasteur ne savait pas comment il faisait mais il semblait toujours le repérer, même quand il n'était pas dans son champ de vision, ce qui l'avait un poil effrayé lors de leurs premiers jours de travail commun.

-Bien merci. Et vous ?

Il n'avait parlé de ses malaises récurrents à personne, et surtout pas à Nox et Lux. Finalement, c'était avec les deux hommes qu'il passait le plus de temps, mais il n'avait pas envie de les embêter avec ce genre de détails sûrement dus à une quelconque carence. Prenait-il assez de fer ? Ou de vitamine ? B,C, D ? Il n'y connaissait rien.