- Voleuse -

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Chiotte ça commence mal ! Pour commencer, il y a eut cette ronde surprise. Peuvent pas faire comme tout le monde. Dormir ! Après, il y a eut cette crampe d'estomac, c'est venu comme ça. Et cette fois ce n'étais pas le bon moment. Ce n'était pas la première fois que j'étais dans une situation stressante mais pas ce soir, pas maintenant...

Cyril était passé sans encombre. Je pense qu'il a traversé le parc en quelques foulées avec ces grandes cannes pour se retrouver au pied de la porte arrière de l'édifice.

J'attends que la patrouille s'éloigne. Ils prennent tout leur temps ceux-là, y a pas un match ce soir ? Mon mal d'estomac et ces gargouillis me donnent l'impression d'avoir mis en route une sirène hurlante. Je me plis de douleur. Je n'arrive pas à me concentrer. Cela fait combien de temps que la patrouille est là ?

Je sort de ma cachette, et vais rejoindre le mur. La douleur ne m'aide pas, ça ne va pas aller, j'ai envie de jeter l'éponge. En plus j'ai trop chaud sous ma cagoule. J'ai l'impression que je vais éclater de partout. Me reprendre. Et Cyril qui y est déjà, de quoi j'aurai l'air ? Je passerai pour la dernière des connes !

Non mais c'est pas possible ! Demain les proprios seront de retour et cette nuit c'est notre deadline, y a pas à tortiller du cul. J'escalade tant bien que mal le mur d'enceinte de la propriété en m'accrochant aux lierres qui courent tout du long. Deux mètres cinquante, c'est pas la mer à boire mais là avec mon mal de bide, c'est la corvée. Bon j'ai de la chance les lierres sont robustes.

Je me laisse tomber, roulade et atterrissage catastrophe pliée en deux sous l'effet de la crampe. Quelle douleur ! Je n'en peux plus... Je transpire comme au hamam, je me liquéfie totalement, j'en suis poisseuse, je pue, j'ai envie de vomir.

La lune éclaire faiblement cette nuit, encore un coup de bol. Mais c'est assez pour me faufiler entre les parterres de fleurs et les haies sans faire trop de boucan. J'arrive aux marches qui mènent à la lourde porte de derrière. La porte est entrebâillée. Elle n'a pas due offrir beaucoup de résistance à Cyril. Je la pousse et elle grince légèrement, de quoi mettre Cyril en alerte et annoncer mon arrivée. Il fait noir comme dans un four dans le couloir. Un peu plus loin sur la gauche, il y a un raie de lumière qui encadre une porte. Je referme rapidement la lourde pour ne pas révéler ma présence, s'il y a des voisins mateurs, je fais ma parano, un peu d'angoisse ça aide ! La porte grince à nouveau. La température est plus fraîche qu'à l'extérieur.

Je frappe trois fois à la porte, quelques instants plus tard Cyril m'ouvre.

- Bordel ! Qu'est-ce que tu foutais ? Merde ! Meugle-t-il tout en parlant avec ces mains. Aller rentre ! Dit-il en se dirigeant vers la gauche du bureau.

- J'ai eu un contre-temps...

- Comment ça ? Il s'arrête et tourne la tête pour me dévisager.

- J'ai été indisposée, ça m'a retardé et puis y a eut une patrouille et...

- Une patrouille ? Il fronce des yeux, seule chose de visible sous sa cagoule. Naty a dit qu'il n'y en avait pas...

- Et ben si, elle c'est gouré la conne !

Nous traversons le bureau. Une petite lampe posée sur un secrétaire éclaire faiblement la pièce. Nos pas sont étouffés par un épais tapis. Nous passons à gauche d'un bureau encombré de dossiers et de livres. La pièce semble exiguë car envahie de livres. Des bibliothèques couvrent tous les murs. Des tas de livres sont aussi posés sur toutes les surfaces qui peuvent en supporter le poids. Une odeur d'humidité et d'encens flotte dans l'air, c'est désagréable. J'ai chaud, je tremble légèrement. Ce n'est pas normal. Je sors un sac de l'une de mes poches et commence à prendre des objets sur la seules étagères sans livre qui me fait face. Cyril quant à lui s'occupe de la bibliothèque. Et commence à faire valdinguer les livres.

Après quelques instants un bruit sec se fait entendre. Le meuble de la bibliothèque bouge imperceptiblement. Je continue à remplir mon sac de bibelots. Cyril, lui, est devant le coffre-fort. Il tripote les molettes et très rapidement le coffre est ouvert, comme s'il avait eut le code ! Je lui envoie un autre sac. Il a l'air radieux. Il engouffre dans le sac tout ce qui lui tombe sous la main. Nous sommes au comble de l'excitation.

Il prend le soin de tout refermer, un toc de sa part. Pendant que je dévaste la pièce prise d'une frénésie de destruction. Je sens son regard sur moi, après quelques instant il
siffle. Je me calme, balance encore quelques coups de pieds dans les colonnes de livres.

- Ça vas ? T'es calmée ? Allez on passe à côté ! Fit-il d'un signe de la tête.

Nous dévastâmes deux autres pièces. Cyril en profita, dans l'atelier, pour ramasser des outils pour compléter ça boite à outil. Deux alarmes se firent entendre. Simultanément nos montres nous signalaient qu'il était l'heure de nous faire la malle. On ramasse les sacs qui étaient restés dans le couloir près de la porte d'entrée et traversons le parc. Arrivés au pied du mur, prêt de l'endroit par lequel nous sommes arrivé, Cyril s'arrête net.

- C'est quoi cette odeur ? Il tourne la tête vers moi. Criant à moitié. C'est de la...

- Chut ! C'est mon contre temps... dis-je doucement et gêné. Tu te rappels...

- Ok... Il baisse les bras résigné mais je sentais qu'il était en colère.

- Laisse tomber...

Il escalade rapidement le mur, s'arrête le temps de passer une tête. Puis reprends l'ascension. Se couche sur le mur et me tends la main pour que je lui passe les
sacs. C'est à mon tour.

Stupeur. Je vois devant moi un cyclope dont l'œil unique me darde de toute sa noirceur. Je déglutis. J'esquisse un mouvement de fuite.

Il tire.

Puis deux autres fois lorsque je suis étendue au sol.

- Tu n'aurais pas dus chier dans le jardin de mon tonton !

Il saute dans la rue, ramasse les sacs et disparaît dans la nuit en montant dans une voiture qui s'arrête à sa hauteur.

Ester - ΕΣΤΕΡOù les histoires vivent. Découvrez maintenant