Chapitre 3

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COSTUME NUPTIAL ET SYMBOLIQUE

Contrairement à nos cultures occidentales, à Elôn, une union ne se célèbre pas en blanc. Le rouge symbolise l'éternité, en évocation au feu sacré qu'honorent les Élonites. La mariée est tenue d'en être entièrement revêtue ; quant à l'époux, il se doit d'en exposer au moins une touche sur l'ensemble de son costume.

La mariée arbore un drapé de gaze fine, long de plusieurs mètres, qu'elle vient savamment nouer autour de sa taille. Un corsage en brocart, du même tissu, enveloppe ses épaules. À cela s'ajoutent les nombreux bijoux et la traditionnelle couronne de breloques qui orne son front.

Dans le cas de couple polygame, lors de son entrée dans le harem, la femme doit se couvrir le visage d'un voile opaque. Ce dernier représente l'hymen encore intact.

L'époux, lui, revêt un manteau en brocart à col montant, rouge ou or, et un pantalon de soie, ajusté ou bouffant en fonction de sa région. Il porte également sur l'épaule gauche le même pan de tissu écarlate que son épouse. Ce dernier est volontairement alourdi avec du plomb pour figurer le poids de leur engagement devant les dieux.

Encyclopédie polymathe de la culture antique et des civilisations (1849)

***

Shahin n'est pas venu. Shahin n'est pas venu. La phrase tournait en boucle dans sa tête, elle n'en revenait pas. Elle n'avait pourtant pas mendié pour devenir sa Femme. C'était lui qui l'avait décidé. Dans ce cas, pourquoi ne s'était-il pas présenté à l'autel ? Oui, sa demande en mariage n'avait rien eu de romanesque ni de sentimentale, mais n'était-ce pas lui qui l'avait désiré ? À moins que ce ne soit justement la cause pour laquelle il ne s'était pas montré : il n'éprouvait rien pour elle, alors à quoi bon partager une nuit ensemble ? Après tout, il avait raison. Ils ne s'unissaient que par convenance. Un unique contrat de travail les liait. Rien de plus. Mais pourquoi cela faisait-il si mal ? Était-ce son orgueil blessé ? Était-ce la crainte de devenir la risée du sérail ? Elle avait affirmé si fermement que le prince viendrait la chercher ! Une aigreur lui remonta de l'estomac à la bouche. Elle se sentait honteuse.

Après tout qui était-elle ? Autrefois, elle n'était qu'une esclave, mais maintenant qu'elle avait intégré le harem, maintenant qu'il n'avait même pas daigné l'accueillir, elle ne savait plus où se trouvait sa place. Elle se sentait honteuse et perdue.

Pourtant, n'était-ce pas Shahin qui avait affirmé qu'ils s'aimaient déjà, à leur façon ? C'était donc ça pour lui, aimer ? Son cœur lui faisait mal. Elle lui en voulait de lui avoir laissé croire des choses. Elle lui en voulait de l'avoir manipulée pour qu'elle accepte sa part du contrat. Cependant, elle ne voyait pas comment elle aurait pu s'acquitter de sa vengeance sans son aide. Elle dépendait de lui et il l'avait compris. Elle se sentait honteuse, perdue et trahie.

Ehsan suivait le prêtre qui marchait d'un pas lent devant elle. Elle remercia silencieusement Ahra Maza que dans son malheur, la route qui la ramenait au sérail soit déserte. Il n'y avait rien de plus humiliant pour une jeune mariée que d'arpenter seule le chemin jusqu'à sa chambre nuptiale. Toutefois, elle se retint de pleurer. Elle en avait très envie, mais il ne fallait pas. Avec la quantité de fard qu'on lui avait collé autour des yeux, la moindre larme viendrait crier à la face du monde sa détresse. Or, les prochaines personnes qu'elle allait devoir affronter étaient les concubines, et son dernier souhait était qu'elles assistent à son outrage.

Le prêtre se stoppa devant les portes dorées du sérail.

« Ma route s'arrête ici, je vous laisse entre les mains des eunuques. Vous êtes désormais une Femme de Son Altesse Royale. Qu'Ahra Maza puisse bénir votre union. »

La Porte du Roi : Entrave Scellée - Tome IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant