Save Your Tears

Chapitre 3

Sasha Bellamy est né le 18 janvier 1982. Il est Capricorne. Il a une petite sœur Inès qui a deux ans de moins que moi. Son père est garagiste et sa mère secrétaire médicale à l'hôpital de Villession. Ils vivent à Métrange, un village à quelques kilomètres de chez moi. Comment j'ai trouvé son adresse ? Grâce au bottin des PTT évidemment ! J'ai cherché son nom de famille dans tous les villages environnants et j'ai fini par dénicher son adresse et son numéro de téléphone. Je ne pense pas l'appeler un jour, mais cette information me semblait importante à ajouter à mes notes. Pour le reste des infos, il m'a suffi de laisser trainer l'oreille dans les couloirs. Ce garçon est si populaire qu'il fait souvent l'objet de sujet de conversation et le fait que son père répare presque toutes les bécanes et autres scooters des jeunes du bahut, ça aide aussi beaucoup à sa popularité.

Lorsque j'ai su qu'il était en 3èmeA, mon obsession a été de mettre la main sur son emploi du temps. Par chance, Kévin, le cousin de Jérémy, est dans sa classe. C'est aussitôt devenu un jeu d'enfant de me le procurer. Grâce à ça, j'ai pu comparer nos plannings et savoir que tous les jours sauf le mardi, je pourrais le croiser aux interclasses. Ce n'est peut-être pas grand-chose, mais les quelques secondes où je peux l'admirer ensoleillent mes journées même en plein hiver. Bon, en contrepartie, il a fallu que j'explique à Djé pourquoi les heures de cours de son cousin m'intéressaient autant. Après avoir cru pendant de longues minutes que je flashais sur celui qu'ils appellent le « kéké » dans sa famille, j'ai fini par vendre la mèche sur ma passion dévorante pour Sasha. Forcément, mon aveu a fait mourir de rire celui à qui normalement je peux tout confier sans jugement. Apparemment l'amitié fille/garçon a quand même certaines limites.

— Ça va Bonnie ? Tu tapes pas trop haut toi niveau mec ! se moque-t-il.

— Oh arrête, je sais bien que je n'ai aucune chance avec lui, mais je n'y peux rien, l'amour ne se commande pas.

Ma réponse calme ses rires. À la place, sa lèvre supérieure se relève dans un dégoût évident.

— T'es pas sérieuse ? T'es carrément amoureuse de Bellamy ?

— Oh oui !!!! Souligné-je des étoiles plein les yeux.

Pour preuve, je pourrais lui montrer les nombreuses pages blanches où j'ai griffonné des Bonnie + Sasha et autre Bonnie Bellamy entourés de milliers de cœurs. Je crois qu'à ce niveau, il ne me prendra plus pour une dingue, il demandera carrément mon internement.

— Bon, maintenant que tu es au courant, tu vas pouvoir m'aider à enquêter. Qu'est-ce que tu peux me dire sur lui ?

Ma remarque le fait soupirer. Je le connais assez pour savoir qu'il est déjà saoulé. Les histoires d'amour ce n'est vraiment pas son truc. Pourtant, il a son petit succès au bahut. Seulement, le peu de fois où j'essaye d'avoir son avis sur des filles qui lui courent après, il se braque en disant qu'il s'en fout.

— Déjà, faut que tu m'expliques. Pourquoi tu veux enquêter sur lui si tu penses que tu n'as aucune chance ?

J'ai le droit de fantasmer, non ? Évidemment, on va éviter ce terme, il ne comprendra pas.

— Je ne sais pas, mais ne me prends pas pour une folle s'il te plait. Je l'aime bien et je ressens le besoin de tout savoir de lui, c'est tout.

Je ne suis pas certaine que cette réponse la convaincue... D'autant plus quand je le vois rouler des yeux, agacé. Mais comment pourrait-il comprendre que la découverte de l'amour et de l'attirance pour un garçon me rend complètement accroc ? Que dès que j'aperçois Sasha mon petit cœur se met à battre à mille à l'heure ? La seule fois où j'ai ressenti un palpitant comparable doit être quand les parents de Jérémy nous ont emmenés au concert de Dorothée. J'étais toute jeune et c'était mon idole, celle de tous les enfants d'ailleurs. Là, ce que je ressens pour Sasha ce n'est pas éphémère alors encore plus intense. Je ne vois que lui, je ne vis que pour le voir. Inquiétant comme attitude ? Je ne crois pas, juste un peu excessif. Et alors ? Je ne fais de mal à personne après tout.