chapitre 6

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Hiver de 2010

MP3 de Taehyung :
_ I get around, THE BEACH BOYS
_ Don't you worry, DEUL GUK HWA

L'arrivée de Hyejin dans la vie de Taehyung ne changea pas grand chose, pour Jeongguk. Son ami continua de le voir régulièrement, d'avoir un humour étrange, de le traiter comme son petit frère. Il n'y eut rien dans leur amitié qui se modifia. Ils s'appliquèrent tous les deux, pour des raisons différentes, à garder les choses telles qu'elles étaient. Peut-être que leur relation était à cette période le seul élément stable de leurs vies. La seule chose qui avait l'air de ne pas bouger, de ne pas s'abimer avec le temps qui passait, de ne pas s'empirer. Car notre cher protagoniste et son meilleur ami avaient tous les deux des vies assez compliquées.

Taehyung cherchait toujours un travail et était désespéré de ne pas parvenir à en trouver un. Il avait candidaté dans tous les restaurants possibles, toutes les épiceries des quartiers environnants, sans avoir de résultat. L'économie n'était pourtant pas en mauvaise posture, il ne s'agissait pas d'un problème gouvernemental. La Corée du Sud était justement en train de s'établir et développer son soft power, grâce aux idols de K-pop qui étaient très populaires à l'étranger. Non, Taehyung était tout simplement considéré comme trop peu qualifié. Son profil ne convenait pas aux patrons, qui trouvaient que le jeune homme avait l'air un peu paresseux, et que son CV était bien vide pour quelqu'un qui avait voulu travailler dès la sortie du lycée. Il y avait aussi la concurrence : de nombreux étudiants occupaient déjà les postes qu'il visait afin de payer leurs études. Taehyung ne leur en voulait pas. Il comprenait que chacun doive payer ses dettes, s'occuper de sa famille, subvenir à ses propres besoins. À vrai dire, selon Jeongguk, il n'en voulait à personne, ce qui était un problème. Son meilleur ami trouvait que Taehyung, même s'il n'avait pas de besoin d'argent particulier, aurait du être combattif dès le début. Ces gens là n'étaient pas forcément plus qualifiés et motivés que lui. Il fallait absolument qu'il se fasse sa place dans cette société. Bien évidemment, cela révélait leurs deux natures si différentes. Le plus âgé, qui avait grandi sans difficultés, soutenu quoi qu'il arrive par ses parents parfois stricts mais très aimants. Le plus jeune, dans le besoin dès son enfance, qui avait du grandir sans père et sans soutien financier, contraint de se battre sans arrêt pour sortir de sa situation difficile.

De son côté, Jeongguk travaillait toujours autant. Il noircissait des pages et des pages de ses cahiers, de leçons et d'exercices qu'il tentait d'apprendre par coeur. Il s'entraînait sans arrêt, passant des heures sur une question d'un problème de maths quand il sentait une quelconque difficulté ou hésitation. Notre cher protagoniste était quelqu'un d'acharné : il avait beau se sentir découragé, il ne se permettait pas d'abandonner. À vrai dire, il savait que le jour où il abandonnerait serait le jour où il serait perdu, car sa vie entière reposait sur son combat permanent. Jeongguk travaillait alors, il révisait, récitait ses cours parfois quand il marchait dans les rues de Séoul, il relisait ses cours dans le métro, et était tellement fatigué qu'il s'endormait parfois à la bibliothèque. Cela semble difficile, bien sûr. Cela semble insurmontable pour un jeune de son âge, qui ne connaissait après tout presque rien de la vie et des difficultés du monde des adultes.

Pourtant, ce travail incessant était considéré comme dur mais évident, normal, pour la société coréenne. Chaque année, tous les lycéens de l'âge de Jeongguk traversaient cette épreuve là. Ils souffraient, pendant des mois, délaissaient leur famille et leurs amis, mais c'était pour le mieux. Cette difficulté, ce mode de vie rude était accepté et valorisé car il était considéré comme essentiel pour réussir par la suite. Continue de travailler, ne lâche rien, et tu pourras te reposer une fois que tu seras entré à l'université, disaient parfois des étudiants à Jeongguk quand ils le croisaient à la bibliothèque. On le regardait avec approbation quand il travaillait dans le métro ou dans la rue. Sa mère et ses voisins l'encourageaient, lui disaient de surtout poursuivre de la sorte. Jeongguk était tellement impliqué dans son travail qu'il n'arrivait pas vraiment à avoir un point de vue global et se demander si sacrifier une partie de sa jeunesse pour un travail de bureau était réellement satisfaisant. Il faisait juste ce qu'il pouvait pour continuer, ne rien relâcher, et ne surtout pas abandonner.

our burning dreams - jjk; kthOù les histoires vivent. Découvrez maintenant