4, County Line Road

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Une demeure aux allures de villa. Entourées d'un parterre fleuri, des façades vétustes mais dont les coups de pinceaux montraient un entretien manifeste ainsi qu'un changement de la couleur originale. La pelouse scindée en deux, il y avait un chemin faussement marbré amenant à la porte d'entrée. Mina avait ralenti, constatant la vue qui s'exposait dans une splendeur complexe et presque insaisissable. L'édifice se trouvait en lisière de forêt, et la porte d'entrée semblait donner directement accès à la pénombre des feuillages. Pourtant, de cet endroit s'en dégageait une atmosphère bienveillante. Cela avait rassuré Mina qui, bien que peu rêveuse, s'était imaginée une cabane peu accueillante et désuète lorsque sur le chemin, Adam ébruita le fait qu'il occupait une résidence originalement construite pour des bûcherons.

Le seul véritable défaut venait de la porte d'entrée. A quelques centimètres du sol, elle montrait des signes de peinture éculée, comme frottée, s'étant effritée à l'usage. L'homme la poussa vigoureusement du bout du pied, Mina dessina un sourire au bord des lèvres. Ceci expliquait donc cela.

D'un geste de la main, il la convia à entrer. Elle s'arrêta le temps d'un instant sur le pas de la porte, examinant ce qu'elle pouvait entrevoir de l'intérieur avant d'y mettre un pied, puis un second. L'entrée était simple mais accueillante. A chacun de ses pas qui l'amenaient vers la pièce principale, des grésillements sous les semelles, des crépitements d'un plancher contant des intrigues passées, ces cicatrices de passages écrits à même le sol. Adam gara la valise à l'entrée du salon avant d'en allumer la lumière, s'ébouriffa les cheveux puis se tourna vers son invité qui ne tarda pas à porter son attention sur lui.

Maintenant qu'il était sous une lumière plus naturelle et moins jaunâtre que celle du lampadaire de l'avenue, elle en discernait que plus aisément les détails précédemment omis. Il délivrait une prestance singulière, une allure et une posture confiante, comme un rempart robuste, infrangible. La première impression était réconfortante. La deuxième était parsemée de vérités sûrement universelles : Adam était captivant de par son regard imperturbable, il était relativement bien proportionné, séduisant et élégant dans un pull qui laissait entrevoir les traits taillés de son buste. Mina était attentive et scrupuleuse, surtout quand cela apportait une certaine satisfaction aux yeux.
    — Je te propose que tu ailles te reposer, et on pourra se parler demain matin. Sauf si l'impatience te gagne. Ce que je peux totalement saisir.
Il se laissa tomber sur le canapé face à la télévision et à la baie vitrée qui offrait une vue sur la forêt. Sans la quitter du regard, il reprit :
    — Oh et surtout, fais comme chez toi. La cuisine est juste à côté comme tu peux le voir, fais juste attention à l'une des chaise de bar, elle manque de se casser la gueule, et de casser le dos de celui ou de celle qui voudrait se risquer. La salle de bain est à l'étage, il y a des toilettes à l'entrée, d'autres à côté de la salle de bain... Je pense que c'est tout ?

Mina s'était approchée de l'évier de la cuisine et avait rempli un verre d'eau qu'elle absorba en un rien de temps. Elle ne s'était pas rendue compte à quel point elle était assoiffée. Et affamée, compte tenu de la cacophonie qui venait de résonner.
    — Le frigo est tout à toi, répliqua Adam dans une taquinerie amicale, l'intonation goguenarde. Ou tu peux trouver des biscuits et des snacks en tous genres dans les placards.
Sur la pointe des pieds, la jeune femme atteignit une des poignées qu'elle attrapa, ouvrant la réserve de malbouffe. Elle arracha aux vivres stockées un paquet de chips et un de sucrerie, qui suffiraient tous deux à calmer l'estomac capricieux. Devant un Adam silencieux et dont la lucarne n'exprimait aucun jugement, elle s'en approcha en agitant les emballages.
    — J'ai évidemment pris tout ce qu'il y'a de plus sain.
Un semblant de rire étouffé, ce qu'on aimait appeler rire du nez, et un roulement des yeux allant du plafond jusqu'au sol avant de revenir sur elle. Mina pris place sur le canapé, s'assit en tailleur et y logea les trésors dans le creux formé par ses jambes.
    — J'ai attendu plus de quinze ans pour avoir d'autres réponses à des questions auxquels on évitait de répondre, ou même de poser. Je peux bien attendre une nuit supplémentaire.

That Quirky Thing Called Love Où les histoires vivent. Découvrez maintenant