2. Annulés.

35 5 5
                                    

- Eh les premières années, attention !

Je regarde par-dessus mon épaule, interloquée par ce qu'il se passe derrière. Mes yeux se posent sur les élèves de terminal en filière générale. Les filles de la classe et moi nous regardons sans rien dire, et je finis par me retourner vers le début de la queue. Le brouhaha ambiant emplit la cafétéria comme tous les jours, et les élèves se poussent encore et encore. Une pression dans le dos me fait basculer vers l'avant, donc je me cogne contre l'épaule de Aoyama en laissant échapper un petit grognement. L'heure du repas a toujours été mouvementée, sachant que j'ai la fâcheuse manie d'arriver à l'heure de pointe de tous les autres élèves. J'attrape un plateau, j'avance pour me servir en gardant le silence, et je me presse pour ne pas gêner davantage. Puis je cherche mes camarades de classe du regard, à travers la cafétéria, jusqu'à ce que Mineta me fasse signe: alors je me dirige vers eux en laissant de la place aux filles. Une fois bien installée, je me jette limite sur mon bol de riz, sans vraiment écouter les discussions sur la leçon d'anglais de ce matin. C'est vrai quoi. On est en pause, je n'ai pas forcément envie de parler d'exercices et de leçon. Un coup de coude au niveau de mes côtes me ramène à la réalité, mon regard se pose sur Ochaco qui me regarde avec de grands yeux.

- Tu avais faim à ce point ? demande-t-elle avant de percer sa briquette de jus avec sa petite paille.

- Mmmmh la matinée était longue. En plus je dois prendre des forces pour vous mettre une dérouillée en athlétisme. Je n'ai même pas beaucoup mangé...

Son rire me parvient alors qu'elle me voit engloutir mon repas, je n'ai rien d'autre à dire, je ne suis pas très bavarde, même en face de personnes que j'apprécie. Une fois mon repas terminé, je me mets à observer les gens, en attendant que mes amis terminent aussi. Nos deux délégués nous rejoignent à la fin de la pause, l'air plus sérieux qu'à leur habitude. Nous apprenons que les cours de "pratiques" sont annulés cet après-midi, ce qui nous laisse plus de temps pour préparer nos exposés et prochaines rédactions. Sans attendre la fin des explications, des consignes ou autres informations, je me lève plateau en main et débarrasse avant de quitter la salle sous les appels de lida. 

Mes pas me guident vers la salle des professeurs, dans le silence le plus total. Mon corps ne réagit plus au moment où j'arrive devant la porte. Les couloirs me semblent étonnement vides aujourd'hui, et je trouve le fait que les cours de cet après-midi soient annulés assez étrange. Au final, mon dos trouve le mur pour s'y reposer, en attendant qu'un adulte sorte. Ils doivent être en réunion, alors j'en profite pour me perdre dans mes pensées et les souvenirs de ce qu'il s'est passé ce jour-là me reviennent. Après tout, la mémoire ne filme pas, elle photographie. Des flashs me viennent, le son du klaxon retentit et brouille mes sens. J'ai l'impression de sentir cette pluie me glacer jusqu'aux os, d'entendre les pas précipités des passants sur les trottoirs, les roues qui crisses sur les flaques d'eau et le béton trempé. J'essaie de me concentrer encore plus pour mieux percevoir ce que j'aurais pu oublier. J'attends, je me souviens. Le poids-lourd qui fonce droit sur moi, aucun conducteur, rien. La pluie, les klaxons, les pneus, les pas. Encore et encore. Tous ces détails envahissent mes sens, et j'ai l'impression d'y être de nouveau. Une voix me tire de ma transe, me faisant subitement ouvrir les yeux. Mon attention se reporte peu à peu sur mon professeur principal qui me dévisage longuement sans rien dire. Je n'ai pas besoin de parler, puisqu'il m'invite déjà à entrer dans la salle de professeurs avant même que je ne me décide à ouvrir la bouche. Une fois la porte refermée derrière moi, il s'installe contre le mur, le regard posé sur moi. J'observe les professeurs qui stoppent peu à peu leurs discussions en se rendant compte de ma présence, et le silence se fait presque brusque. Visiblement, ils semblent attendre que je leur explique la raison de ma visite.

