OS n°1 : Le jumeau Weasley

23 2 3
                                    

Il est assis dans leur chambre, face au miroir. Il n'y était pas retourné depuis... eh bien depuis ce jour-là. Il évite les miroirs d'habitude. Il ne peut plus se regarder dans un miroir. Il les a tous cassés un par un. Il évite les vitrines, les fenêtres aussi. Tout ce qui peut renvoyer un reflet en réalité.

Aujourd'hui est un jour particulier. Mais il ne veut pas y penser. Parce que chaque jour, la douleur est la même. Elle ne faiblit jamais. On dit que la douleur s'estompe avec le temps. C'est faux. Les semaines, les mois, les années ont passé et la douleur est toujours aussi forte qu'avant. La douleur comprime toujours sa poitrine, le sentiment de vide est toujours là lorsqu'il se réveille. Elle est même présente dans son sommeil, à travers ses cauchemars. Le choc et le déni ont disparu mais la colère est toujours là et grandit un peu chaque jour. Contre les politiques, contre les ennemis, contre les résistants. Contre tout le monde. Et surtout contre les adultes. Il était adulte lorsque c'est arrivé. Officiellement du moins. Il était majeur, mais est-ce cela suffisant pour dire que l'on est adulte ? Il était aussi perdu que les membres de sa famille plus jeunes. Il était adulte, mais ne le ressentait pas de cette façon là. Il n'avait de responsabilités envers personne, mais son âge lui disait que si. Il n'était pas responsable de ce qu'il s'était passé. Les adultes si. Ils n'avaient pas su l'empêcher, pas su poser des limites. Ils s'étaient cachés, et maintenant lui comme tant d'autres devaient subir la douleur de la perte.

Il fixe son reflet dans le miroir, sans détourner les yeux. Cela lui coûte bien plus d'effort que ce que l'on pourrait penser. Ses yeux s'embuent et sa vision se trouble. Des larmes salés coulent le long de ses joues si bien qu'il ne distingue plus qu'une silhouette maigre avec les cheveux roux. Il ne se laisse pas beaucoup craquer ainsi. C'est rare. Il s'isole, broie du noir, ne parle pas, évite tout contact tant qu'il le peut, mais il ne pleure pas. Il n'y arrive pas, ses larmes ne parviennent pas à franchir le passage de ses yeux. Peut-être parce qu'il a déjà trop pleuré. Il ne sait pas.

Il tombe au sol et laisse libre cours à sa douleur et à sa colère. On lui a arraché une partie de lui quatre ans auparavant, et il ne s'en est toujours pas remis. Ça ne sera jamais possible. Il le sait. Tout le monde qui le connaît le sait. Sa magie s'agite, et il la libère, le temps d'un instant. Leur chambre se détruit peu à peu, tout semble tourner peu à peu, puis le vide.

Il se réveille soudainement, comme s'il avait perdu connaissance un demi-instant. Tout s'est calmé. Le silence est pesant, la chambre est complètement désordonnée. Seul le miroir est à sa place, trônant au milieu du mur, comme pour lui rappeler sa macabre solitude.

Il ne veut plus vivre ainsi.

Ça fait un moment qu'il l'a admis. Le ainsi est même de trop.

Il ne veut plus vivre.

La douleur et la solitude sont trop grandes. Avoir mal à longueur de journée n'est pas supportable. Et il n'ira jamais mieux. Il le sait, il le sent au plus profond de lui. Il se relève, observe une dernière fois sa chambre, leur chambre, et part. Il a suffisamment de respect pour sa famille pour ne pas le faire ici.

Il va chez eux. Ce sera toujours chez eux, jamais chez lui. Il monte les escaliers, chose qu'il ne fait jamais. Il ouvre la porte et se dirige vers sa chambre, pas la sienne. Il espèce qu'ils comprendront. Pas qu'ils accepteront. Ils ne le feront jamais, il le sait.

Il ne peut pas vivre. Pas sans son frère. Pas sans sa moitié. Il a essayé. Mais il n'y est pas parvenu.

Il doit le rejoindre. Ils doivent être réunis.

Lentement, il prend sa baguette, et sans trembler, il prononce deux mots.

Recueil d'OSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant