Entre Deux Choix

Au risque de tout perdre

Point de vue d'Alex

La musique battait son plein à l'intérieur. Dehors, il commençait à faire froid. C'était la pleine lune et des étoiles scintillaient dans le ciel marquant une douce nuit. À cette heure ci, des marchands de friture, de jus blende et de sandwich s'entassaient sur le trottoir près du night club où j'y étais quelques minutes auparavant. Certains de ces derniers blaguaient et d'autres entonaient les paroles du tube en vogue que diffusaient les hauts parleurs du DJ.

Il régnait une ambiance des plus gaies mais pourtant je me sentis étranger à ce décor. J'avais une envie soudaine de prendre l'air et de faire le vide dans ma tête. Un instant, je me suis dit qu'il était temps maintenant pour moi de rentrer, ça faisait des minutes depuis que je lui ai demandé de m'attendre à l'intérieur du night club. Elle devrait s'inquiéter vu l'heure qu'il est. Mon bon sens me murmurait d'aller la rejoindre, m'excuser pour ce contretemps et lui prendre doucement la main avant de bavarder avec entrain sur notre avenir de couple. Pourtant je ne bougeai d'un millimètre, l'envie n'y était pas.

Durant une seconde, l'image de ma copine assise sur un tabouret, ses épais sourcils froncés et ses yeux noisettes regardant l'heure apparut dans ma mémoire. Mais une autre auquelle je ne voulais plus y penser s'immisca. Celle d'une fille avec de grands yeux au regard vide, des cheveux bouclés encadrant son visage ovale et des lèvres pulpeuses qui ne s'étiraient plus pour former un doux sourire comme avant mais un sourire forcé, contrit.

Un râle amer s'échappa de ma bouche. Comme j'aimerais remonter le temps et au lieu de ses interminables disputes me remmémorer nos doux moments passés ensemble. Me rappeler ses jolies yeux qui me regardaient avec tant d'amour et de convoitise. Redécouvrir ces instants de fous rires, cette connexion qui me rendait indispensable non pas tel une roue de secours mais un mec avec qui passer du temps était vraiment agréable. Un amant qui vivait une vraie histoire de coeur. Cette conte de fée qui donnait envie à ses copains de la fac de rencontrer eux aussi l'amour.

Hélas, tout ceci était bien loin maintenant.

Je soupirai puis passa une main sur mon visage. Je me haïssais de penser à mon ex alors que j'ai une copine qui tient vraiment à moi. Après avoir largué mon ex quelques semaines plus tôt, j'avais enfin ce que je méritais: le droit de vivre une vraie histoire d'amour sans mascarades où j'aurais nullement besoin de me contenter des miettes d'attention qu'elle me donnait uniquement par obligation.

Or toute ma certitude s'est envolée ce soir dès l'instant où la musique ''Parano d'Oswald" s'est mise à jouer. Cette musique qui me rappela notre premier rencard, notre première danse, les premiers instants. Moi qui voulait tirer un trait une bonne fois pour toute sur le passé se retrouva au contraire à douter de ce choix. Quel enfoiré! Ça me faisait mal de l'avouer mais je devrais bien me rendre à l'evidence: Celle avec qui j'avais envie de passer la soirée n'était pas celle qui m'attendait à l'intérieur.

Eh oui, Martine me manquait terriblement malgré tout ce qu'elle m'a fait subir. Et ce simple constat me fit de la peine pour ce que moi je suis entrain de faire endurer à cette fille qui m'attende. Peut être que j'aurais pas dû la laisser tomber de la sorte et essayer de ranimer la flamme de notre amour. Faut avouer qu'un coup de fil à 4 h du matin n'était pas l'idée du siècle mais j'en avais vraiment ras le bol d'être le seul à faire des efforts depuis 2 ans déjà. Je sais que la mort de son père a été dur mais j'ai toujours été lá pour elle, j'ai tout fait pour l'aider à aller mieux jusqu'à ce que je me suis rendu compte que notre relation n'y tenait plus. Elle n'a même pas essayer de me retenir, pas un coup de fil depuis la rupture. La douleur serait plus fugace si je n'avais pas rencontré Vanessa, cette fille me faisait oublier par moment mes peines mais parfois comme aujourd'hui les souvenirs étaient indélébiles.

Perdu dans mes pensés, je me rendis compte de la fille qui s'evertuait à m'appeler que lorsque celle ci me secoua de toutes ses forces. D'abord surpris je marmonnai quelque chose d'inaudible avant de lui offrir un sourire désolé. Cela ne suffit pourtant pas car visiblement en colère Vanessa me lança sur un ton rempli de reproches

- Ou pat ka dim m anmèdew pito olye u kitem chita tout tan sa ap tann Ou! ( tu pouvais tout simplement me dire que je t'ennuyais au lieu de me laisser poireauter pendant tout ce temps)

- Désolé bae! M pa wèm fèw tann tròp pase sa non ptit Coeur. Repondis_je sur un ton docile afin de l'amadouer.

- Mais pour qui tu me prends Alex, pour une imbécile! Laisse moi te rappeler que je suis pas ces filles niaises que tu as l'habitude de fréquenter. Ne me prends pas pour une idiote!

La voir comme ça, prête à sortir de ses gonds m'amusa. Voilà une des choses que j'admirais chez elle: son caractère bien trempé. Franche et directe, elle a la langue bien pendue et sa voix ferme contrastait avec son physique svelte. En somme, une vraie petite battante. Refusant de l'énerver davantage je m'empressai de répondre:

- Ok ça va, tu as raison. Je m'excuse! D'un ton plus calme je reprends: pardonne moi d'accord? Viens là, rentrons. Je passai une main sur son épaule et essaya de l'attirer plus près de moi mais elle me repoussa et me dit d'un ton autoritaure
- Mennenm lakay mwen Alex, fè rapid! (Ramène moi chez moi Alex, tout de suite!)

J'essayai de la dissuader quelques minutes avant d'obtempérer voyant qu'elle ne changerait pas d'avis. Je venais de foutre ma soirée en l'air à cause d'une fille qui ne voulait plus de moi. Et c'est en voyant le visage contrarié de ma copine que je réalisais que si je continuais sur cette lancée, je pouvais aussi la perdre et tout gâcher tel ce que je suis: " Un con encore amoureux de son ex et qui ne voulais pas perdre sa copine."