Chapitre 3

1 0 0
                                    

Je ne pensais qu'à ça. À la soirée à laquelle il m'avait invitée. Rien qu'en y repensant, j'étais déjà en train de stresser. J'avais ma tenue, j'avais l'autorisation de mes parents et la voiture de ma mère. Elle avait bien voulu que je l'emprunte. Pour une fois ! J'ai mon permis depuis plusieurs mois et c'est la première fois qu'ils me laissent prendre l'une de leur voitures. De plus, je n'avais pas de couvre-feu. J'avais bien sûr dû marchander avec eux : je vais devoir laver la voiture de mes parents et j'ai aussi du leur promettre de ramener des beaux points. C'était déjà le cas. Je ne voyais pas très bien la différence que cela ferait, mais si ça pouvait leur faire plaisir, c'est le principal. Surtout que ça m'assurait mon ticket de sortie à la fête de Bella.

Il ne reste que trois jours avant la fête. On ne s'était pas parlé du tout du weekend et j'attendais avec impatience son message. En ce mardi après-midi ensoleillé, je retourne tranquillement chez moi après les cours. Je pense au travail qui m'attends chez moi. Les profs n'ont pas lésiné sur les devoirs. Ça ne fait même pas un mois que nous sommes rentrés à l'école que nous avons déjà des évaluations et des devoirs à tout va. C'est l'une de ces semaines où les professeurs donnent tous une tonne de travail à rendre. À croire qu'ils s'unissent dans la salle des profs pour planifier des devoirs en même temps !

En rentrant chez moi, je suis accueilli par mes chiens. Après une tournée de caresses, je monte dans ma chambre jusqu'à l'arrivée de mes parents. Ils rentrent vers 18 heures, ce qui me laisse un petit peu plus d'une heure pour faire mes devoirs avant de devoir aider mes parents. Je dépose mon sac au pied de mon lit et m'allonge sur mon lit. Ma chambre n'est pas très grande mais elle me convient très bien ainsi. Mon lit est enfoncé dans une alcôve dans le mur et fait face à ma télévision, accrochée au mur.

Je vide mon sac, sortant mes manuels pour travailler. Un quart d'heure plus tard, je n'avais toujours pas commencé à travailler. J'abandonne alors mon téléphone sur mon oreiller pour m'asseoir à mon bureau. J'essaie de me concentrer, mais mon il n'arrête pas de sonner. Je suis obligé de me lever pour le mettre en silencieux lorsque je remarque le destinateur des messages.

— Qui peut bien m'envoyer des messages, râlais-je.

Quand l'écran de mon téléphone s'illumine, mon sang ne fait qu'un tour. Je déverrouille mon téléphone avec appréhension. Si ça se trouve, il venait m'annoncer que la fête est annulée parce qu'ils ont annoncé une petite pluie ou pire, qu'il ne voulait plus m'inviter parce qu'il pense que je suis dérangé et je resterai ici à me morfondre pendant que Liam, Bella et le reste des mes amis seraient en train de s'amuser. Ma curiosité l'emporte sur mon appréhension et je lis enfin les message.

NUMÉRO INCONNU : Salut ! C'est Derek. L'adresse pour la fête est l'avenue Caesar Jr. N°47. À vendredi ! ;)

MOI : Merci beaucoup, à vendredi !

J'enregistre son numéro dans mes contacts et attends. Il ne répond pas. Soudainement, mon téléphone vibre dans ma main – 1 nouveau message.

DEREK : Hâte d'y être.

Qu'est-ce que ce message veut dire ? Mon esprit s'évade quelques instants, divaguant vers la vision suggestive de la fête : on danse tous ensemble au milieu de la foule, nos regards se croisent et il se penche pour m'embrass...

— Stop !

Je m'arrête là. Tout simplement parce que ce n'est moralement pas correct. Ensuite parce qu'il y a 99% de chances qu'il soit hétéro. Même s'il est gay, il y a peu de chances pour que je l'intéresse. Si Amethyst m'entendait, elle m'engueulerait. Je ne dois pas me rabaisser comme ça. D'après elle, je pourrais être le type de tout le monde parce que je suis beau et basique. Je ne sais toujours pas si je dois prendre ça pour un compliment.

Je ne me suis pas encore trouvé, c'est tout, me rassuré-je.

Il m'attire, mais je ne sais pas si ces sentiments sont réciproques. Mentalement, c'est une torture. Je lance ma playlist en aléatoire et Heather de Conan Gray passe.

Quelle ironie.

