Chapitre 3

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L'Échos de l'épopée

Un nouveau scandale secoue le Péloponnèse ! Alors qu'elle venait de terminer le deuil de feu son mari, l'illustre Ménélas, l'éplorée Hélène se retrouve chassée de la ville où elle fut reine. En effet, une grande partie de ses anciens sujets n'avaient jamais accepté son retour, arguant que le magnificent Ménélas aurait dû la tuer dès lors qu'il l'avait retrouvée. L'ancienne souveraine s'est donc vue signifier que rester un jour de plus dans la cité signerait son arrêt de mort. De plus, ce groupe de citoyens rancuniers ont rajouté qu'ils étaient bien bon de lui laisser une chance de survivre.

La malheureuse souveraine se retrouve donc sur les routes de l'exil, cherchant un lieu ou finir sa vie. C'est beaucoup pour une seule femme, déjà enlevée deux fois que de devoir trouver, seule, une terre d'accueil.

Polymnia

***

Ainsi donc, tout le monde me prend en pitié. C'est bien la première fois que cela m'arrive. Il a donc fallu attendre la mort de mon époux pour qu'ils se souviennent que j'existe de part moi-même. Je ne sais pas si cela doit m'énerver ou si, au contraire, je dois être reconnaissante parce que cela m'arrive au moins une fois. Mais pourquoi me sous-estimer ? Ils disent très bien que j'ai déjà traversé beaucoup d'épreuves, je me suis quelque peu habituée. Même si c'est impossible de l'être totalement.

Le plus difficile sera de trouver une ville où l'on voudra de moi. J'ai causé la mort de tant de personnes qu'aucun lieu n'a été épargné par le deuil. Tous auront la mémoire d'un fils, d'un frère, d'un mari que j'ai tué. Je sais qu'ils vont tous me rejeter, c'est normal.

Ils ont le droit de m'en vouloir. Le contraire serait inquiétant.

C'est même enivrant de me dire que c'est moi que l'on rejette. Moi en tant qu'Hélène. Pas en tant que femme de Ménélas ou de Pâris. Pas en tant que fille de Léda. Pas en tant que sœur de Castor et Pollux. Je suis moi.

Mais à quel prix ? Des milliers de vies brisées, une ville détruite. Tout ça pour mon petit plaisir. Non, jamais je n'aurai voulu ça. Il m'aurait suffi de renvoyer Pâris, de lui signifier que je n'étais pas intéressée. Et d'attendre que mes sentiments retombent. De rester à la place qu'on m'avait désignée.

J'ai honte d'être heureuse que l'on me voit en tant que moi. Parce que cela implique des morts, des viols, des errances, une nouvelle guerre.

J'aurais juste dû dire non au lieu de dire oui.

Les Polymnies d'HélèneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant