-3-

3.4K 201 143
                                    


Lorsque Zoro se réveilla, une veste le recouvrait, une veste à l'odeur de cigarette et d'épices. Saisi d'un pressentiment, il se redressa brutalement et se tourna pour découvrir le cuisinier de l'équipage adossé au mât, jambes appuyées sur le rebord du nid de pie.

Sanji.

Quand il entendit le mouvement du sabreur, ce dernier cessa de fixer l'horizon pour porter son regard vers son nakama. Zoro l'examinait avec l'expression de celui qui exige des explications.

« On m'a dit que tu faisais le guet. Comme je n'ai pas envie qu'on se fasse surprendre par un bateau ennemi, je suis monté vérifier que rien n'approchait.

- J'aurai donné l'alerte si c'était le cas.

- Tu dormais. » asséna impitoyablement Sanji.

Zoro se tut un moment, puis il souleva entre le pouce et l'index la veste noire qui lui avait tenu lieu de couverture avec une mine circonspecte.

« Tu grelottais. » se justifia Sanji en évitant le regard blasé de l'unique œil du sabreur.

« Je grelottais ? » s'exclama Zoro.

Il repoussa la veste du cuisinier d'un geste sec et retira son T-shirt, exhibant ainsi la large cicatrice qui lui barrait le torse.

« Je n'ai jamais froid. » grogna-t-il en repliant ses jambes en tailleurs.

Mais qu'est-ce qu'il cherche à prouver ? se demanda Sanji en se détournant pour ne pas s'attarder sur les muscles saillants du sabreur. Il aurait voulu dire quelque chose, entamer une discussion, voire même reprendre leurs interminables échanges d'insultes, mais il ne parvenait plus à dire un mot.

Et il avait peur de ce qui adviendrait lorsqu'il parlerait à nouveau.

Trois mots, ce n'était pourtant pas grand-chose... Mais il était tout aussi effrayé à la perspective de les laisser échapper par inadvertance que de les garder à jamais pour lui. Le pire était la honte qu'il ressentait quotidiennement, la honte de ses sentiments autant que celle de ne pas les assumer.

Toutes ces contradictions le bloquaient, l'empêchaient de laisser libre cours à ses émotions.

« Hé .»

Le blond jeta un regard à son coéquipier.

« Ça va ? »

Sanji se renfrogna. Savoir que lui le connaissait si bien achevait de renforcer son amertume et l'accablait de plus belle.

« Pourquoi ? » demanda-t-il tranquillement, n'espérant qu'une chose : nourrir la conversation avant qu'elle ne s'éteigne trop vite.

« Pourquoi tu ne réponds pas à ma question ?

- Pourquoi tu évites la mienne ?

- Qu'est-ce que ça peut te faire ?

- Arrête d'esquiver ! » explosa Sanji.

« Ok, tu vas bien » conclut Zoro.

« N'importe quoi. » soupira le cuisinier.

Puis il reprit en grommelant, parce qu'il sentait un silence gênant sur le point de s'installer :

« En quoi est-ce que ça peut bien t'intéresser, de toute façon ? »

Une fois de plus, Zoro ne répondit rien, se contentant de fixer Sanji de son regard pénétrant.

« Idiot », murmura-t-il en se levant avant d'enjamber le rebord et de se glisser dans les cordages.

« Tu pars ? » demanda le cuisinier. Il tentait tant bien que mal de maîtriser la déception qu'il sentait poindre en lui.

« Tu prends la relève, non ? C'est pour ça que tu es venu. Pas besoin d'être à deux, je vais me coucher. Bonne nuit, cuisinier du dimanche. 

- Bonne nuit, marimo. » souffla Sanji après un temps de silence à la silhouette aux katanas qui descendait vers le pont. « Je t'aime. »

Son cœur manqua un battement lorsqu'il vit de sabreur interrompre sa descente l'espace d'une seconde. Quand il repartit sans un regard vers le haut, Sanji reprit son souffle. Il ne l'avait pas entendu. Le blond reporta ses yeux vers le large. Il se haïssait à la fois pour avoir dit cette phrase et pour ne pas l'avoir prononcée assez fort.

« Raah » pesta-t-il en se couvrant la tête de ses mains.

Ce n'est qu'en récupérant sa veste qu'il s'aperçut que le T-shirt de Zoro était encore là.

L'anniversaire (Zosan)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant