Chapitre 3 : La ronde des plats

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- Liiiiiise ! Venez vite, j'ai besoin d'aide.

- Oui Mademoiselle répondit aussitôt la servante au loin. Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-elle une fois sur place, d'une respiration haletante tant elle avait accouru.

- Nouez les liens de ma robe au dos s'il vous plaît. Et apportez-moi l'amulette.

- Bien sûr Mademoiselle.

Suivant les ordres, Lise s'approcha de la jeune marquise et s'exécuta. Elle remonta les pans de la robe avec grande douceur jusqu'aux épaules couleur blé, puis se dirigea en direction d'un long tiroir apposé près du lit. Elle tira dessus, laissant entrevoir une farandole de bijoux plus somptueux les uns que les autres. Elle épousseta, à l'aide d'un plumeau, l'amulette choisie. Elle y décolla la fine couche de poussière accolée, faisant voler les particules au loin, avant de retourner auprès de sa maîtresse. Les deux extrémités du bijou autour du cou de la noble se crochetèrent, faisant tomber la topaze rose entre les seins ronds.

- Vous êtes magnifiques. Vous allez toutes les faire pâlir de jalousies.

Lise disait vrai. La Marquise Apolline des Dunes était l'une des jeunes femmes les plus en vue du Royaume. Ces longs cheveux blonds lui arrivant jusqu'au bas du dos faisaient autant tourner des têtes que ses yeux noisettes. Ses fossettes ne faisaient qu'accentuer son sourire et la générosité coquette de ses joues. Ses galbes et formes tenaient lieu d'extraordinaire et de merveilleux face à ceux des autres filles, beaucoup plus longilignes et allongées qu'elle. De nombreux paris circulaient parmi la Cour du Roi quant à ceux qui arriveraient à la mettre dans leurs lits. Elle était autant insaisissable que désirée. Avec la gloire de sa beauté, venait le fardeau de la jalousie. Le poids de traîner dans son sillage des yeux avides d'un côté, et des yeux envieux de l'autre, la fatiguait. Qui était intéressé au final pour ce qu'elle était véritablement ? Peut-être n'était-elle plus qu'un prisme des désirs d'autrui. Une poupée que chacun façonne selon ses envies.

« Pas cette fois. Je mène la danse. » murmura-t-elle.

- Lise, voulez-vous bien m'accompagner jusqu'au bal du château ? De plus, vous pourrez ainsi aider les autres commis aux cuisines.

- Avec plaisir Mademoiselle. Il en sera fait selon vos souhaits.


Les deux femmes quittèrent alors la chambre, et parcouraient les couloirs du manoir quand elles tombèrent nez à nez avec une créature patibulaire, plus ours qu'homme. Il était trapu malgré sa grande taille, sa mâchoire était carrée, ses yeux, acérés. Un ours recouvert d'une armure en fer digne de Iorek Byrnison. Il était de plus muni d'une épée et d'un bouclier attachés au dos, entre ses larges épaules. L'habit faisait le moine pour une fois, ou plutôt le chevalier.

- Mademoiselle Apolline tiens-donc. Que fait la fille du Marquis des Dunes en dehors de sa chambre à cette heure si tardive ?

- Chevalier Paul le Bolet tiens-donc répondit la jeune femme de la même façon. Que faites-vous à cette heure si tardive dans une maisonnée qui n'est pas la vôtre ? Êtes-vous autant sans le moindre sou ? ajouta-t-elle d'un ton railleur.

- Votre père m'a appelé afin que je prenne soin de vous lui répondit-il imperturbable. Les cambriolages et kidnapping n'ont jamais été aussi importants qu'en cette période, et chaque noble porte maintenant une cible derrière le dos.

- Quelle chance alors d'avoir un aussi preux chevalier à mes côtés quand je me ferai attaqué avec grande sauvagerie par quelques mendiants armés de leurs misérables haillons. Je me demande de ce que je ferai sans vous, mon sauveur.

- Je ne rirais pas de la menace si j'étais vous. L'ombre qui plane sur chacun d'entre nous est réelle. Aussi je vous ordonne de retourner vous coucher et de...

Genèse médiévaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant