2 - Cauchemar ou réalité ?

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Une douleur immense foudroya mon cœur. Le choc se répercuta dans chacun de mes membres. Mon cerveau parut brûler sous l'impact de cette énergie dévastatrice ; mon ventre se contracta si fort que je crus vomir.

Jamais encore je n'avais ressenti une telle chose, pas même lorsque le venin mortel des Ombres courait dans mes veines. Non, ici, c'était différent. C'était... comme si, littéralement, mon âme se déchirait en deux.

Je me redressai d'un coup, mon visage et ma tunique dégoulinant de sueur. Je hurlai, pour extérioriser ma douleur, et portai une main à ma poitrine.

Les larmes se mirent à couler à flots. Mon souffle, chaud et rapide, s'échouait sur mes lèvres par rafales. J'avais chaud et froid à la fois, et la panique m'enserra la poitrine en rendant chacune de mes respirations un peu plus difficiles. Mon front était brûlant ; je pouvais sentir battre les veines de mes tempes à la cadence de celle de mon cœur, qui, plein de douleur, allait à mille à l'heure. Mes mains tremblantes tentaient de s'accrocher au drap, recherchant vainement l'équilibre. Pourtant appuyée sur les coudes, je me sentis basculer ; chacun de mes muscles tremblait. Des spasmes allaient par vagues, frappaient sans ralentir. Mes yeux cherchaient sans succès à accrocher un détail de la pièce, que je ne reconnaissais pas - tout ne m'apparaissait maintenant que comme des ombres floues.

Mes oreilles bourdonnaient. J'entendais des cris, des larmes, portés par une voix gutturale et soumise à une souffrance qui semblait insoutenable. Mais, par dessous cet aspect physique, on pouvait percevoir le désespoir, la tristesse, le regret... Les mots étaient impossibles à discerner ; tout n'était qu'un fouillis désordonné, rapide et incompréhensible.

Je n'aurais pu savoir à qui appartenait cette voix si des images n'avaient pas été jointes à ces sons effroyables, par rafales violentes : des cheveux noirs et une peau mate tachés de sang. Des yeux d'un bleu rendu fade par la souffrance, mais dont le regard n'avait rien perdu de son intensité. Des plumes couleur ébène...

Elyon.

Soudain, une brûlure vive s'empara de mon poignet. Les images comme les hurlements se turent d'un coup, disparaissant aussi vite qu'ils étaient apparus. Je lâchai un cri, et mes yeux pleins de larmes se posèrent d'eux-mêmes sur la marque qui barrait ma peau : la fine lune blanche qui, une semaine plus tôt, brillait autant que les premiers rayons de soleil.

Je mis une seconde avant de réaliser que, dorénavant, plus aucune lumière n'émanait du symbole. Elle était comme inanimée. Vidée d'énergie, morte.

Non. Non!

Je restai quelques instants immobile, mes yeux louchant sur ce petit dessin qui représentait tant. Je pouvais sentir mon cœur vibrer dans ma poitrine, mais, en cet instant, j'aurais juré que le temps s'était arrêté. Je refusais de croire ce que tout ceci signifiait ; ce que tout ceci impliquait. Je ne pouvais pas. C'était impossible.

Un sanglot déchira le silence de ma chambre. Je me levais d'un bond, faisant valser mon édredon de l'autre côté du lit, et manquai de perdre l'équilibre. Tremblante, je tombai à genoux sur le sol, et me forçai à fermer les yeux. Inspirant difficilement, je pris de grandes inspirations. Puis, je me concentrai. Je plongeai dans les tréfonds de mon âme, et en inspectait chaque recoin, à la recherche d'une corde, d'un couloir, d'une porte... de n'importe quelle forme que pourrait prendre notre lien.

Après un temps, je m'arrêtai, incapable de continuer ; la douleur me foudroyait de part en part. Quelque chose en moi tombait en ruines, littéralement. Je pouvais presque entendre mon cœur se briser en mille fragments, pas plus solide que du verre.

La Gardienne des Légendes ✷ Tome II. - L'EclipsisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant