Épisode 5

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Douze heures venaient de s’afficher sur l’écran du portable de Catherine. L’heure filait à une vitesse folle. C’était le temps de la pause, le moment favori de la jeune femme. Trente minutes. Rien que cela. Juste le temps de manger quelque chose et de boire un coup. Pas plus. Des fois, lorsque Catherine ne mangeait pas, soit elle était au téléphone avec un proche soit elle discutait avec ses collègues. Parfois, les trente minutes étaient comparables à une heure. Bien souvent, elles équivalaient à dix ou quinze minutes. Catherine détestait alors ces moments où l’aiguille de l’horloge était en mode lièvre. Par contre elle adorait ceux où les secondes paraissaient interminables comme si elles étaient parents de la tortue.

   Catherine Deschamps était avocate, la seule de sa famille. La seule mais pas la première, elle avait dû certainement avoir dans le passé un ancêtre qui eut étudié le Droit. Quant aux autres membres de la famille, ils s’étaient éparpillés dans plusieurs autres facultés. C’était donc possible de trouver des médecins, des ingénieurs, des architectes, des mécaniciens et tout. Mais tous ensemble ils étaient parvenus à entretenir l’héritage que leur avait laissé leur aïeul, à savoir la Maison Henri Deschamps. Cette dernière passait de main en main, chaque héritier jouissait des actions pendant un nombre de temps. Ainsi, tout le monde aurait son heure de gloire. À présent c’était un dénommé Robert qui en assurait l’administration.

   Quant à Catherine, elle travaillait dans une sorte d’association, MFHL qui se définissait en Mouvement des Femmes Haïtiennes pour la Liberté. C’était un Mouvement entretenu par une ONG. Elle y occupait le poste de superviseur. Leur travail consistait à aller porter assistance aux prévenus et détenus qui n’avaient pas la chance d’avoir un défenseur. Tout cela aux frais de l’association, les concernés n’avaient rien à donner en retour. Cela ne s’appliquait pas aux personnes dont les dossiers étaient déjà étudiés par un avocat.   Catherine, elle, ne se rendait pas tout le temps au tribunal, la majorité du temps elle se trouvait au bureau. Spécialiste en matière pénale, les rares fois où elle se déplaçait c’était pour ses affaires ou ses dossiers personnels. Sinon elle restait là, scotchée à son bureau et sa paperasse.


   L’on avait fini de manger, le temps de la pause courait alors à sa fin. Une discussion battait le plein au bureau. L’on parlait de mecs. Ce fut Me Magloire qui ouvrit le débat, elle était la plus excitée de toutes. Elle parlait d’un homme qu’elle avait vu la semaine dernière dans un supermarché.

« Claudia ! S’exclama-t-elle, tu aurais dû voir ce bel étalon !! Il m’a carrément mis l’eau à la bouche, finit-elle dans un éclat de rire. »

   Les autres Maitres l’avaient suivi dans son délire. Leurs journées se résumaient à cela. Elles attaquaient pratiquement tous les sujets qui pouvaient exister. Mais le plus intéressant d’entre tous demeura celui des hommes. Cette Me Magloire — Olivia Magloire — était celle qui le plus souvent était l’initiatrice de ces discussions.

   Alors qu’elles étaient en pleine discussion — Me Fils-Aimé détaillait sa dernière partie de jambes en l’air — Catherine se mettait à penser à sa rencontre de ce matin. Elle ne savait pas pourquoi mais ce Charly Constantin l’intriguait. Surtout ce côté un peu je-m’en-foutiste qui dégageait de son être. Le type venait de rater son entretien et pourtant il était là à rire et à sourire de tout. Comme un gamin. Catherine ne put s’empêcher de sourire un peu en pensant à leur conversation. Cela eut pour effet d’attirer l’attention des autres Maitres.

« Qu’est-ce qui te fait autant sourire ? Lui demanda Me Philippe sur un ton curieux.

— Je parie que c’est Greg ! S’exclama alors Me Magloire.

— Non, c’est rien, finit par ajouter Catherine. Juste un souvenir.

   Greg était le petit copain de Catherine, et cela, tous ses amis du bureau le savaient bien. Ils étaient ensemble depuis quelques temps, deux ans environ. Les autres maîtres étaient toujours en train de la taquiner lorsque Catherine reçut un message : « Salut bébé ! Comment tu vas ? Rentre vite, j’ai une surprise pour toi. » C’était un texto de Greg.

CHARLY CONSTANTIN Où les histoires vivent. Découvrez maintenant