CHAPITRE 1

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Je sentais bien qu'il n'était pas tout à fait dans son assiette.
Le chevalier aux cheveux d'un bleu nuit, les bras croisés, dormait sur le comptoir. Il ne m'avait pas payé les quelques verres qu'il avait bu en une soirée mais il semblait toujours autant sûr de pouvoir payer l'addition. Même dans son sommeil, le même petit sourire taquin était dessiné sur son visage.
Il a le don de m'énerver quand il le veut.
Je pris son verre, le passait sous l'eau et le nettoyais tranquillement. Les clients habituels commençaient à quitter la taverne. Certains avec un grand sourire, et d'autres manquant de tomber à la renverse, se tenant trop fermement à la poignée de la porte d'entrée. Rosalia était partie depuis un moment, manquant de prendre le verre de trop, m'avait-elle dit.
Je passais ma main dans mes cheveux. Je vis une fine mèche rouge se décrocher de ma chevelure et la jetais dans la poubelle. Alors que je repoussais cet instant fatidique jusqu'au dernier moment, mes yeux se posèrent sur cet individu presque saoul. Il va falloir que je m'y colle... Je posais ma main sur son épaule et commençais à le secouer doucement.

« Oh. Kaeya, réveilles-toi. Je vais fermer. »

Il leva ses yeux vers moi, légèrement clos. L'oeil glacial qui me fixait me fit froid dans le dos, mais je continuais à le toiser durement. Il se releva dans une longue et grande inspiration, faisant gonfler son torse. Il passa sa main quelques instants sur son front et soupira. Un sentiment étrange me parcourut l'échine et je la fis taire instantanément.

« Je ne peux pas avoir un autre verre ? Dit-il, comme-ci il ne m'avait pas entendu.
-Je vais fermer. Répétais-je, avec ma voix froide habituelle. Pars d'ici si tu ne veux pas que je te sorte.
-Tu pourrais le dire plus gentiment ? Pesta-t-il malicieusement.
-Je t'ai déjà fait le cadeau de te laisser dormir, alors vas-t-en.
-D'accord d'accord, j'ai compris. »

Il se leva, en me regardant l'air insistant. Comme pour l'esquiver, je fermais mes yeux en croisant mes bras. J'entendis soudain un bruit sourd. En rouvrant mes yeux, Kaeya avait disparu. Je pensais donc qu'il avait fermé la porte brusquement, mais pour autant, le grognement du chevalier me fit comprendre qu'il était juste tomber par terre. Je me penchais au dessus du comptoir et le vis par terre, en train de ricaner.

« J'ai peut-être un peu trop bu... Dit-il, en rigolant de lui-même.
-Et voilà... Soupirai-je, las. »

Je sortais du bar et vins le relever. Opposant toute résistance, il se releva mollement. Il s'assit sur l'une des chaises face au bar et me regardais, la tête dans ses mains, fatigué. Je lui lançais un regard ennuyé qui le fit rire.

« Tu vas encore devoir me raccompagner apparemment... Dit-il, amusé.
-Si j'avais pu t'exclure de ma taverne, je l'aurais fait avant même que tu sois rentré ici pour la première fois.
-"Si" ? Donc tu ne peux pas le faire ... ? Dit-il avec un élan d'intelligence, l'index dressé au plafond. Cela veut-il dire que tu ne le fais pas parce que je représente la moitié des revenus de ta brasserie ?
-Ne te prends pour quelqu'un d'aussi important. Répondis-je, agacé. »

Je retournais derrière le comptoir, pris un verre et le remplit d'eau. Je le posais délicatement face à lui et je le vis hausser ses sourcils. Il n'avait pas l'air étonné, mais plutôt agacé.

« Tu penses que j'ai besoin de décuver pour rentrer ? Un verre d'eau n'y changera rien. Marmonna-t-il en penchant son regard vers les tables vides.
-Bois. Je vais éteindre les lumières en haut donc ne bouges pas. Répondis-je sèchement.
-Je ne comptais pas distraire monsieur Ragnvindr. Pesta-t-il, perdant patience. »

Je pestais à mon tour. Je sortis de nouveau du bar et montais les marches. Eteignant les bougies et lanternes une à une, je descendis pour éteindre celles du rez-de-chaussée. En jetant un coup d'oeil vers le capitaine de la cavalerie des chevaliers de Favonius, je le vis s'assoupir. Tsss... Il n'était bon qu'à rêvasser toute la journée et à boire en soirée pour dormir la nuit sur le comptoir. Et qui c'est qui doit s'en occuper après ? J'éteignis la dernière lanterne et me dirigeai vers Kaeya. Il s'agita et je me glissais sous son bras pour l'épauler. J'ouvris la porte et nous fîmes sortir. Je tournais deux fois la clé dans la serrure et tournais le panneau sur lequel était inscrit "FERMÉ". Aucuns chats dans les rues, je me dirigeai vers le haut de Mondstadt pour pouvoir déposer le cadavre alcoolisé chez lui. Montant les marches une à une, nous arrivions rapidement chez lui. Je me permis de fouiller dans sa veste pour prendre ses clés et j'ouvris la porte. Il habitait dans une belle maison mais qu'il n'avait pas acheté. Son grade dans l'Ordre de Favonius lui avait permis d'habiter là en tant que locataire. Quelques fois, il m'avait confié que la locatrice venait lui rendre visite et faisait le ménage tellement elle était exaspérée qu'il ne prenne pas soin de sa maison. Arrivant dans l'entrée, je le posais sur un siège en bois. Il s'adossa contre le mur tout en continuant à sourire. Je retirai mes chaussures, espérant ne pas salir plus le sol qu'il ne l'était déjà et je déchaussais également Kaeya. Je le repris sur moi et montais les marches de son petit escalier, conduisant à son bureau et sa chambre. Je commence à connaître par coeur les recoins de sa maison. J'ouvris la porte à ma gauche et posais Kaeya sur son lit. Encore habillé, j'ouvris son armoire et lui posa sur sa gauche un pyjama.

Une Passion GlacialeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant