Two girls in a room they might kiss...

2

8h01

Maï Lan

La tête contre la vitre du bus, je regarde le paysage passer. Les immeubles de cette ville sont vraiment moches, j'ai hâte de me casser. Enfin j'aimerais partir mais je sais pas si ça va vraiment être possible, c'est chaud à la maison. Je triture la chaîne qui pend à mon cou et essaye de trouver une distraction. Pas besoin de chercher bien loin. Le mec à côté de moi arrête pas de bouger. Putain mais il pue en plus.

C'est dans cette situation-ci que le port du masque serait bien utile. Il ne connaît pas le déodorant, ou quoi? Je le regarde du coin de l'œil. Au premiers abords il a l'air d'avoir 16 ou 17 ans mais le petit duvet qui assombrit sa lèvre supérieur me dit qu'il doit être en seconde. Son regard croise le mien, il me sourit maladroitement et comme je ne fais rien il tourne la tête. Contente de moi, je souris. Je déteste sourire aux inconnus, celui-ci ne sera pas l'exception à la règle.

Je regarde le message sur le panneau d'affichage du bus "Nous sommes contents de vous revoir". Ouais bah pas moi putain. J'étais bien en confinement, je pouvais rester dans ma chambre au téléphone avec Leslie. Elle me manque beaucoup trop putain. Je l'aime à m'en rendre malade et la savoir loin de moi me déchire le cœur. On s'est rencontrés en 4ème et c'était une sorte d'évidence. C'est trop cliché...

Elle est tellement intelligente, j'adore l'entendre parler de ce qu'elle aime. Et elle en aime des choses. C'est une touche à tout, mais dessiner c'est ce qui lui plait le plus. Je vous jure qu'elle dessine super bien, je dis pas ça parce que c'est ma copine. Et puis elle a de l'ambition et elle me voit dans sa vie future et ça c'est rassurant. Qu'est-ce qu'elle me manque. Elle a déménagé pendant les grandes vacances: son père a eu une promotion ou quelque chose du genre. Enfaite, j'en sais trop rien, elle évite le sujet à chaque fois.

Moi: Tu me manque Shawty (elle déteste quand je l'appelle comme ça), tu rentres pour les vacances?

Je souris quand je vois qu'elle est aussitôt en train d'écrire.

Leslie: Arrête de m'appeler comme ça! Je te l'ai dit 20 fois en plus, ça fait vieux mec quand tu m'appelle comme ça. Je vais essayer, je te tiens au courant. Je t'aime <3

Je me reconcentre sur la vue depuis la fenêtre du bus. Il y a un garçon avec une vieille casquette NYC verte plutôt stylée qui marche à côté d'une fille avec un eye-liner super long. Si seulement je savais faire ce genre de truc. Je ne me maquille jamais. Mamá a bien essayée mais je ressemblais plus à une tafiole qu'autre chose.

Ouais, on dit pas tafiole. Je déteste utiliser ce mot mais en même temps ça me fait marrer.

Je descends du bus juste derrière le crasseux. Malcolm me fait un signe depuis la grille.

- Ca va? T'as la tête dans le cul ou quoi?

Je lui lance un regard noir:

- Tu vas pas commencer mec, 4h de sommeil ça pique.

On rigole puis on rentre dans le lycée.

Malcolm c'est mon meilleur pote depuis tellement longtemps. Ce mec peut avoir l'ai louche aux premiers abords mais il est tellement gentil. Nos pères étaient meilleurs potes. Il se étaient voisins à Puerto Rico, ont grandis ensembles et sont venus ici ensembles. Ils étaient inséparables, tout comme Malcolm et moi. Chaque fois que je viens chez lui, son père nous montre les photos d'eux deux. Ma préférée c'est celle où ils sont devant un restaurant Japonais dans lequel ils viennent de se "taper la meilleure bouffe de leur vie". C'est ma deuxième Famille. Quand j'ai fait mon coming out, Malcolm, ses trois frères et ses parents étaient les premiers au courant. Je ne l'ai jamais officiellement dit à ma mère mais Leslie est venue dormir à la maison tellement de fois que c'est une évidence. Et puis ça se voit comme un nez au milieu d'un visage, vous me voyez dans la rue et il n'y a pas photos quoi.

- Tu as cours à quel étage?

- 4e, j'ai histoire. Et toi?

- Moi c'est là. (Il désigne la porte de sortie) Nos vemos después.

- Vete.

C'est une des seules personnes avec qui je parle encore espagnol.