Aubéline était assise, les pieds ballants, fixant le miroir de la coiffeuse. Une autre petite fille pâle l'observait, des yeux : bleus sans éclat et entourés de cernes sombres. Une petite nymphette se battait avec les longues mèches cuivrées de cette dernière, tentant de les coiffer maladroitement en plusieurs petites tresses. Elle portait une robe noire un peu trop grande pour elle. Un petit arbre doré dans un cercle était cousu par dessus son coeur. Elle n'avait pas arrêté de passer la main dessus mécaniquement toute la matiné.
"Bon, ce n'est pas un chef-d'oeuvre, dit la nymphette d'une voix claire. Mais ça fera l'affaire. "
Aubéline porta une main sur sa tête: elle n'aimait pas. Seule sa mère savait la coiffer comme elle l'aimait. Elle aurait aimé défaire toutes ces tresses, les arracher de sa tête. Mais avant qu'elle ne puisse faire quoi que ce soit, quelqu'un toqua à la porte. Un homme entra: Aubéline le reconnu tout de suite, c'était John, l'homme qui était venu ce jours là...C'était la seule personne qu'Aubéline avait vue durant ces derniers jours en dehors de la petite nymphette. Il ne parlait jamais beaucoup, ses yeux gris et sévères suivaient les mouvements de la jeune fille avec attention. Il lui apportait ses repas et restait avec elle pendant qu'elle mangeait. Mais Aubéline ne lui avait encore jamais adressé la parole.
"C'est bon Lara, tu peux rejoindre les autres dans le vestibule, dit-il à l'intention de la nymphette.
Celle-ci aquiésca et s'envola hors la pièce après un dernier arrangement sur l'une des tresses d'Aubéline.
"Tu es prête? Il demanda. Aubéline ne répondit pas, elle sauta simplement de sa chaise et alla se placer à côté de lui. Elle le suivit à travers les couloirs parfois tortueux et mal éclairés, d'autre fois décorés avec élégance à la lumière des chandelliers. Ils arrivèrent enfin au vestibule: Aubéline leva les yeux sur l'arbre doré dont les fines branches ressemblaient à des doigts essayant d'atteindre le ciel. Sa lumière claire était chaleureuse et la jeune fille aurait aimé se coller contre le tronc épais. Plusieurs autres hommes en noir étaient présents dans le vestibule, chacun portant sur sa poitrine un arbre doré similaire à celui de John, à celui de son père... Aubéline n'avait jamais vraiment compris ce que son père faisait. Il n'était pas souvent à la maison, et sa mère lui disait qu'il protégeait le royaume. Elle avait pensé qu'il était soldat, mais sa mère lui disait "Il est Elitien, Papa. Il nous protège de dangers encore plus grands que les malfaiteurs et la guerre." John s'agenouilla devant la petite fille et la prit doucement par les deux épaules:
"Ecoute-moi bien, Aubéline. Nous allons quitter l'Ecole. Tu ne dois t'éloigner de moi ou des autres Elitiens sous aucun prétexte. Lara sera aussi avec toi en permanence. C'est très important, tu as compris?
Aubéline hocha la tête. Le groupe se mit en route. La nymphette Lara voletait autour de sa tête et elle était entourée par un mur d'hommes en uniforme noir. Elle ne put entrevoir que temps en temps le détour d'un couloir, l'embrasure d'une porte ou les branches sèches d'un arbre. Après un rapide passage dans l'Eau, ils se retrouvèrent à l'extérieur d'après l'air froid mordant. John enveloppa la petite fille dans un épais manteau noir, qu'elle ressera tout de suite sur ses épaules.
Le mur noir se sépara enfin devant Aubéline: elle put voir le paysage devant elle, froid et aride. La neige avait fondue, laissant place à une végétation sèche, morte et gelée par le vent. Ils se trouvaient sur une petite colline, devant un arbre dont les branches noires et tordues zebraient le ciel au dessus d'eux. Plus loin en contrebas, il y avait un manoir en ruines, les murs auparavant blancs salis par la suie. Son manoir, pensa Aubéline. Soudain, les flammes s'élevèrent à nouveaux avec un craquement sinistre. Aubéline ne pouvait pas détourner les yeux. Les battements de son coeur s'accélèrèrent et elle aggripa le pan de son manteau dans son poing tremblant. Elle fixait le creux où s'était trouvé la porte d'entrée. Une figure en sortait en rempant, de longs cheveux noirs étalés autour d'elle, ses bras fins tendus vers la jeune fille, suppliants...
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Le chant des Chrysanthèmes T1
FanficL'École de l'Élite: prestigieuse, difficile, voir mortelle, mais la clef pour accéder à un pouvoir et à une connaissance immense en devenant Élitien. L'École de l'Élite n'est en rien obligatoire, au contraire, l'épreuve pouy accéder est considérée c...