Témoins des Cycles

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Aratt se pencha vers la fenêtre afin de voir le quartier en contrebas. Là où d'ordinaire circulait un flot de gens continu dans les rues et sur les plateformes suspendues, il n'y avait plus que le silence. Même les panneaux publicitaires et d'enseignes surplombant le tout étaient éteints, donnant aux hauts bâtiments un aspect terne et presque menaçant.

C'était inédit et les habitants du bloc ne savaient pas trop quoi en penser.

- Ma puce, appela Aratt, tu as fini ton sac?

Une petite voix lui parvint du fond de l'appartement, elle semblait encore en train de rassembler ses affaires. Pour elle c'était comme s'ils partaient en voyage.

- Dépêche toi ma chérie, poursuivit Aratt en essayant de paraître le plus calme possible.

Rien de ce silence ne le rassurait, cela avait commencé au milieu d'une journée ordinaire, tous vaquaient à leur petit quotidien et c'est progressivement que des consignes leur avaient été imposées. D'abord minimes, quelques restrictions sur les connexions aux réseaux extra-stellaires, et de plus en plus strictes au bout de quelques jours. Les vols spatiaux avaient été limités puis rapidement suspendus et enfin les vols orbitaux et continentaux à leur tour. 

A l'aurore ce matin, les hauts parleurs diffusèrent l'ordre à la population de rester confiné à domicile. Depuis, plus rien, un silence oppressant avait laissé place aux habituels bruits de la ville, les quelques rares mouvements que l'on pouvait apercevoir provenaient des véhicules de patrouille des pacificateurs et des curieux qui observaient depuis leurs fenêtres.

Aratt, fut tiré de ses pensées par l'arrivée de sa fille dans la pièce, lui annonçant fièrement que son sac était prêt. Il vérifia le contenu et constata qu'elle avait bien pris en compte ses indications. Il referma le sac et entreprit de faire une énième vérification nerveuse de son propre bagage, il le referma une nouvelle fois convaincu que ça suffirait. Suffirait à quoi d'ailleurs ? Il n'osait pas vraiment y songer.

- Pourquoi tout est éteint papa ? Demanda sa fille en regardant par la fenêtre..

- Éloigne-toi de la fenêtre Lisa, commença-t-il, il n'y a rien à voir dehors.

- Parce que tout est éteint ?

- Oui, c'est ça. Aller, vérifie ton sac, tu es certaine d'avoir tout pris ?

Sa fille fit un moue hésitante puis se dirigea vers son sac et entreprit de vérifier ses affaires le plus sérieusement du monde. Voilà qui la tiendrait un peu occupée, il fallait qu'ils prennent leur mal en patience.

- Papa ? l'appela Lisa au bout d'un moment.

- Oui ma puce ?

- Quand est-ce qu'on part ?

- Quand les autorités nous dirons qu'on peut.

- Les monsieurs en orange ?

- Oui, les messieurs en orange.

Aratt était toujours surpris par l'innocence d'un enfant qui lui permettait de tout accepter comme étant "normal". Les pacificateurs portaient en permanence des masques qu'il trouvait plutôt flippant pour sa part, mais sa fille se contentait de voir de simples gus en orange.

- Maman va venir avec nous ? Demanda soudain la petite fille.

Aratt se mordit la lèvre, cette garce avait depuis longtemps préféré son ascension politique à sa propre fille, il fallait qu'il trouve les bons mots.

- Je suis désolé ma chérie, dit-il hésitant, tu sais, ta mère a beaucoup de travail.

- Mais ça fait déjà beaucoup de temps qu'elle travaille !