- Mademoiselle Horribe ? fit soudainement Present Mic d'une voix forte.

- J'aimerais parler des véhicules sans conducteur. Il y a eu un incident non loin de l'établissement scolaire, non ? Puis un peu partout dans la ville, il me semble. Cette histoire me préoccupe assez.

- Tu n'es pas censée te mêler de cette affaire.

- L'agence de Nighteye n'a pas été mise sur l'affaire, je suppose, et il ne souhaite pas discuter de ça avec moi.

- Tu devrais l'écouter pour une fois. Pourquoi tu tiens à t'attirer une nouvelle fois des problèmes...

- J'ai failli me faire percuter par l'un de ces fameux véhicules. Tout comme les autres passants, d'ailleurs. Excusez-moi mais heureusement que je me trouvais au milieu du passage piéton à ce moment-là. J'aimerai juste être au courant, cette histoire me préoccupe...

Une main se pose sur mon épaule, alors quand je relève la tête, mon regard croise celui du Symbole de la Paix, qui me sourit avec gentillesse. Cette expression et ce sourire me mettent en colère, sans que je ne sache pourquoi. Je ne veux pas que l'on me regarde ainsi. Mes yeux en disent long à cet instant, il se doute que peu importe ce qu'ils me diront, j'agirai de mon propre chef. Mon professeur principal me fait signe de le suivre en dehors de la salle. Une fois dans le couloir, il me jette un regard à la fois sévère et désabusé, sûrement à force de me voir foncer vers les problèmes à chaque fois.

- Tu vas t'attirer des ennuis, et tu le sais.

- Plus fort que moi.

- Il y a eu plusieurs incident du type, ces derniers jours. Des scooters, des poids-lourd, des voitures, des vélos électriques et autres. 

- Certains sans conducteur ?

- Tous. Aucune trace de conducteur. Je ne souhaite pas t'y mêler, mais il faudrait que tu en parles avec ton mentor afin d'obtenir une autorisation. Tu n'es pas sous ma responsabilité, donc je ne peux pas te la fournir pour cette affaire. Mais il va vraiment falloir que tu arrêtes de foncer vers les problèmes.

J'acquiesce en silence, profitant de la sonnerie de l'établissement et de l'agitation dans le couloir pour disparaître dans les différents groupes d'élèves. Je me retrouve à dévaler les escaliers, sachant pertinemment que je me mêle encore de ce qui ne me regarde pas. Je file vers ma salle de classe, m'attendant à retrouver mes camarades de classe, mais au lieu de ça, je retrouve un salle presque vide, où seul quelques personnes s'y trouve. Je passe la tête à l'intérieur, Mina, Sero, Kaminari, Kirishima et Bakugo s'y trouvent. Je ne m'attendais pas à les trouver encore ici.

- Tiens, vous êtes encore là ? je dis enfin en les surprenant.

- Saori ! Je pensais que tu avais retrouvé Momo, Ochaco et Kyoka ou que tu étais rentrée chez toi. s'écrit ma camarade.

- Ah elles sont parties ? J'ai du aller voir un truc. 

- Tu veux rester avec nous ? On fait l'expression d'anglais ! Enfin, là on va chez moi pour le faire.

- Oui pourquoi pas, attendez, je me joins à vous.

Je me faufile entre les tables jusqu' atteindre la mienne, et j'attrape mon sac. J'entends la chaise qui crisse devant moi, puis un léger grognement me parvient. Mon regard se pose sur le garçon à côté de moi, et un sourire mesquin se dessine sur mes lèvres. Ma main percute son dos avec puissance, le claquant assez fort sans pour autant lui faire vraiment mal. Son expression ne présage rien de bon, mais le rire de Mina et Kaminari retentit depuis le couloir. Je m'élance avant de me prendre une chaise en plein face, presque hilare en entendant des pas précipiter me talonner.

- Je t'ai à peine touché-

- Sale gamine de...


Alone.Where stories live. Discover now