Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement de le faire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende
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Je vous ai déjà parlé de Simon non ? Le petit riche qui reprend la boîte de parfum de Mario.
Son visage fin parfait, encadré par des cheveux blond platine tout aussi parfaits. Ses lèvres fines, rosées, presque aussi parfaites, ses sourcils bien épilés, ses beaux yeux brillants.
Sans parler de son corps de rêve : grand, fin, musclé comme il faut, des épaules pas trop larges, des pieds pas trop grands, des mains fines.
La liste de tous ses points forts pourrait durer longtemps. On pourrait presque croire que je suis amoureux de ce mec à m'entendre parler. Ce qui n'est pas le cas. Enfin, je suis peut-être — peut-être — amoureux de son physique, mais bien entendu, l'extérieur ne fait pas tout !
Parce qu'à l'intérieur, Simon fait peur à voir.
Je ne vais pas commencer par parler de son incessante, insupportable manie de mâcher un bonbon à la menthe en permanence. Son goût trop prononcé pour les parfums de luxe, ou son air condescendant. Son comportement narcissique envers le reste de la populace. La classe basse.
Comme on dit dans le jargon.
Je suis appuyé contre le mur en face du magasin de cosmétiques de Mario. Enfin de Simon désormais.
En repérage pour la fête. La fête de retraite de Mario.
Je vois Simon la grande perche qui s'affaire derrière son comptoir : remettant en place chaque pot de parfum, il s'assure que tout est en ordre. Ce gars est un grand maniaque.
Quelques minutes plus tard, alors que je commence à pioncer, un hurlement retentit, me réveillant en sursaut.
Mon corps en profite pour tomber du mur contre lequel je me tiens.
Je m'écrase par terre sans aucune grâce, reste au sol quelques secondes, gémit en serrant les dents.
Puis regémit, pour la forme.
Je m'élance ensuite dans l'allée pour déterminer la source du bruit parce que damn la personne m'a cassé quelques tympans !
Un nouveau cri retentit alors que je suis arrivé au bout de la rue de la parfumerie, une dizaine de mètre plus bas que moi. Je suis allé trop loin.
Je rebrousse chemin (toujours courant (et suant)) avant de prendre la rue perpendiculaire d'où le cri vient. C'est une allée sombre, mal éclairée, les quelques magasins la peuplant fermée. On se croirait dans un film.
J'ai peur.
Et comme le courage n'est pas ma qualité la plus dominante, et que je tiens quand même un peu à la vie, désolé de vous ruiner la lecture mais je m'enfuis.
Je ne tiens plus à découvrir la source du bruit avec tant d'impatience maintenant que ma vie est en jeu !
Je sors de la ruelle sordide en soufflant de soulagement, quand une main puissante m'attrape par le col, manquant de m'étouffer.
Je suis soulevé de terre — c'est superman le mec ? parce que je pèse quand même mon poids — et prononce des paroles étranglées.
— On t'a déjà dit que quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement de le faire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ?
Je rêve. Je viens de tomber sur un gars de la police pfffff.
Ne sachant quoi répondre, je m'abstiens et jette un regard de chien battu au policier. Son visage est enfantin, il a des traits ronds et des cheveux blonds qui lui retombent devant le visage.
Son air s'adoucit, peut-être amadoué devant mon jeu d'acteur digne d'Hollywood.
— Allez gamin (pourquoi tout le monde s'entête à m'appeler gamin ?) à titre de punition tu vas venir avec moi et m'aider là-bas. D'après le son des cris, qui sont très aigus et sonores, je pense que nous avons affaire soit à un petit vol, soit un cambriolage à main armée. Arme blanche, ne t'inquiète pas !
Après son explication, je suis tout sauf rassuré. Mais comme je risque la prison — voir pire : l'amende ! — je me tais et je le suis.
Nous avançons prudemment dans la ruelle, jusqu'à arriver à un cul-de-sac. Je me retourne vers le policier, et voit qu'il regarde vers la droite.
Un homme se tient debout, les mains sur les côtés de la tête, le corps secoué par des tremblements magnitude 9.
Il relève la tête en poussant un cri de gorille en train d'accoucher.
— AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAaaaaaaaaah !
Simon ?!