Cette journée avait été éprouvante. Depuis les doléances, j'avais eu du mal à penser à autre chose qu'à tous ces gens qui n'avaient même plus de quoi se nourrir. J'avais confiance en mon mari, je savais que Henry ferait tout pour les aider, mais je n'avais aucune idée de ce qu'il pourrait faire.
Sur le chemin, après une promenade dans les jardins, j'étais avec Diane et Ruby à parler de ce problème quand un valet s'approcha de nous.
- Votre Majesté, mesdames. Madame la duchesse, dit-il en se tournant vers Ruby. Votre fils était debout sur une chaise et est tombé. La gouvernante m'a envoyé vous chercher.
- Oh, je... j'arrive tout de suite, enfin, si...
- Allez-y, dis-je. Diane, vous devriez l'accompagner. Je vais bien trouver ma chambre toute seule, continuais-je avant qu'elles ne puissent répliquer.
Au détour d'un couloir, je vis un homme appuyé contre un mur. Je cru reconnaître le paysan du matin, alors je fis quelques pas dans sa direction.
- Monsieur John Peter, c'est bien ça ? demandais-je.
Il releva la tête, et la violence dans son regard me fit reculer d'un pas. Subitement, l'atmosphère devint lourde et angoissante.
- Ca alors. Sa Majesté la reine se soucie donc du petit peuple.
- Vous faites partie de mon peuple, au même titre qu'un marquis monsieur, si c'était ce que vous vouliez dire.
- Sauf qu'ils ont tout, et que je n'ai rien. Depuis ma naissance, je n'ai jamais rien eu. Alors pourquoi n'aurais-je pas le droit à quelque chose de précieux pour une fois dans ma vie ?
En disant ces mots, il s'était rapproché, l'air menaçant. La crainte m'avait fait reculer de quelques pas mais j'étais incapable de bouger plus, figée par la peur.
- Et bien, on dirait que quelqu'un a perdu sa langue, continua-t-il.
Trois pas de plus, il m'avait bloqué contre le mur. Ses deux mains de part et d'autre de ma tête, j'étais prise au piège. D'un coup, il attrapa mon bras qu'il retourna dans mon dos. Son autre main sur ma bouche étouffa mon cri de douleur.
Il me guida à l'autre bout du couloir et me fit entrer dans une pièce mal éclairée.
- Voyez madame, tout le monde sait que le roi et vous vous aimez. L'amour est quelque chose qui n'est pas censé exister pour vous. Vous avez tout le reste, l'amour était à nous. Seulement, vous n'avez pas respecté cette règle. Je suis pauvre, j'aurais dû y avoir droit. Malheureusement, je suis le fils aîné dans ma famille. J'ai toujours dû rapporter des sous à la maison. Et quand un homme du village est venu voir mon père en lui promettant sa ferme contre la main de sa fille, qui s'était déshonorée, pour moi, mon père a accepté. Elle a eu une fille peu après notre mariage. Je sais qu'elle n'est pas de moi. Tout le monde sait qu'elle n'est pas de moi. Ma vie est horrible. Je n'ai même pas le droit à l'amour. Alors aujourd'hui, je veux infliger à votre mari ce que l'on m'a infligé à moi. Je veux qu'il connaisse la douleur d'avoir un enfant aîné qui n'est pas à soi.
- Non, pitié, non, pleurais-je.
- Oh, mais comme c'est touchant, la petite reine pleure. Mais la reine est ici, toute à moi.
A ces mots, il tira d'un coup sec sur ma jupe, si fort qu'il la déchira. Un sanglot m'échappa. Je revenais d'une promenade, j'avais donc une jupe bien moins encombrante qu'en tant normal, avec uniquement des jupons et aucun cerceau. Il n'aurait aucun mal à en venir à bout. Je tentais de me débattre, mais il était plus fort que moi. Il retourna à nouveau mon bras derrière mon dos, plus fort qu'avant, et je pu entendre un craquement. Il n'eut pas le temps de remettre sa main sur ma bouche et mon cri résonna dans toute la pièce. J'étais terrifiée. Mes joues étaient inondées de larmes. La porte s'ouvrit d'un coup, et j'entendis une femme partir en courant et hurler à l'aide. Son appel fut suivi par les bruits de bottes des gardes qui arrivaient dans la pièce. En quelques secondes, l'homme fut projeté en arrière et maintenu loin de moi. Je tremblais de tout mon corps.
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Elaine et Henry
RomanceElaine est devenue reine d'Angleterre après son mariage avec Henry. Deux ans et neuf mois après le mariage, aucun enfant n'est encore né, et Elaine a déjà fait quatre fausses couches. Le problème ? Une ligne dans leur contrat de mariage indique cla...