Toutes les fois où j'étais tombé amoureux, les garçons avaient été des hétéros homophobes. Ce qui n'est pas surprenant dans une petite ville comme Beachdale.

S'il n'est pas le bon, c'est fini. Si je me lance et qu'il me rejette, je ne sais pas si je saurai me relever. S'il le raconte ensuite à ses amis et que ça fait le tour du bahut, ma vie est fichue, réduite à néant. Nada. Je devrais déménager et changer de lycée, changer de nom et de coiffure. Je deviendrais un paria de la société, ce qui est déjà un peu le cas. De toute façon, je n'aime pas mes cheveux blonds. Ils sont une horreur à coiffer le matin.

Pourtant, je suis à la fois confus, soulagé et heureux. Ça aurait pu être pire. Son dernier message avait exorcisé la peur qui m'avait envahi.

Le mercredi et le jeudi étaient passés à la vitesse de l'éclair. Depuis le message de Derek, je n'attendais qu'à me rendre à la fête. Juste pour préciser quelque chose, j'ai dit que j'avais une tonne de travail à rendre. J'ai déjà raté une évaluation en math et un devoir en histoire. Je n'en ai rien à faire donc pour vous dire à quel point son message m'avait retourné les tripes. J'avais enfin l'impression de vivre. Il ne me restait plus qu'un seul jour à affronter avant le jour J.

Le vendredi arrive et est plutôt calme. Du matin, du moins. L'après-midi se passe merveilleusement bien. Même le cours de sport a été – ce sera certainement la dernière fois que je dirais ça – agréable. Une fois les cours terminés, je cours jusque chez moi et fonce prendre une douche. Après deux heures de sport et une semi-course (marche très rapide) d'un quart d'heure, l'eau chaude relaxe mes muscles et enlève les saletés et l'odeur de transpiration que l'activité physique a créé. Je sors de la douche avec un sentiment de propreté et de grâce. Je me sens comme un homme nouveau. J'enfile la tenue que j'ai acheté pour l'occasion : une chemise blanche et verte à rayures, un short chino beige et mes Vans noires. Je complète le tout avec un bracelet en argent avant de me regarder une dernière fois dans le miroir pour ajuster mes cheveux. Il me reste une heure pour avaler une assiette de pâtes et me brosser les dents avant de rejoindre Charli chez elle. Elle habite en bas de la rue. Dans le salon, mes parents et ma sœur sont assis dans le divan. Mon père zappe de chaîne en chaîne.

— On peut reporter la soirée film, si tu veux, me propose gentiment ma mère. Elle a mis son pyjama rose à motifs chats en velours.

— Non, ne vous privez pas pour moi.

— Fais attention à toi et amuse toi bien chez tes amis !

Je lui réponds en fermant la porte. L'odeur de mon nouveau parfum me suit en dehors de la maison.

À 20 heures pile, Liam nous prend Charli. J'ai décidé de ne pas conduire parce que hier j'ai essayé de conduire et j'avais pratiquement causé un accident à cause du soleil couchant.

Maintenant que j'ai mon permis, mes parents me laissent tranquille là-dessus. Ils n'ont pas l'air de comprendre que conduire une voiture est une énorme responsabilité. À chaque fois que je m'installe derrière le volant, la panique m'envahit. Ce n'est pas quelque chose qu'il faut mettre entre les mains de quelqu'un qui a déjà pensé à se suicider.

La voiture est remplie. Tous le monde est déjà à l'intérieur. Je me glisse à l'arrière à côté de Paige et Charli. La villa de Bella se situe en bord de ville, de l'autre côté de Beachdale. Il ne nous faut qu'une dizaine de minutes pour arriver devant la propriété. À peine engagé dans la rue, nous entendons déjà la musique battre son plein et les lumières illuminer le ciel étoilé. Les accotements sont occupés par des dizaines de voitures, tous appartiennent à des invités de la soirée. Ce n'est pas une rue très habitée, donc il est facile de deviner où sont tous leurs propriétaires. On marche jusqu'à l'immense grille en fer forgé de la propriété. Liam sonne à l'interphone et une voix féminine s'élève par les petits trous du boitier en métal :

— Aaaargh Youhoooou !

Puis une autre.

— Jessica, va crier ailleurs. Tu étais censée accueillir les gens, pas les effrayer. Qui est-ce ?

— C'est Liam. J'ai emmené mes amis.

On entend un bip et la grille s'ouvre.

— Que la fête commence, cria Jessica une dernière fois dans l'interphone.

Tell Me You Are Mine (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant