𝘾'𝙚́𝙩𝙖𝙞𝙩 𝙟𝙪𝙨𝙩𝙚 𝙥𝙤𝙪𝙧 𝙧𝙞𝙧𝙚

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𝟼 𝔧𝔲𝔦𝔫 𝟸𝟶𝟸𝟷



J'avoue, j'avais peur. J'étais terrifiée, même. Je ne voulais plus y retourner, je ne voulais plus avoir à me confronter à eux. J'étais arrivée au stade ou l'angoisse me nouait l'estomac avant même d'avoir mis les pieds là-bas. Mais avais-je eu, ne serait-ce qu'une seconde, le choix ? le choix de partir ? Non. Bien sûr que non. Ce n'est pas comme cela que les chose marchent.

Alors je n'ai jamais rien dit. Honnêtement, je pensais que ça allait passer. Je me contentais de fermer les yeux sur la situation et de sourire en leur présence, en faisant comme si leur comportement ne m'atteignait pas. Je ne voulais pas empirer mon cas, je ne voulais pas m'attirer encore plus leur foudre.

Ça ne me dégoute rien qu'en y repensant.

Je m'étais accrochée à l'espoir qu'ils finiraient par se détourner de moi pour se trouver une autre victime, ou peut importe quoi, pour se défouler. Leurs regards moqueurs constamment rivés sur moi me pesaient presque autant que les messes basses proférées à mon sujet. En fait, les insultes directes et les coups me semblaient même être quelque chose de moins difficile à supporter. Au moins là, je n'avais pas à faire comme si je n'avais rien entendu. Le message était clair, net et précis : ils me haïssaient. Mais ce n'est pas pour autant que je me défendais, non.

J'avais trop peur de leur représailles, peur d'encore plus attiser leur haine à mon égard. Ils étaient si nombreux, et tellement plus fort mentalement que moi à ce moment. Je ne faisais pas le poids. J'étais seule.

Ou peut-être que je le méritais tout simplement ? c'est la chose dont je m'étais convaincue quand c'est arrivé. J'étais persuadée être traitée ainsi à juste titre. Mais parallèlement, je continuais désespérément à me demander ce que j'avais fait de mal. Mais quoi ? quoi, bon sang ? Je m'étais forcée à être une personne la plus agréable possible, à me plaindre le moins possible et à garder pour moi mes avis trop tranchés. Alors, qu'avais-je fais de travers pour subir ces humiliations à répétition durant près d'un an ? 

Je ne compte même plus les soirs d'insomnies ou je suis restée dans le noir, à simplement repasser en boucle les évènements de la journée que je venais de passer. Si au début je pleurais beaucoup, j'en suis arrivée à un stade ou même cela me semblait devenu normal. Ce moment-là me vidait complètement de ma tristesse, comme pour faire de la place à celle qui allait arriver le jour suivent. Et cela ne ratait pas.

« Tu n'avais qu'à en parler. »

En parler ? et avec qui ? et pour dire quoi ? qu'on me harcelait ? sur le coup, je ne m'en rendais pas vraiment compte. Ce mot me paraissait trop fort pour quelque chose de ce genre. Outre le fait que je n'avais plus confiance en personne, en parler me paraissait être comme une ultime humiliation. Comme si j'étais une petite gamine incapable qui avait besoin des adultes pour me protéger.

J'étais vraiment stupide, parce que dans un sens, c'est exactement ce que j'étais. Une gamine qui se laissait faire par quelques pauvres diables qui se croyaient tout permis.

J'ai fini par en parler. C'était bien plus tard, quand je croyais que ce n'était plus qu'un lointain souvenir qui ne me blesserait plus. C'est drôle, mais j'ai beaucoup pleuré. Oui, je trouve ça drôle. Parce que je me suis rendu encore plus rendu compte à quel point j'ai sous-estimé ce qui s'était passé. Des séquelles, j'ai compris que j'en garderais à vie le jour où j'ai chialé rien qu'en évoquant une infime part de ces souvenirs. Mais vous savez ce qui est encore plus drôle ? c'est ce qu'on m'a rétorqué.

« C'était juste pour rire. »

A l'encre de mes larmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant