22. Can I believe you - Fleet Foxes

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Un poids s'était envolé des épaules de Drago.

Il avait redouté de longues années le moment où il devrait parler à Scorpius de son passé. Car il avait toujours su qu'il ne pourrait pas empêcher le sujet d'être abordé à un moment ou un autre. Scorpius était loin d'être stupide et avait assimilé depuis longtemps que la lignée dont il descendait n'était pas anodine. Mais c'était après son entrée à Poudlard que Drago avait vu son appréhension s'accroître. Un jour, Scorpius rentrerait pour les vacances et l'interrogerait. Inévitablement, ses condisciples compteraient parmi eux les enfants de ses propres camarades de classe. Il serait confronté aux fils et aux filles des héros de la guerre. Comme Drago et Astoria, les autres parents n'auraient pas raconté à leur progéniture tous les détails de cette guerre, mais à force de discuter les uns avec les autres, d'entrecouper les informations qu'ils avaient chacun récoltés, la vérité aurait explosé au visage de Scorpius. Sur les mangemorts qu'avaient compté sa famille, sur les horreurs qu'ils avaient commises.

Et c'était plus ou moins ce qui était arrivé. Scorpius avait compris que sa famille avait trempé dans la magie noire, qu'elle s'y était même vautrée, en ignorant toutefois jusqu'à quel point.

Avant chaque nouvelle rentrée, Drago s'était efforcé de prendre son courage à deux mains pour avoir cette fameuse discussion, conscient que chaque année de plus qu'il passait à Poudlard pouvait être celle des révélations. Mais le courage était une bête qui ne se laissait pas facilement dompter. Elle ruait, se cabrait, assaillie et piquée par la lâcheté. Drago ne parvenait à maîtriser ni l'un, ni l'autre. Il était torturé par la peur et cette peur avait de nombreuses facettes. Il y avait celle qu'il avait expérimenté en entendant la bouche de Scorpius répéter les ignominies de Lucius. Ayant lui-même été envoûté par le charisme, la force de conviction de Lucius, il avait été terrifié que son fils ne suive le même chemin.

Puis il y avait celle de voir le dégoût dans les yeux de Scorpius en apprenant qui était réellement son père. Cela, il savait qu'il ne pourrait pas le supporter. Il avait conservé certains préceptes de son éducation et certaines traces de sa rancune, le faisant de temps à autre tiquer face à des moldus et des nés-moldus ou ressentir une bouffée de ressentiment à l'évocation des noms Potter, Granger et Weasley. Mais il luttait ardemment pour être un homme meilleur. Un époux et un père digne d'Astoria et de Scorpius. Dès que ses yeux se posaient sur la Marque des Ténèbres ancré sur son bras, un frisson lui parcourait l'échine et lui rappelait la lutte permanente qu'il devait mener. Il ne pourrait gagner cette lutte s'il venait à voir de la répulsion dans le regard de son fils.


Mais une fois de plus, Scorpius avait prouvé combien il était merveilleux. Il l'avait écouté attentivement. Drago avait lu l'effroi se peindre sur son visage, mais pas la moindre once de jugement et de condamnation. Il lui avait même insufflé la force de poursuivre son récit. Chaque mot prononcé l'avait libéré d'une parcelle de souffrance, de haine, de culpabilité, et quand Scorpius était venu se blottir dans ses bras, Drago était vidé de toute énergie mais incroyablement soulagé.

Ils avaient encore passé toute la journée du lendemain à discuter comme ils prenaient rarement le temps de le faire. Astoria s'était jointe à eux et quand l'heure du départ avait sonné, quand il avait fallu reconduire Scorpius à la gare King's Cross le dimanche, les trois Malefoy étaient plus unis que jamais.



L'histoire de son père, comme il l'avait prédit, ne lui avait pas plu. Drago avait été un enfant prétentieux, arrogant et odieux. Puis devenu jeune homme, au même âge que lui, son père avait été marqué par Voldemort et s'était vu confié une mission au-dessus de ses capacités, au-dessus de son entendement d'adolescent. Scorpius ne pouvait pas le condamner. Comment aurait-il pu le faire alors que Drago n'avait été que le fruit de l'éducation de Lucius et Narcissa ? Modelé par une enfance gâté, convaincu d'être un petit roi, bercé par des principes de discrimination. Il avait bien entendu sa part de responsabilité, il l'avait lui-même admis bien volontiers. Mais quand Drago eut terminé, la gorge sèche et la langue gonflée d'avoir trop parlé, tout ce que Scorpius avait pu penser, c'était que son père était incroyable. Que c'était un homme qui avait fait tous les mauvais choix possibles, mais qui avait su tirer des leçons de ses erreurs et qui se battait pour être quelqu'un de bien. Drago Malefoy était devenu un exemple à suivre, une promesse de rédemption. Père et fils ne partageaient pas toutes les mêmes convictions, mais ils étaient chacun prêts à apprendre de l'autre.

L'enfer est pavé de pommesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant