retrouvailles innatendues | chapter 10

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J'avais été bouleversée, par le secret de Shelley. Elle avait vécu la même chose que moi, en bien pire. Il fallait que j'arrête de me plaindre -Shelley, elle, paraissait mature face à la situation. Je n'étais peut être qu'une gamine débile.

En arpentant les rues aux longs et spacieux trottoirs, qui me menaient au tram, mes pensées divaguaient.

Je présentais mon ticket, puis montais sur les quais bondés de monde. Un train arrivait, et, lorsqu'il s'arrêta, je montai à son bord. Des personnes rentrées du travail se piétinait, et le bruit était assourdissant et insupportable. Une affreuse odeur de sueur flottait dans l'air.

Le tram démarra dans une grosse secousse -un enfant gloussa, et les paysages urbains commencèrent à défiler, à travers la vitre à laquelle j'étais collée.

J'imaginais le petit frère de Shelley, gisant à terre -mort sous les coups de son propre père.

-Sloan ? M'appella une voix étrangement familière.

Je sursautais. Quelqu'un, dans toute cette foule d'inconnu, avait prononcé mon nom, ou n'étais-ce qu'une simple hallucination ?

Cette voix me rappelait celle de...

-Ce n'est pas possible, murmurai-je à moi-même.

Je me mis à bouger lentement les yeux. Et il était bien là; Nate, avec ses grands yeux bleus plus profond que n'importe quel océan, ses cheveux bruns aux reflets subtilement blonds, son visage aux traits fins et parfaits, son air rieur et charmeur, sa carrure d'athlète. Je ne voyais plus que lui, lui entre toutes ses personnes débiles. Mon coeur battait tellement fort que je ne le sentais plus. Je n'étais qu'à moitié consciente de ce qu'il m'arrivait.

Il se fraya un passage dans la foule, comme au ralenti. Je me plaquais au maximum contre la vitre, soudainement horrifiée à l'idée qu'il me fasse du mal. Il allait sûrement s'en prendre à nouveau à moi...

-Sloan, tu as maigri.

Ce fût tout ce qu'il me dit, avant de repartir de sa démarche assurée.

Flashback

Nous étions sur le sable fin et frais de la plage de Miami, les yeux perdus dans le ciel bondé d'étoiles. La nuit était d'une couleur époustouflante -bleu roi. Tout bruit autour de nous ne semblait plus exister, à part, bien sur, le son régulier des vagues s'écrasant sur le sable.
-Tu penses que mes parents me cherchent ? murmurai-je, soudainement inquiète.
-Tu gâches notre soirée.
Je me pinçai les lèvres, et l'observais discrètement. La lumière sombre et tamisée le rendait encore plus beau. Il avait les yeux rivés vers le ciel. Je posais timidement la main sur la sienne, et entrelaçais mes doigts aux siens. Il retira les siens brutalement et me cracha:
-T'es vraiment chiante.
Son regard m'avait blessé, plus encore que si l'on m'aurait planté une centaine de poignards dans le coeur. Tandis qu'il me traitait de gamine, je commençais à me rendre compte que je ne comptais pas, pour lui. Et pourtant, je l'aimais plus que ne le permettait la raison.
-J'aurais jamais t'emmener ici. J'ai hâte que tu retrouves papa et maman chéri pour qu'ils te fassent un gros câlin.
Je tentais de me convaincre que si il disait de telles choses, c'était qu'il était sous l'emprise de la drogue, mais je n'étais pas de dupe.
-C'est bon. Arrête de chialer.
Sans m'en rendre compte, j'avais commencé à pleurer. Il me regardait avec un tel dédain -comme si il avait honte de moi.
-Tu ne me laisseras pas, au moins ? Murmurai-je faiblement.
-Mais non. Jamais je ne te laisserais.

Je n'étais plus la même, à présent. Et l'heure de ma vengeance avait sonné.

[ARRETÉE] Normal LifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant